Certains croyaient que la mondialisation allait tout uniformiser, faire disparaître les aspérités du monde, polir la rugosité humaine, aplanir les différences. Ils ont vite déchanté. Avec le triomphe de la dictature de la finance et des choses, la quête des identités nationales, locales et individuelles, s'est davantage ravivée, causant des frictions répétées. Des échauffourées urbaines, aux attentas terroristes, jusqu'aux guerres ouvertes, on s'exerce, partout sur la planète, à défendre son identité et à protéger ses platebandes. Au point d'y voir les signes annonciateurs d'une guerre totale, «la guerre des civilisations». Pour soi-disant l'éviter, on s'est mis à imaginer des recettes pour adoucir les mœurs, cultiver la tolérance et amener les cultures à plus de dialogue. L'angle d'attaque était tout trouvé : le spirituel, afin de contrer l'excès de matérialisme ambiant. Les théories foisonnent, des plus sérieuses aux plus farfelues. La plus idéaliste d'entre toutes est, sans doute, celle qui recherche «l'âme du monde». Bien plus utopique que l'espéranto, cette langue universelle qu'on a essayé de mettre sur pied, et qui a été oubliée aussitôt qu'elle a été pensée. Bien génial sera celui qui, déjà, cernera, tant soit peu, les contours de l'âme ; quant à déceler une prétendue âme moyenne de six milliards de terriens, pour pouvoir les apprivoiser... pincez-moi !