L'artiste Fathiya Tahiri transporte les amateurs de l'art dans un voyage, à travers une cinquantaine d'œuvres entre peintures et sculptures géantes de plus de deux mètres d'envergure, au-delà des frontières et des formes. Sous le thème évocateur “Décade”, un intitulé pour exprimer le temps de réalisation des œuvres dévoilées qui s'étale sur dix années, l'exposition, devant se poursuivre jusqu'au 17 mai prochain à la galerie 38 de Casablanca, permet aux visiteurs, à un public multiple de découvrir ce talent dont la renommée a été confirmée et les œuvres bien accueillies au fil des expositions. Cette exposition est une plongée dans l'univers de cette artiste dans l'âme où s'entrecroisent le macrocosme et le microcosme, l'universel et le particulier, l'équilibre et le déséquilibre, la symétrie et la dissymétrie, des œuvres picturales et sculptures (alliages de matériaux) tournées vers une exploration des formes, des lignes, des matériaux et des matières sillonnant une vaste palette de couleurs. Après avoir exposé à la Biennale de Venise en 2005 et 2009 ou encore au Musée d'Art de Shanghaï, Fathiya Tahiri célèbre sa décennie artistique dans le pays qui représente, comme elle le souligne avec emphase, la source même de son inspiration. Des œuvres ayant demandé beaucoup de travail et de temps, des nuits blanches mêmes pour cette artiste dans l'âme et architecte qui prend très au sérieux l'art qui lui permet de traduire comment naissent en ses pulsions créatives et créatrices. Les processus de création des deux disciplines, la peinture et la sculpture, sont distinct, a-t-elle confié à la MAP à l'occasion du vernissage, jeudi soir, de son exposition. Un ensemble de travail qui reflète cette quête de liberté. C'est un saut dans le vide, un pas vers l'inconnu et une prise de risque qu'elle assume. C'est aussi une espèce de cri surgissant du fin fonds d'elle, de cette incarnation de la jubilation créative où elle prend conscience, au fur et à mesure de l'échafaudage et de l'assemblage de l'œuvre, que tout son être et son devenir sont au bout de ses mains. Le travail de Fathiya Tahiri est puissant. Il repousse sans arrêt les limites d'un univers original de mondes alliant expressions uniques et captivantes. Au fil de ces dix dernières années, l'artiste n'a eu de cesse d'explorer de nouvelles formes et une vaste palette de couleurs tout en offrant un accès direct à ses émotions et à ses perceptions intimes. Cette recherche des plus prolifiques la conduit à la Biennale de Venise en 2005 et 2009 puis l'année dernière au Musée d'Art de Shanghaï où ses travaux ont été salués par les critiques d'art les plus reconnus comme l'italien Achille Bonito Oliva qui voit dans ses œuvres “la force d'un nomadisme franchissant toute frontière, au carrefour entre l'Orient et l'Occident”. Pour ce dernier, Fathiya appartient à cette génération d'artistes qui ont ‘'absorbé les stimulations culturelles d'un univers positivement global, à l'intérieur duquel l'identité ne résulte pas d'une appartenance territoriale, mais plutôt dans un lieu virtuel d'où il est possible de se déplacer, en mouvement continu, afin d'explorer, à travers ses propres formes, une réalité à la fois visible et structurelle. C'est une dynamique des choses, conjuguant la vie et la mort, que seul le mouvement excellent de l'art peut intercepter''. “Les œuvres de Fathiya Tahiri créent un langage imaginaire où sa spectaculaire palette de couleurs et ses formes contrastées illustrent une lutte visuelle constante, une altération entre figuration et imagination, mythologie, réminiscence et modernité”, reconnaît Pearl Lam, grande figure de l'art contemporain en Chine. Originaire de Fès, Fathiya Tahiri est née en 1959 à Rabat. Ses premiers travaux artistiques datent de sa petite enfance en prenant plaisir à sculpter des formes avec tout ce qu'elle trouve, des bougies, de l'argile, de la terre ou encore les tissus. Elle a 15 ans lorsqu'elle réalise ses premiers dessins. Sa vocation d'architecte se dessine alors et à l'âge de 18 ans, elle part en France où elle continue ses études à l'Ecole Spéciale d'Architecture de Paris. Les années passées dans la ville-lumière font mûrir ses travaux d'art. En 1986, elle ouvre son cabinet d'architectes à Rabat et mène de grands projets dans plusieurs villes du Maroc. Parallèlement, elle crée des meubles d'art qu'elle expose au Théâtre national Mohammed V à Rabat et à Casablanca. Après une exposition très remarquée en 2002 au Salon Napoléonien du Musée Correr de Venise, elle enchaîne les participations dans des événements majeurs, notamment à l'Open Arte & Cinema “Film Festival” de Venise en 2003 ou encore à la Mostra de Venise en 2004.