Alors que la communauté internationale n'en finit pas d'étaler son impuissance à faire cesser le drame du Darfour (ouest du Soudan), où 200 000 personnes sont mortes depuis 2003, la France de Nicolas Sarkozy affiche un volontarisme renouvelé. Au cours du sommet du G8 en Allemagne, le président de la République a annoncé, jeudi 7 juin, qu'une conférence internationale aura lieu à Paris, le 25 juin, tandis que le ministre des affaires étrangères, Bernard Kouchner, s'envolait pour l'Afrique. L'initiative française n'exclut cependant pas la perspective de sanctions contre Khartoum, qui fait obstacle au déploiement de la force de paix "hybride" associant des casques bleus de l'ONU aux soldats de l'Union africaine (UA) déjà présents. "Si le gouvernement (soudanais) devait s'opposer soit à un règlement humanitaire, soit à un règlement politique, la communauté internationale serait fondée à proposer des sanctions", a affirmé M. Sarkozy, pour qui la France a "une position proche" de celle des Etats-Unis à ce sujet. Cette mise en avant d'un règlement politique tranche avec l'idée d'un "corridor humanitaire" prôné par Bernard Kouchner jusqu'à son abandon, ces derniers jours. Critiqué par les organisations humanitaires à cause du risque de confusion avec une intervention militaire, le projet de corridor aérien n'a pas reçu le soutien de l'Elysée. En revanche, l'idée de réunir à Paris les ministres des affaires étrangères des pays du "groupe de contact" existant sur le Darfour en l'élargissant à la Chine, qui s'oppose aux pressions sur Khartoum, et à des pays comme l'Afrique du Sud et l'Egypte, a recueilli des échos favorables des milieux humanitaires. Reste à la faire inscrire sur l'agenda de tous les partenaires. La tournée africaine que vient d'entreprendre M. Kouchner "à la demande" du président de la République, selon ce dernier, vise précisément à "donner à la France un rôle d'impulsion" et à afficher le Darfour comme "une priorité du ministre", explique-t-on au Quai d'Orsay. Après une étape à Bamako (Mali), jeudi et vendredi, à l'occasion de l'investiture du président Amadou Toumani Touré, réélu en mai, le chef de la diplomatie française doit rencontrer Idriss Déby, le président du Tchad, dimanche à N'Djamena, avant de se rendre, lundi, à Khartoum (Soudan). Il s'agit pour le ministre de "dialoguer avec les responsables des différents pays concernés par le Darfour dans le cadre de la recherche d'une solution globale, politique, sécuritaire et humanitaire". Auparavant, M. Kouchner devait visiter des camps de réfugiés du Darfour et de déplacés tchadiens, samedi, dans la région de Goz Beida, dans l'est du Tchad. Vendredi, Médecins sans frontières (MSF) a précisément sonné l'alarme à propos de la situation des 150 000 Tchadiens contraints de fuir les attaques meurtrières qui ont débordé depuis plus d'un an sur le territoire tchadien. MSF dénonce les entraves opposées par les autorités de N'Djamena à un déploiement humanitaire. La "démarche française" pour le Darfour intervient peu après le renforcement, par les Etats-Unis, de leurs sanctions commerciales contre le Soudan et au moment où l'ONU accroît sa pression sur ce pays. Jeudi, à New York, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo, a appelé le Conseil de sécurité de l'ONU à obtenir de Khartoum l'arrestation des deux personnes inculpées de crimes de guerre au Darfour, parmi lesquels l'actuel secrétaire d'Etat soudanais chargé des affaires humanitaires.