A mesure que la ville d'Agadir grandit en termes d'urbanisme, on a l'impression qu'on la cerne de toutes parts. Le foncier flambe à une vitesse vertigineuse dans toutes les parties de la cité, même dans les points les plus reculés. Les coûts des lots ou encore des appartements qui, il y a quelques années, étaient abordables titillent les paroxysmes et ne sont plus à la portée des petites et moyennes bourses. La spéculation assassine s'intensifie de plus belle, à tel point que ce sont toujours les mêmes qui s'approprient le butin juteux. Que font les responsables censés défendre “le droit au logement” pour toutes les souches sociales, en particulier les plus déshéritées ? Rien de rassurant, malheureusement. Pis encore, on enfonce le clou en se rangeant ignoblement du côté des spéculateurs et incitant au renchérissement abject. Dès lors, Agadir est devenu le havre des prédateurs fonciers qui prennent d'assaut tous les terrains, avec la bénédiction des spéculateurs aux multiples facettes bien choyées. On balise, alors, le chemin de l'édification des unités d'habitation comme des champignons, souvent sans être localement autorisés à le faire et sans prévoir des équipements sociaux, notamment des écoles, des dispensaires, des espaces verts, des maisons de culture, des aires de sport… D'autres viennent s'accaparer des terrains le long du littoral qu'ils monopolisent sans avoir à passer par les procédures d'expropriation légale et par les voies administratives requises. Devant cet hégémonisme démesuré, les opérateurs économiques locaux se voient frustrés par cette inondation étrangère, fortement implantée dans plusieurs régions du royaume. Les portes de l'immobilier ont été donc ouvertes à des promoteurs privés bien connus qui jouissent de tous les privilèges et, de ce fait, dont les terrains à des prix destinés à l'habitat économique, mais, en réalité, les réalisations qui s'effectuent au grand jour transgressent toutes les formalités initiales, voire les directives royales et gouvernementales à ce propos. Le cas du lotissement Hay Mohammadi dont des dizaines d'hectares ont été cédés, à des prix préférentiels à des promoteurs immobiliers «importés», est flagrant puisque son cours normal a été tout simplement dévié du fond en comble de son objectif, avec des agissements illicites et des rentabilités faramineuses. Maintenant, d'aucuns diraient, de vive voix, qui a vendu Agadir ou encore qui a acheté Agadir, car, en fin de compte, ce sont les deux faces de la même monnaie ! D'une part, les coins les plus prisés de la ville sont automatiquement légués aux influents qui débarquent sur les lieux et y montent leurs petites merveilles ou pondent à profusion des immeubles pour les revendre, avec des sous-tables, pareil à des vaches laitières. D'autre part, la flambée des prix fait des ravage dans les opérations urbanistiques, partout dans la ville, sans tenir compte des pouvoirs d'achat des citoyens, puisque les spéculateurs sont là pour mettre de l'huile dans le feu et attiser les convoitises des mêmes acquéreurs. Le “petit” peuple, lui, se débat comme des «rats» dans les unités bidonvilloises ou des agglomérations où la promiscuité et l'exclusion battent leur plein. Cette politique de bidonvilisation longtemps encouragée en ville à des fins électoralistes et purement corruptives, en complicité avec les Autorités et les élus, avait déblayé le terrain vers l'émergence des gros bonnets de l'immobilier, la ruralisation des périphéries et l'entrée en lice des spéculateurs professionnels en la matière. D'une traite, on s'est précipité à coups de bulldozers et de massues pour éradiquer ce phénomène qui, malheureusement, a pris des tournures dramatiques. Dans nombre de ces points noirs, on a fait évacuer les bidonvillois en présence des forces de l'ordre avec qui, évidemment, les accrochages se sont âprement déclenchés. Comme les solutions proposées sont loin d'endiguer la problématique, les expulsés, quoiqu'ils soient relativement «indemnisés», s'en vont acquérir une masure dans les environs. En réalité, avec ces démarches entreprises à la hâte et par force, les bidonvilles ne font que se déplacer d'un lieu à l'autre, sans qu'on mette réellement un terme à cette problématique chronique. Ce chassé-croisé n'a fait alors que commencer. La machine de la démolition s'est abattue sans merci sur les nombreux bidonvilles d'Anza, lieu de catastrophe pour des milliers de familles qui, depuis des années, ont été «leurrés» et entassés dans des taudis, à cause de cette politique de paupérisation, adoptée lors des précédents mandats électoraux, en connivence avec les agents de l'Autorité, parfaitement comme dit l'adage de chez nous «Rends ton chien affamé, il te suivra !». Voilà, donc une situation déconcertante d'une ville où les ségrégations et les disparités sociales ne font que s'élargir, avec une poignée de lobbys de la haute sphère qui se l'accapare de bout en bout, et, en revanche, de larges franges populaires de la société sont reléguées aux matraquages de la cherté de la vie et aux flambées astronomiques du logement.