es activistes présumés d'Al Qaïda ont fait exploser deux minarets de la Mosquée d'Or de Samarra, haut lieu du chiisme déjà endommagé en février 2006 par un attentat qui avait entraîné un déchaînement meurtrier de violences confessionnelles en Irak. Craignant un nouveau cycle de violences intercommunautaires - celui de l'an dernier avait fait des dizaines de milliers de morts - le gouvernement irakien a imposé un couvre-feu illimité à Bagdad. Les responsables des communautés chiites et sunnites ont pour leur part lancé des appels au calme. L'atmosphère était lourde dans la capitale à l'approche du début du couvre-feu. Selon la police, des activistes ont incendié une mosquée sunnite du quartier de Bayaa, dans le sud-ouest de Bagdad. Dans un communiqué commun, le chef des forces américaines en Irak, le général David Petr aeus, et l'ambassadeur des Etats-Unis, Ryan Crocker, ont exhorté les Irakiens à rejeter l'appel à la violence. "Cette acte brutal contre un des lieux les plus sacrés d'Irak est une tentative délibérée d'Al Qaïda pour semer la discorde et exacerber les tensions communautaires au sein de la population irakienne", peut-on lire dans le communiqué. Tony Snow, porte-parole de la Maison blanche, a également vu l'ombre d'Al Qaïda sur cet attentat mais jugé qu'il était trop tôt pour dire avec certitude qui en était le responsable. MISSILES ? Quelques heures après l'attentat, lors d'un discours à la nation, le Premier ministre Nouri al Maliki a également attribué l'attentat à la nébuleuse islamiste. Il a ajouté qu'il avait ordonné l'arrestation du personnel de sécurité affecté à la garde de la mosquée, qui était fermée depuis l'attentat du 22 février 2006 qui avait détruit son célèbre dôme doré. Al Qaïda a réalisé des dizaines d'attentats en Irak depuis le début de l'intervention américano-britannique il y a quatre ans, le but étant de faire basculer dans la guerre civile la majorité chiite et la minorité sunnite, qui était au pouvoir sous Saddam Hussein. Ce nouvel attentat intervient au moment où les Occidentaux font de plus en plus pression sur Maliki pour qu'il inclue davantage les sunnites dans le processus politique afin, espèrent-ils, d'isoler la rébellion. Mais les progrès sont très limités, tandis que sur le terrain, la vaste offensive menée à Bagdad contre l'insurrection semble s'essouffler. On ne signalait aucun blessé dans l'attaque de mercredi contre la mosquée de Samarra, dont les circonstances demeuraient floues. Ali Al Dabbagh, porte-parole du gouvernement irakien, a affirmé que les minarets av aient été la cible de missiles. Mais l'armée américaine, sur la foi de témoignages recueillis auprès de policiers irakiens à Samarra, a dit qu'il s'agissait vraisemblablement d'une double explosion coordonnée et qui semblait provenir de l'intérieur de la mosquée. SADR APPELLE AU CALME Le grand ayatollah Ali Sistani, guide spirituel de la communauté chiite, a fait savoir qu'il condamnait l'attaque et a exhorté ses fidèles à ne pas se livrer à des représailles. Il avait lancé un appel similaire après l'attentat de février 2006. Mais celui-ci n'avait pas empêché les miliciens chiites d'attaquer les sunnites, déclenchant un cycle meurtrier de violences confessionnelles. Cet attentat avait été un tournant dans la guerre en Irak en mettant à jour les tensions très vives entre chiites et sunnites. Avant ce mercredi, Bagdad avait plusieurs fois estimé qu'un attentat similaire pourrait déclencher une guerre civile totale entre les deux communautés. Mahmoud Ahmadinejad, président de l'Iran voisin, majoritairement chiite, a condamné lui aussi l'attentat, pour lequel il a semblé mettre en cause les forces américaines. Le vice-président irakien, Tarek al Hachemi, un sunnite, a jugé quant à lui qu'il visait clairement à déclencher un nouveau cycle de violences. Le mouvement de l'imam radical chiite Moktada Sadr a lancé un appel au calme à ses partisans. Après l'attentat de 2006, des activistes de l'armée du Mehdi, fidèles à Sadr, avaient en représailles attaqué à Bagdad des membres de la communauté sunnite. Il a néanmoins annoncé qu'il suspendait sa participation au parlement. Sadr avait déjà retiré en avril ses six ministres du gouvernement de coalition de Maliki. La Mosqu ée d'Or de Samarra est l'un des quatre principaux sanctuaires chiites en Irak. Samarra, située en nord de Bagdad, est néanmoins une ville à dominante sunnite. Les autres sanctuaires importants du chiisme se trouvent dans les villes saintes chiites de Nadjaf et de Kerbala ainsi que dans le quartier de Kadhimiya à Bagdad, à dominante chiite. Après l'attentat de 2006, le sanctuaire de Samarra n'a pas été reconstruit, en partie en raison de désaccords entre chiites et sunnites sur la manière de procéder.