Tzipi Livni, numéro 2 du gouvernement, appelle Ehud Olmert à démissionner. Les couteaux sont sortis. Ehud Olmert est désormais lâché par sa garde rapprochée. Hier, Tzipi Livni, la ministre israélienne des Affaires étrangères, a demandé la démission de son Premier ministre, gravement mis en cause, par un rapport publié lundi, dans sa gestion catastrophique de la guerre du Liban de l'été dernier. Le sort d'Olmert, dont la popularité était déjà au plus bas, ne semble plus tenir qu'à un fil. Tzipi Livni, qui l'a rencontré hier, a déclaré à sa sortie : «Je lui ai dit que la démission était la bonne mesure à prendre.» Ajoutant dans la foulée qu'elle se portait candidate à la direction de leur parti centriste, Kadima. Tzipi Livni, épargnée par le rapport Winograd, a décidé de tenter un coup de force pour éviter des élections, souhaitées par une majorité d'Israéliens, qui verraient une victoire du Likoud, son rival de droite. A 48 ans, cette juriste, ancienne du Mossad, est souvent présentée comme l'héritière d'Ariel Sharon, l'ancien Premier ministre fondateur de Kadima, plongé dans le coma depuis seize mois. Issue de l'extrême droite nationaliste, Livni s'est convertie aux côtés du vieux général à un pragmatisme musclé et a soigné sa stature internationale en multipliant les rencontres avec Condoleezza Rice et les responsables palestiniens. Fragile coalition. Autre coup dur pour Olmert, Avigdor Itzchaky, le chef du groupe parlementaire de Kadima, a annoncé hier qu'il quittait son poste pour protester contre son refus de démissionner. Toute la journée, le ministre de la Défense, Amir Peretz, a été donné partant par les médias israéliens. Peretz, un ancien leader syndical inexpérimenté en matière militaire, a été particulièrement épinglé par la commission Winograd pour avoir suivi aveuglément les conseils du chef d'état-major et ne pas avoir veillé à l'état de préparation de l'armée. Le départ de Peretz mettrait à mal la fragile et hétéroclite coalition au pouvoir, qui regroupe, autour de Kadima, des travaillistes, des ultrareligieux et des ultranationalistes. Malgré les départs, malgré les appels à démissionner et malgré les sondages, selon lesquels de 65 à 68 % des Israéliens souhaitent son départ, Olmert s'accroche. «Je ne suis pas dans la position la plus confortable, mais j'ai plus de 60 ans et j'en ai vu d'autres dans ma vie, et j'ai appris à ne pas me dérober face à mes responsabilités» , a-t-il affirmé devant les députés de son parti, qui lui resteraient fidèles... pour l'instant. Tal Zilberstein, son conseiller politique, a contre-attaqué en demandant à Tzipi Livni de «partir» , ce qu'elle n'a pas l'intention de faire. Discrétion. Olmert, encore soutenu lundi par George W. Bush, qui l'a jugé «essentiel» aux efforts de paix dans le conflit avec les Palestiniens, avance pour sa défense que l'entrée en guerre, suite à l'enlèvement, le 12 juillet 2006, de deux soldats par le Hezbollah libanais, avait été ratifiée par l'ensemble du gouvernement et de la classe politique. En effet, 110 députés sur 120 avaient voté en faveur de la guerre, seuls les élus arabes ayant voté contre. Même Benyamin Netanyahou, le chef du Likoud donné aujourd'hui favori dans les sondages pour succéder à Olmert, avait appuyé à fond la décision d'entrer en guerre. D'où sa relative discrétion ces derniers jours. D'autant qu'il sait que le temps joue pour lui. Mais ce n'est pas tant la guerre que sa conduite que conteste le rapport Winograd, notamment l'absence de buts clairement identifiés. Résultat : les deux soldats enlevés n'ont pas été récupérés, le Hezbollah a pu tirer 4 000 roquettes sur Israël et l'armée a subi de lourdes pertes lors d'une offensive terrestre lancée trop tardivement et mal préparée. Aujourd'hui, le Parlement israélien doit se réunir en session extraordinaire : le Premier ministre en saura plus sur l'état du rapport des forces en sa faveur. Le soir, une grande manifestation est prévue à Tel Aviv, pour demander sa démission.