Le gouvernement grec a décrété samedi l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire en raison des plus graves incendies de forêt depuis des décennies. Au dernier décompte, 47 personnes ont péri dans les flammes depuis vendredi. Le feu isole de très nombreux villages dans la péninsule du Péloponnèse et sur l'île d'Evvoia (Eubée). Il a aussi gagné une partie de la banlieue est d'Athènes. Pour le Premier ministre Costas Caramanlis, qui a décrété l'état d'urgence, cette multiplication des départs de feux "ne peut pas être une coïncidence". "Les pouvoirs publics feront tout leur possible pour trouver les coupables et les punir", a prévenu le chef du gouvernement conservateur dans une allocution télévisée. "Toutes les régions du pays sont déclarées en état d'urgence afin de mobiliser tous les moyens et toutes les forces pour faire face à cette catastrophe", a ajouté le Premier ministre. La campagne électorale pour les législatives du 16 septembre a été interrompue, les drapeaux ont été mis en berne pour un deuil de trois jours marquant ce que Caramanlis a qualifié de "tragédie nationale indescriptible". Le tocsin a sonné dans des centaines de villages en cours d'évacuation où les habitants luttaient contre les flammes avec de simples jets d'arrosage ou des seaux d'eau pour tenter de sauver leurs maisons. "Le feu gagne la ville à toute vitesse", a raconté un habitant de la ville d'Aliveri, sur Evvoia, à la télévision. "Nous partons ou nous mourrons brûlés vifs. Il n'y a personne pour nous aider." Les gens fuient en voiture, en camion ou en bateau et les ferries en partance d'Evvoia évacuent les habitants vers le continent, près d'Athènes. SECOURS EUROPÉENS Dans la capitale, des cendres ont recouvert les rues, rendant la respiration difficile. Des incendies alimentés par des vents violents ont touché les banlieues de Keratea et Kalyvia, des usines ont brûlé. "C'est l'enfer", a témoigné le maire de Kalyvia, Petros Filippou. "Le front est long de 30 kilomètres et a maintenant atteint les premières maisons." La police a évacué un monastère et fermé pendant plusieurs heures l'autoroute reliant Athènes au principal aéroport. Plusieurs enfants figurent parmi les 47 morts. On craint de nouvelles victimes dans les nombreux villages toujours coupés du reste du pays par d'imposantes murailles de feu. Des sauveteurs ont retrouvé des corps sur le bord des routes, dans des maisons ou des voitures incendiées, dont une mère agrippant ses enfants. Les incendies ont éclaté vendredi dans le Péloponnèse, réduisant en cendres des milliers d'hectares de forêt et d'oliveraies, avant de gagner du terrain, attisés par des vents forts qui gênent les efforts des soldats du feu. Au total, environ 9.000 pompiers grecs sont mobilisés, aidés par un demi-millier de militaires, et équipés de 1.800 camions, avions et hélicoptères. Athènes a appelé à l'aide ses partenaires de l'Union européenne. Au moins onze pays ont déjà dépêché des hommes, 14 avions et 11 hélicoptères, qui devraient être opérationnels dimanche à l'aube. Les pompiers grecs ont recensé une centaine de feux de forêt dans tout le pays, le Péloponnèse étant la région la plus touchée. Les températures caniculaires, le vent violent, la sécheresse et les actes de pyromanie sont les facteurs cités pour expliquer le caractère exceptionnel de ces incendies. Caramanlis, qui s'est rendu dans la région, a promis que l'Etat dédommagerait les victimes et s'est engagé à financer un programme de reforestation. Son gouvernement conservateur avait vu sa popularité chuter pour avoir réagi trop lentement à une première série de feux de forêt cet été, qui a fait dix morts. De son côté, le Pasok (socialiste), première formation de l'opposition, a fait savoir qu'il offrait 30% de son budget de campagne aux victimes des incendies. Deux touristes français seraient morts selon des informations sur place. Le Quai d'Orsay n'a pas confirmé. "Il est fort peu probable que les corps retrouvés soient ceux de nos compatriotes", a-t-on indiqué de source diplomatique.