Abbas demande la libération des ministres et députés palestiniens L'armée israélienne s'apprêtait hier à élargir son offensive militaire entamée la veille dans la bande de Gaza pour obtenir la libération du caporal Gilad Shalit, enlevé dimanche, mais de fortes pressions de la communauté internationale l'ont amenée à reporter une offensive d'envergure. Selon la radio publique israélienne, le ministre de la Défense, Amir Peretz, a décidé de reporter l'offensive militaire terrestre prévue afin de vérifier si des efforts diplomatiques peuvent mener à la libération du caporal Gilad Shalit. La seconde chaîne privée de la télévision israélienne a pour sa part indiqué que des efforts étaient menés par l'Égypte en direction de Khaled Mechaal, le chef de la direction politique du Hamas, en exil à Damas. La violence s'est cependant poursuivie avec des bombardements contre des zones du nord de la bande de Gaza, dont les locaux du ministère de l'Intérieur palestinien. Réunis à Moscou, les chefs de la diplomatie du G8 ont appelé Israël hier à «la plus grande retenue» dans la crise actuelle, une prise de position qui semble traduire un infléchissement de la position de Washington. Cet assouplissement de Washington pourrait être dû à la fois au comportement de l'armée israélienne, qui a arrêté depuis huit ministres ainsi que des dizaines de députés et de hauts responsables palestiniens, et aux efforts diplomatiques des autres membres du G8. Pour sa part, le président égyptien Hosni Moubarak a affirmé dans une entrevue publiée aujourd'hui dans le journal Al-Ahram que le Hamas a accepté de libérer à certaines conditions le soldat israélien enlevé mais qu'Israël n'a pas encore fait connaître sa position sur les conditions posées. De son côté, le président palestinien Mahmoud Abbas en a appelé aux Nations unies afin d'obtenir la libération des ministres et députés arrêtés par Israël. Un tiers des membres du gouvernement palestinien dirigé par le Hamas ainsi qu'une vingtaine de députés du mouvement islamique sont détenus par l'armée israélienne. «Nous avons reçu un appel émanant de la présidence de l'Autorité palestinienne demandant la libération immédiate de ces gens», a déclaré le représentant spécial de l'ONU au Proche-Orient, Alvaro de Soto. Il a précisé que l'ONU aborderait la question avec le gouvernement israélien, sans donner plus de précisions. Malgré le report de son assaut, l'armée israélienne a continué son action dans la bande de Gaza. La nuit dernière, un avion de chasse israélien a tiré un missile sur le bureau du ministre palestinien de l'Intérieur, au siège du ministère à Gaza, où un incendie s'est déclaré, a-t-on appris de sources proches des services de sécurité et auprès de témoins. Un autre raid aérien a visé à Gaza une voiture transportant un responsable du Djihad islamique, qui a survécu à l'attentat, tandis que des activistes palestiniens ont fait exploser le mur séparant Gaza de l'Égypte pour se créer une voie de sortie dans l'éventualité d'une avancée israélienne. Hier encore, un tir de missile israélien a détruit une deuxième centrale électrique, dans le sud de la bande de Gaza, privant d'électricité la région et élargissant le black-out déjà provoqué par d'autres destructions de ce genre. Des frappes aériennes israéliennes avaient endommagé mercredi les principaux transformateurs électriques du reste de la bande de Gaza. L'aviation israélienne a mené un autre raid contre un poste du service national de sécurité palestinien situé près de la centrale électrique déjà détruite aux abords du camp de réfugiés de Nousséirat, dans le centre de la bande de Gaza.Six roquettes tirées contre Israël à partir de la bande de Gaza se sont abattues sans faire de victime. «Elles ont notamment visé les villes d'Ashkelon et Sdérot», dans le sud d'Israël, a indiqué un porte-parole de l'armée sans autre précision. Dans un communiqué diffusé à Gaza, les Brigades des martyrs d'al-Aqsa, liées au parti Fatah du président palestinien Mahmoud Abbas, ont revendiqué la responsabilité du tir de deux de ces engins. Mercredi, Israël a lâché des tracts dans le nord de la bande de Gaza, invitant les habitants à se tenir à l'écart des zones que ses forces pourraient prendre pour cibles. Au cours d'un raid mené en pleine nuit de mercredi à hier en Cisjordanie, les forces israéliennes ont arrêté le ministre palestinien des Finances, Omar Abdel-Razek, huit autres ministres ainsi qu'une vingtaine de députés appartenant au Hamas. Selon des sources proches des services de sécurité israéliens, 64 responsables du Hamas ont été arrêtés. «C'est un complot planifié pour détruire l'Autorité [palestinienne], le gouvernement et le Parlement et pour mettre le peuple palestinien à genoux» a déclaré Mushir al-Masri, député du Hamas. Mark Regev, porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, a déclaré que les arrestations étaient «dues au fait que, ces dernières semaines, le Hamas a intensifié les attentats terroristes contre Israël». «Ils ne sont pas utilisés comme monnaie d'échange. Ce sont des gens qui sont connus pour terrorisme, avec des accusations et des inculpations à leur encontre», a déclaré Jacob Dalal, porte-parole de l'armée. Israël, qui s'est retiré de la bande de Gaza il y a près d'un an, a dit à plusieurs reprises qu'il tenait le Hamas responsable de l'enlèvement du caporal Shalit. Les dirigeants du Hamas ont assuré qu'ils n'étaient pas impliqués dans les préparatifs de l'attaque de dimanche, lancée par la branche armée du mouvement et par deux autres factions. En Israël même, des députés de l'opposition de gauche et arabes israéliens ont critiqué l'offensive en cours. Le député Yossi Beilin, du parti Meretz (cinq députés sur 120), a publiquement demandé de «la faire cesser au plus vite» et d'oeuvrer en vue d'une trêve avec les Palestiniens alors que le député Ahmed Tibi, de la Liste arabe unifiée (quatre députés), a accusé le gouvernement «d'avoir perdu le nord» en arrêtant des responsables politiques du Hamas sans lien avec l'enlèvement du soldat. Cependant, la classe politique et l'opinion se sont rangées derrière le gouvernement, considérant qu'il n'avait pas d'autre choix que de se lancer dans une escalade devant l'intensification des attaques palestiniennes à partir de la bande de Gaza, et notamment les tirs de roquettes. La bande de Gaza n'est plus qu'à trois jours d'une crise humanitaire catastrophique si Israël ne rétablit pas rapidement l'approvisionnement en carburant et en électricité à cette zone densément peuplée, a averti hier Jan Egeland, secrétaire général adjoint de l'ONU aux affaires humanitaires. Au coeur de la crise, a-t-il dit, se trouve le bombardement par Israël de la seule centrale électrique de la bande de Gaza, qui fournit 40 % de l'électricité au territoire. Environ 130 puits, dans la bande de Gaza, ont besoin d'électricité pour pomper l'eau, et si certains ont des groupes électrogènes qui fonctionnent au diesel, Israël n'a autorisé l'entrée d'aucun carburant dans la bande de Gaza depuis quatre jours.