L'alezan du Dr Weisgerber Le Dr Frédéric Weisgerber (1868-1946), auteur de «Au seuil du Maroc moderne», raconte dans «Casablanca et les Chaouïa en 1900», l'anecdote qui suit. Au début du vingtième siècle, il était allé avec une douzaine d'Européens, dont des dames, camper sur les bords de l'oued Mellah. Une vingtaine de serviteurs marocains avaient installé les tentes près d'une source limpide et d'une orangeraie parfumée. Toutefois, le docteur et ses amis craignaient que pendant la nuit l'on ne vînt dérober leurs chevaux, soit une trentaine de bêtes. Aussi recommandèrent-ils à leur personnel de faire vigilante garde. Le lendemain matin, de très bonne heure, le docteur fut réveillé dans sa tente par un Marocain qui lui sembla inconnu et il exprima sa surprise de cette intrusion. «Comment ! dit l'homme en riant, tu ne me reconnais pas ? Ne vois-tu pas que je suis Ahmed Ben Mohammed, de la tribu des Zyaïda avec qui tu as chassé l'an dernier ?» Le docteur se frotta les yeux et l'accueillit amicalement. «Et qu'est-ce qui t'amène à cette heure matinale ? – Je suis ici avec une douzaine de mes frères. – Vous êtes sans doute en voyage ? – Non, nous étions venus pour vous voler vos bêtes. Nous avions déjà réussi à en sortir trois du camp, lorsque la lune, apparaissant entre deux nuages, nous a permis de reconnaître ton cheval alezan. Alors, nous avons ramené les bêtes que nous avions prises et nous les avons remises en place. Vos «assès» dormaient trop bien et aucun n'a bougé : ce ne sont que des citadins. Vous n'êtes pas en sécurité avec eux. Aussi avons-nous décidé de les remplacer et de veiller sur vous tant que vous camperez ici. » (Sources : «Histoire du Maroc» destinée aux élèves des cours moyens (1955) de Ch. Penz, L. Levesque et «Le Maroc par le petit bout de la lorgnette» (2010), de Péroncel-Hugoz).