La ville de Tétouan, connue jusque là pour étant une destination prisée plutôt pour ses stations balnéaires même si elle s'enorgueillie de sa Médina classée patrimoine de l'humanité par l'UNESCO, est également une cité aux monuments historiques qui en disent long sur son patrimoine culturel et civilisationnel aussi riche que varié mais malheureusement très peu connu. Le site de Tamuda, à 5 km au Sud de Tétouan sur la route de Chefchaouen, en est l'illustration parfaite. Situé dans la vallée de l'oued Martil, à dix kilomètres, environ, à vol d'oiseau de la côte méditerranéenne, le site de Tamuda refait petit à petit surface dévoilant ses mystères grâce aux fouilles anciennes et récentes qui font rejaillir des données archéologiques importantes sur cette ville. De son nom berbère “Tamda” qui signifie “Marais”, le site de Tamuda renvoie à l'histoire antique du Maroc marquée par deux périodes successives à savoir, la période mauritanienne allant du IVe siècle après JC et la période romaine commençant 40 ans après JC et s'étalant sur 4 siècles. Découvert dans les années 20 par des chercheurs espagnols qui y effectuaient des fouilles archéologiques durant le protectorat, le site de Tamuda, devait attendre les années 90 pour se faire connaître à nouveau. Depuis, les gens entendaient parler de ce monument historique sans pour autant le visiter, d'où cette initiative du ministère de la culture de l'ouvrir au public marocain et aux touristes étrangers, lors d'une cérémonie présidée dernièrement par le ministre de la culture, Bensalem Himmich, accompagné notamment du Wali de Tétouan, gouverneur de la province, Mohamed Yacoubi, et du président de la Commune urbaine, Mohamed Ida Amar. Cet endroit qui s'étale sur cinq hectares a subi d'importants travaux qui se résument en l'aménagement du site, la construction d'un parcours, d'une conservation et d'un logement pour le conservateur, en plus d'un guichet et d'un laboratoire, le tout pour un montant de 4,8 millions de dh. Selon le ministre, l'ouverture de ce site “contribuera au rayonnement culturel de la ville de Tétouan et partant, en fera une destination touristique avec tout ce que cela engendre comme investissements potentiels et création d'emploi”. Pour ce faire, le site a d'abord fait l'objet d'une étude en vue de sa mise en valeur et sa sauvegarde avec des partenaires étrangers en particulier espagnols. L'objectif étant d'en faire une destination de tourisme culturel incontournable pour les férus des monuments historiques et de l'histoire des civilisations. Ces derniers auront ainsi l'occasion de découvrir ce site qui, depuis le IVe siècle avant JC, a été occupé pour marquer le début de l'époque mauritanienne au Maroc antique (IVe siècle avant JC jusqu'à l'an 40 après JC). A partir du IIe siècle avant JC, le site de Tamuda fut considéré comme une ville conforme aux règles d'urbanisation de l'époque grâce à la division spécifique des rues, maisons, boutiques, places publiques. Ajouter à cela sa situation stratégique et son ouverture sur la Méditerranée qui ont contribué au développement économique de la région facilitant des échanges économiques avec ses voisins méditerranéens grâce à la navigabilité de l'Oued Martil. Un grand nombre d'objets en céramique de production locale exhumés à Tamuda confirme une activité importante de production industrielle au niveau du site qui disposait aussi d'un atelier monétaire qui frappait des monnaies au nom des rois maures avec une calligraphie néopunique. Objet d'influences puniques au niveau de la langue, l'artisanat, les croyances, les rituels, etc. la ville de Tamuda a connu une stabilité politique remarquable jusqu'à l'année 38 avant JC lorsqu'elle a été dévastée par un important incendie dû probablement à une révolte interne, avant d'être reconstruite de nouveau et d'exister jusqu'à l'an 40 après JC où elle a été complètement incendiée et définitivement détruite par les légions romaines lors de leur invasion au royaume maure. Il aura fallu des fouilles archéologiques pour enfin percer le mystère de ce site avec la découverte d'un matériel constitué essentiellement de céramique, monnaies, bronze et un grand nombre de pièces de valeur qui reflètent les différents aspects de la vie militaire à l'époque romaine en Afrique du Nord. Désormais accessible aux visiteurs, le site Tamuda vient ainsi enrichir le patrimoine culturel et civilisation de la ville de Sidi Al Mandri.