L'ancien patron du FMI Dominique Strauss-Kahn est arrivé dimanche à Paris, près de quatre mois après son arrestation à New York pour crimes sexuels, une accusation abandonnée par la justice américaine mais qui a torpillé l'avenir politique de l'ex-champion des socialistes français. Ce retour risque fort d'embarrasser les socialistes, en pleine campagne pour des primaires qui doivent désigner en octobre leur candidat à la présidentielle de 2012 face au sortant Nicolas Sarkozy, que DSK fut longtemps le mieux placé pour vaincre. DSK et son épouse Anne Sinclair, qui lui a apporté un soutien sans faille à travers ce qu'il a qualifié de “cauchemar”, sont arrivés à 05H05 GMT à l'aéroport parisien de Roissy sur un vol Air France en provenance de New York. Très souriant et détendu, le couple a rapidement regagné son domicile de la place des Vosges, au cœur de Paris, sans faire de déclaration. De l'avis de plusieurs de ses proches, Dominique Strauss-Kahn a besoin de se “reconstruire”, de savourer “la liberté” retrouvée et ne s'exprimera pas dans l'immédiat. “Il s'exprimera devant les Français au moment qu'il choisira. Il le fera, je pense, dans un délai pas trop éloigné”, a estimé dimanche Pierre Moscovici, député proche de DSK qui a rejoint l'équipe de campagne de François Hollande, nouveau favori des sondages pour la présidentielle. Dès l'annonce le 23 août par la justice américaine de l'abandon des poursuites pénales contre lui, Dominique Strauss-Kahn, 62 ans, avait déjà dit avoir “hâte de rentrer” dans son pays pour s'y “exprimer plus longuement”. Peu avant son retour en France, il a tenu à faire ses adieux et présenté ses excuses au personnel du Fonds monétaire international (FMI) à Washington, s'attirant des applaudissements. Son retour à Paris s'annonce plus délicat. Si DSK est assuré qu'il n'ira pas en prison aux Etats-Unis, il devra encore répondre de poursuites au civil et surtout affronter une longue procédure en France, où il est aussi poursuivi pour tentative de viol. La romancière française Tristane Banon, 32 ans, affirme avoir été agressée sexuellement par Dominique Strauss-Kahn en 2002 et a porté plainte contre lui le 4 juillet. DSK a vivement démenti cette accusation. La mère de Tristane Banon, l'élue socialiste Anne Mansouret, a qualifié dimanche d'”indécent” le retour de DSK et réclamé qu'il s'explique. La perspective d'une longue procédure avait dès l'été poussé les socialistes à tourner la page. Ses plus fidèles lieutenants ont tour à tour rallié les deux principaux prétendants à l'investiture socialiste, la patronne du PS Martine Aubry ou le député François Hollande. Martine Aubry s'est nettement démarquée en disant mardi partager l'avis de “beaucoup de femmes” sur l'”attitude” de DSK à leur égard. Radical, l'outsider Arnaud Montebourg a même demandé mercredi que l'ex-patron du FMI fasse des excuses “aux socialistes” et “ensuite qu'il garde le silence”. De son côté, le député Jean-Marie Le Guen, proche de DSK ayant rallié François Hollande, s'est dit certain dimanche que son ami ne tenterait pas de “s'immiscer dans le processus des primaires”. Pour le politologue Stéphane Rozes, de la société de conseil Cap, DSK “reste un boulet pour le PS” et “moins les socialistes parleront de lui, mieux ce sera”. DSK “va être une tache indélébile au Parti socialiste”, a estimé la député de droite Chantal Brunel, en marge d'un rassemblement du parti de Nicolas Sarkozy à Marseille (sud-est) où la majorité a peiné à montrer un visage uni ce week-end. Le président sortant, candidat naturel à sa réélection, ne s'est pas encore officiellement déclaré et est pour le moment donné battu au second tour par Hollande comme Aubry. Brillant économiste et européen convaincu, mais favori remplacé, DSK a-t-il encore un avenir politique? Selon le politologue Gérard Grunberg, DSK “est hors course au moins jusqu'à l'après élection présidentielle”. Mais pour l'ancien ministre socialiste Jack Lang, “à un moment ou à un autre, cette compétence internationale irremplaçable, son expérience nationale de ministre de l'Economie ... seront utiles”.