Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-MaghribLes Marocains s'endettent de plus en plus, mais deviennent plus solvables. Pour preuve, l'évolution de 32,6% des crédits aux ménages ces deux dernières années. Les Marocains continuent à s'endetter. C'est ce que révèle le dernier rapport annuel de Bank Al-Maghrib (BAM), diffusé le mardi 10 juillet, sur le contrôle, l'activité et les résultats des établissements de crédit pour l'exercice 2006. Ainsi, c'est pour un montant de 116 milliards de dirhams que la banque centrale a estimé l'encours des crédits aux ménages à fin 2006. Ce chiffre traduit une hausse de 32,6% par rapport à 2004, et, dans un contexte global, il représente 33% de l'encours global des crédits à l'économie. Dans cette sphère, les crédits à l'habitat sont les premiers à booster la dynamique de l'endettement. Ce tonus est reproduit par la progression de l'encours des prêts immobiliers de 26% contre 15% en 2004. Ce qui fait un total de 66,5 milliards de dirhams. Quant à l'encours des crédits à la promotion immobilière, il s'est hissé à 6,5 milliards de dirhams, en croissance de 55% d'une année à l'autre. Cet engouement pour ce type d'endettement est dû à la souplesse accordée par les banques sur les conditions d'octroi de prêts par la baisse des taux et l'allongement des durées de prêts, sans oublier le développement des prêts à taux variable (42% contre 36% en 2005). Par ailleurs, qui dit emprunt, dit automatiquement risque et créances en souffrance. Or, le coût du risque a continué à reculer. Ce qui est un bon signe, selon les professionnels. Le taux des créances en souffrance en 2005 a été de 8% au lieu de 10%, selon toujours le même rapport. Le niveau des créances en souffrance a ainsi marqué une sensible baisse pour atteindre 35,6 milliards de dirhams, soit une baisse annuelle moyenne de 14%. Ce qui montre que les Marocains sont de plus en plus solvables. Dans cette spirale de l'endettement croissant, BAM redoute, toutefois, certains effets qui découleraient de l'emphase des prix d'actifs immobiliers et d'une éventuelle hausse des taux d'intérêt. C'est pourquoi, l'institution recommande que «les établissements de crédit mènent une politique vigilante pour préserver leur équilibre financier et pouvoir en assumer les pertes». Pour sa part, le crédit à la consommation a aussi tiré profit de la conjoncture en 2006. Avec des encours de 43,5 milliards de dirhams, le crédit à la consommation a augmenté de 20 % comparé à 2005. À savoir que 65% du nombre total des dossiers de prêt traités étaient polarisés par les ménages à revenu inférieur à 4.000 dirhams, et que le taux d'endettement s'est largement accru pour les revenus inférieurs à 3.000 dirhams soit un passage de 35% en 2004 à 40% en 2006. PME : Client à haut risque A propos de risque, ce rapport soulève la question du risque dans le financement des PME par les établissements de crédit. Etant souvent qualifiées de « client à haut risque », elles doivent cette étiquette à la faiblesse de la gouvernance, la sous-capitalisation et la rentabilité insuffisante. Malgré cela, ce segment de clientèle a pu bénéficier d'un plus grand soutien du système financier. En atteste la progression de 43% de l'encours des crédits accordés aux PME, contre 16% une année auparavant. De plus, les PME ont réussi à puiser leurs avantages dans la montée en puissance du secteur du crédit-bail. Les sociétés de crédit-bail, ayant pour clients essentiels les PME, ont multiplié par environ 2,5 fois leur encours de crédit depuis l'an 2000.