Les vacances d'Hélène Max sont programmées depuis le quinze janvier 2007. Avec son mari, elle a décidé qu'il iront, du 15 au 30 juillet, participer à une randonnée dans le moyen Atlas pour ensuite s'envoler pour les îles Canaries profiter d'une semaine de thalassothérapie. Hélène Max et son mari sont donc en vacances depuis trois jours maintenant, le programme étant réglé comme une horloge. Jusqu'au début du mois de juillet, sa voisine Amina Sabir et sa petite famille n'ont encore rien programmé. A la question: «Où passerez-vous vos vacances ?». Elle répond vaguement: «Je ne sais pas encore, son congé à lui n'a pas encore été fixé, en fait, il ne sait pas quelle période choisir» Evidemment «lui» c'est le mari. Au Maroc, on en parle toujours à la troisième personne ou sinon on dit «Mon homme» pour marquer le territoire et déclarer implicitement : «Propriété privée, défense de toucher». Le problème, c'est que, par rapport aux vacances, Amina stresse déjà et presse son mari de faire un break pour, qu'avec les enfants, ils puissent voyager et profiter des vacances. «Si nous sommes encore là dans deux jours, c'est foutu, la famille va commencer à affluer et on pourra dire adieu à nos vacances de cette année aussi» C'est ce qui arriva. D'abord, un jeune couple nouvellement marié largua les amarres. «De toutes les villes du Maroc, j'ai craqué sur Agadir. On en dit tellement de bien dans les reportages à la télé ! dit la jeune épousée. Je «lui» ai dit, on passe la lune de miel chez Tati !» Heureusement, les deux tourtereaux durent interrompre leur séjour cinq jours plus tard vu que le marié a été rappelé pour une urgence au travail. Mais Amina n'en souffla pas pour autant car une autre famille, avec cinq enfants, élue domicile chez elle. Pour «quelques jours» au début, puis de déclarer une fois installée : fin du mois, grand maximum». Et Amina de lancer, timidement : «Excusez le manque d'espace» «C'est pas grave, on va s'arranger, l'espace, c'est dans le coeur !!», s'entend-elle répliquer. Amina ne pût donc que baisser les bras face à ces colonisateurs qui ont pris sa maison pour une colonie à tort. Puis ce fût le cycle, si si, infernal : elle aux fourneaux, son mari aux courses, les invitésje veux dire les infiltrés à la plage ! Pourquoi ça marche pour Hélène et pas pour Amina ? Parce que la première programme tout et sait mettre les points sur les «i» pour que personne ne vienne piétiner ses priorités. Quant à la deuxième, elle ne programme rien et puis le hchouma l'empêche de protester. C'est pourquoi ses poings à elle, elle les met dans le bac à vaisselle et subit. Evidemment, son cas n'est pas isolé. Chez la plupart des familles marocaines c'est pareil. L'observateur notera le nombre inhabituel de voitures en stationnement dans les quartiers, les queues plus longues chez le boucher, le mouvement incessant de va et vient chez le boulanger pour s'approvisionner en viennoiseries à cinquante centimes et pains en grandes quantités. Donc pour faire bonne figure, tout le monde gère et déclare : Ici vous êtes chez vous. Oui, mais le problème dans cette histoire, c'est que la réciprocité n'est pas évidente. Et si c'était chez eux ?