Le «ribabiste» Bouhsine Foulane a révolutionné la pratique de son instrument. Il parle de ses ambitions et de sa récente participation au Festival gnaoua, musiques du monde. Pourquoi avez-vous quitté le groupe AmargFusion? Bouhsine Foulane : Je fais beaucoup de tournées, je me déplace beaucoup et je joue avec diverses formations. Et cela, les membres de mon ancien groupe ne l'ont pas accepté. Pour eux, il fallait choisir. Je joue actuellement avec le groupe Mazagan ainsi qu'avec RibabFusion, une nouvelle formation que je viens de créer On essaye au sein de cette dernière de poursuivre l'élan artistique de la world musique amazighe. D'ailleurs le prochain album du groupe sortira bientôt. Je collabore aussi avec Hamid Kasri, Mazagan, Karim Ziad, et d'autres artistes étrangers. Et je me sens plus épanoui ainsi. Vous êtes l'un des jeunes «ribabistes» les plus connus au Maroc. Quelle est votre ambition pour cet instrument ? J'espère permettre au ribab d'acquérir un plus grand rayonnement, autant que celui du guenbri des gnaoua, désormais reconnu internationalement et que pleins de gens veulent découvrir et pratiquer. Parce que le ribab est aussi un symbole de la culture marocaine et amazigh. Ainsi, j'œuvre pour que cet instrument retrouve sa réelle valeur et soit enseigné de manière académique notamment à travers un manuel d'apprentissage que je suis en train de d'écrire en ce moment. Il ne faut pas cantonner le ribab à l'aspect folklorique. Il faut valoriser cet héritage, l'actualiser et le partager avec les générations futures pour que celles-ci se l'approprient. Aujourd'hui pour exprimer leurs problèmes, nos jeunes s'imprègnent du hip hop et d'autres styles et les adaptent à leur langage et époque, cela est aussi possible avec la musique amazighe. Et puis dans notre culture marocaine, on a aussi besoin que chacun transmette le savoir qu'il détient non pas le garder pour soi. Comment avez-vous donc appris au ribab ? Au début, je jouais et enseignais le violon. Et en tant que jeune originaire d'Agadir, fier de ses origines et de sa culture amazighe, je me suis décidé à apprendre à jouer au ribab. J'ai donc commencé chez moi en autodidacte, avant d'aller suivre l'enseignement auprès de grands chioukh. Ensuite, j'ai essayé de faire évoluer cet instrument au niveau de sa forme et au niveau de la façon de jouer. Je m'inspire particulièrement de Jimmy Hendrix. J'aime son énergie et sa spontanéité. J'espère qu'il y aura d'autres personnes qui s'intéresseront au ribab ainsi qu'à d'autres instruments traditionnels, pour qu'il y ait richesse et diversité. J'ai joué au violon pendant dix ans et personne ne me connaissait. Grâce au ribab, je suis devenu célèbre. Et puis mon rapport avec mon instrument est sain de toute hypocrisie. Je le joue avec mon coeur et ma sincérité. Comment s'est déroulée votre participation au Festival d'Essaouira ? Moi, je suis très content de participer au Festival d'Essaouira parce que je fais de la fusion avec mes compatriotes. Ainsi, il s'agit d'une sorte de de dialogue interne essentiel. Pour moi, il est important d'affirmer son identité et de faire connaître sa marocanité avant d'entreprendre le dialogue avec l'autre. Ce qui réchauffe le cœur, c'est que dans nos festivals, on commence de plus en plus à faire confiance aux talents marocains. On commence à reconnaître leur travail, leur culture et leur expérience.