Les soldats israéliens sont entrés lundi soir pour la première fois dans cette place-forte du Hezbollah, alors que le mouvement chiite poursuit ses tirs de roquettes sur plusieurs villes du nord d'Israël. L'Etat hébreu annonce qu'il compte établir une zone de sécurité de 20 km au Sud-Liban. Huit civils et onze combattants chiites libanais ont été tués mardi, ainsi qu'une jeune Arabe israélienne. Israël est en passe de gagner la bataille décisive qui se livre depuis lundi pour le contrôle de Bint Jbeil. Cette petite ville du Sud-Liban abrite le commandement militaire local du mouvement chiite libanais (voir une carte du Sud-Liban en pdf). Mardi soir, l'armée israélienne annonçait avoir pénétré pour la première fois dans la ville, au terme d'une journée de combats acharnés. Des colonnes de blindés s'étaient massées mardi à l'aube sur les collines qui entourent la ville. Toute la journée, des fusillades ont opposé les soldats de Tsahal aux hommes du Hezbollah. Selon l'armée israélienne, il y aurait eu 20 à 30 miliciens chiites tués autour de Bint Jbeil depuis 24 heures. En début d'après-midi, le Hezbollah a confirmé la mort de cinq de ses combattants, auquel s'ajoute le décès de deux secouristes, mais sans préciser s'ils avaient été tués à Bint Jbeil. Le mouvement Amal, proche du président chiite et pro-syrien du Parlement libanais, Nabih Berri, fait de son côté état de la mort de quatre de ses miliciens. La télévision qatariote al-Jezira évoquait quant à elle quatre blessés israéliens, une information que l'armée israélienne n'a pas commenté. Un porte-parole militaire israélien expliquait en fin d'après-midi que « la conduite des opérations progresse conformément aux plans. Nous avons déjà éloigné le Hezbollah de la frontière, et il ne nous menace plus avec ses armes légères, et nous allons éloigner aussi la menace des missiles et des roquettes. Il faut du temps et de la patience », précisait le commandant en chef des opérations dans cette localité. Israël veut occuper une « zone de sécurité » au Sud-Liban Le contrôle de Bint Jbeil fait partie de la stratégie décidée par le gouvernement d'Ehoud Olmert : occuper une « zone de sécurité » au Sud-Liban « jusqu'au déploiement d'une force de stabilisation internationale ». C'est ce qu'affirme mardi après-midi le ministre israélien de la Défense, Amir Peretz, au quatorzième jour d'un conflit qui s'intensifie. Pour l'Etat Hébreu, cette force devrait comprendre jusqu'à 20.000 hommes, deux fois plus que ce qu'envisagent actuellement les puissances européennes. La Syrie a relevé, mardi, son seuil d'alerte, alors que malgré l'avance israélienne, le Hezbollah est encore parvenu à tirer seize roquettes sur la ville israélienne d'Haïfa, causant au moins douze blessés, dont trois dans un état grave. D'autres roquettes ont atteint le nord de l'Etat hébreu, où une jeune fille arabe de 15 ans a été tuée dans le village de Mghar. En milieu d'après-midi, les raids aériens israéliens ont repris sur la banlieue sud chiite de Beyrouth, où des témoins ont fait état d'au moins cinq détonations. Mardi matin déjà, sept membres d'une même famille ont été tués dans un bombardement sur leur habitation dans la ville de Nabatiyé, 75 km au sud de Beyrouth. Selon la police, la maison a été frappée par un missile et a été totalement détruite. Un passage ouvert pour les civils Le général Alon Friedman, haut responsable de la région militaire nord, a confirmé que l'objectif de l'armée israélienne est « de détruire les infrastructures du Hezbollah et de liquider les terroristes de cette organisation afin de réduire les tirs contre la région nord » d'Israël. Selon lui, les troupes ont laissé ouvert un passage à « pour permettre aux civils de partir vers le nord et vers Beyrouth ». « Les hommes du Hezbollah peuvent aussi en profiter », a-t-il ajouté. Selon l'armée de l'Etat hébreu, les combattants du Hezbollah se terrent dans un réseau de tranchées et de tunnels creusés autour des villages du Sud-Liban. L'armée israélienne a annoncé en fin de journée qu'elle avait relâché deux libanais capturés dimanche et soupçonnés d'appartenir au Hezbollah. Une offensive cantonnée au Sud-Liban ? Si les troupes israéliennes ont poursuivi leur progression depuis deux jours, un haut responsable militaire a cependant affirmé que l'offensive terrestre n'ira pas au-delà du Sud-Liban : « Nous n'avons pas l'intention d'étendre nos opérations à 70 km au nord de notre frontière avec le Liban. Nous allons nous occuper de l'infrastructure du Hezbollah qui est à notre portée dans le sud du pays », a-t-il détaillé. Un autre officier supérieur a précisé à la radio publique que l'armée comptait toutefois élargir son champ d'action vers d'autres agglomérations de cette région. Dimanche, le ministre israélien de la Justice, Haïm Ramon, avait indiqué que l'opération devait « aboutir à une situation où il n'y aura plus un membre du Hezbollah armé à 20 km » de la frontière. Shimon Pérès : « ce sera nous ou le Hezbollah » Le vice-premier ministre israélien, Shimon Pérès, a confirmé mardi cette politique : « Dans cette guerre, il n'y a pas d'alternative à la victoire sur les terroristes ». L'offensive en cours au Liban est « une question de vie ou de mort pour Israël. Ce sera nous ou le Hezbollah », a poursuivi le prix Nobel de la Paix. S'adressant au peuple libanais, Shimon Peres a averti : « Vous non plus n'avez pas le choix. Ce sera vous ou le Hezbollah. » Olmert : Israël a la « résistance » pour un conflit de longue durée Le premier ministre israélien a affirmé mardi après-midi que son pays était résolu à un conflit de longue durée. « Nous sommes un peuple fort et nous avons la résistance nécessaire pour tenir, même dans de longs conflits », a lancé Ehoud Olmert. « Nous poursuivrons cette bataille pour atteindre tous nos objectifs et vaincre les ennemis qui s'attaquent au peuple et à la terre d'Israël », a-t-il ajouté, alors qu'il accueillait une centaine d'émigrants juifs en provenance de France. Mardi en fin de soirée, la télévision israélienne annonçait que de nouvelles forces étaient massées le long de la frontière entre Israël et le Liban en vue d'élargir l'offensive terrestre. Depuis le début du conflit il y a 14 jours, 394 personnes, dont 335 civils, ont péri dans les bombardements israéliens au Liban.