Ce Mercredi, jour où la suspension de la Syrie des travaux de la Ligue arabe devient effective, une réunion extraordinaire des ministres arabes des Affaires étrangères se tiendra à Rabat pour entériner cette décision votée le 12 novembre par 18 des 22 membres de la Ligue arabe. L'organisation panarabe a aussi indiqué étudier désormais un «mécanisme de protection des civils» et souhaite l'envoi de 500 membres d'organisations arabes des droits de l'Homme, de médias et des observateurs militaires dans le pays. Allant plus loin, le roi Abdallah II de Jordanie a appelé M. Assad à "quitter le pouvoir", devenant le premier dirigeant arabe à lancer un tel appel. Après ces déclarations, une centaine de personnes ont manifesté devant l'ambassade de Jordanie à Damas lundi soir, selon l'ambassadeur Omar al-Amad. Certains ont fait irruption dans la cour externe de l'ambassade déchirant et emportant le drapeau jordanien. Plusieurs ambassades arabes, turque et occidentale avaient été saccagées par des manifestants après la décision arabe de suspendre la Syrie et M. Mouallem a dû présenter les "excuses" de son pays. Parallèlement, l'Union européenne a étendu ses sanctions contre le régime syrien à 18 personnes, essentiellement des militaires, et a décidé de geler des prêts européens dans le pays. Les Etats-Unis se sont félicités d'un "renforcement du consensus contre Assad", mais la Russie et la Chine, des alliés du régime syrien, bloquent toujours toute action au Conseil de sécurité de l'ONU. Sur le terrain, plus de 70 civils et militaires ont péri dans les violences en Syrie dans l'une des journées les plus meurtrières depuis le début il y a huit mois de la contestation populaire que le régime de Bachar Al-Assad reste déterminé à mater malgré son isolement croissant. Lundi, 27 civils ont été tués par les forces de sécurité et 34 soldats et 12 déserteurs présumés sont morts lors d'accrochages armés, a indiqué une ONG syrienne de défense des droits de l'Homme, à la veille d'une réunion extraordinaire de la Ligue arabe censée entériner la suspension de la Syrie. Un militant des droits de l'Homme a dit craindre de voir le régime Assad "amplifier sa répression sanglante" contre les manifestants pro-démocratie, après la nouvelle position de la Ligue arabe qui a également menacé Damas de sanctions économiques. Alors que la révolte entrait dans son 9e mois mardi, la violence a continué avec une attaque de déserteurs qui ont tué cinq militaires à Deraa (sud) et des accrochages à Idleb (nord-ouest) dans lesquels "14 soldats sont morts ou blessés", a précisé l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Dans l'une des journées les plus sanglantes depuis le début de la contestation le 15 mars, "23 civils ont été tués lundi à Deraa par des tirs des forces de sécurité postés à des barrages" et quatre autres ont été tués à Homs (centre), un haut lieu de la contestation, selon l'OSDH. A Deraa également, "34 soldats ont péri lors d'affrontements avec des hommes armés, vraisemblablement des déserteurs, dont 12 sont morts", a ajouté l'ONG en précisant le bilan risquait de s'alourdir en raison de l'état grave d'un grand nombre de blessés. Il n'était pas possible de confirmer ces bilans de source indépendante, les médias étrangers étant interdits de circuler librement en Syrie où la répression de la contestation a fait 3.500 morts, selon l'ONU. Outre les manifestations pacifiques appelant à la chute du régime, les accrochages armés entre déserteurs et soldats se sont multipliés depuis plus d'un mois, et le nombre de soldats tués a augmenté, faisant craindre à plusieurs observateurs que le pays ne sombre dans la guerre civile. Le régime Assad, sourd aux appels internationaux et régionaux à cesser la répression, ne reconnaît pas l'ampleur de la contestation et affirme lutter, depuis le début de la révolte, contre des "gangs terroristes armés" accusés des violences et de chercher à semer le chaos en Syrie. Il se retrouve de plus en plus isolé après avoir été lâché par ses pairs arabes qui l'ont accusé de ne pas respecter ses engagements d'appliquer un plan arabe prévoyant le retrait des forces armées des villes et la libération des manifestants arrêtés. Mais le ministre syrien des Affaires étrangères Walid Mouallem, dénonçant la position de la Ligue arabe, a affirmé que son pays "ne fléchira pas et sortira plus fort" en assurant que "les complots ourdis contre la Syrie échoueront".