Incidents au coeur du troisième lieu saint de l'islam: des centaines de policiers israéliens ont investi vendredi, jour de la grande prière des musulmans, l'Esplanade des Mosquées à Jérusalem pour disperser les milliers de fidèles qui protestaient violemment contre des travaux effectués par l'Etat hébreu près de ce site sacré. Les heurts, qui ont éclaté en milieu de journée peu après la prière du vendredi, ont fait 36 blessés -17 manifestants et 19 policiers- mais aucun ne souffrait de blessures graves, a précisé Micky Rosenfeld, porte-parole de la police. Il y a eu en outre 17 interpellations. Ces incidents violents et les images de policiers israéliens chargeant des manifestants sur le lieu saint musulman faisaient craindre une possible extension des protestations à la Cisjordanie et la Bande de Gaza, comme cela avait été le cas en 2000 après une visite controversée d'Ariel Sharon, qui avait marqué le début de la deuxième Intifada. Vendredi, quelque 200 policiers israéliens ont fait irruption sur l'Esplanade des Mosquées -dénommée Mont du Temple par les juifs- pour disperser à coups de grenades lacrymogènes et assourdissantes des milliers de manifestants musulmans qui lançaient des pierres, des bouteilles et des ordures en ce vendredi, selon M. Rosenfeld. Les fidèles musulmans protestent depuis plusieurs jours contre des travaux de rénovation entamés cette semaine par les Israéliens sur une rampe d'accès à l'Esplanade, endommagée selon eux lors d'une tempête de neige en 2004. Ces travaux ont suscité un vif émoi au sein des Palestiniens et dans le monde arabe, qui accusent l'Etat hébreu de vouloir porter atteinte à ce lieu saint, malgré ses protestations du contraire. Peu après l'intervention de la police israélienne, on pouvait voir de la fumée noire s'élever de l'Esplanade et entendre le bruit des grenades assourdissantes. Un médecin palestinien ayant traité des blessés, le Dr Khalil el-Baba, a affirmé que des policiers avaient fait usage de balles en caoutchouc contre des manifestants, mais les autorités israéliennes ont démenti. Pendant que les policiers en tenue anti-émeute, visière baissée, dispersaient manu militari les manifestants sur le lieu saint musulman, des fidèles juifs, cette fois, étaient évacués par précaution des abords du mur des Lamentations (Mur occidental, principal lieu saint du judaïsme), situé en contrebas de l'Esplanade des Mosquées, par crainte des jets de pierres. La situation est devenue particulièrement tendue lorsque 150 manifestants se sont retranchés à l'intérieur de la mosquée d'Al-Aqsa, située sur l'Esplanade. Les policiers n'ont pas pénétré dans l'édifice religieux mais, après des négociations entre représentants policiers et musulmans, les fidèles ont pu quitter la mosquée, une heure et demie plus tard, sans être inquiétés par les forces israéliennes. Les incidents se sont ensuite propagés aux ruelles de la Vieille ville de Jérusalem, jusqu'aux toits des maisons enchevêtrées, où policiers et manifestants ont joué au chat et à la souris durant plusieurs heures. "Rien ne peut justifier ce qu'ils ont fait aujourd'hui, et nous pensons que cela a été orchestré pour instiller la peur dans l'esprit des fidèles mécontents des travaux israéliens", a déploré Adnan Husseini, président du Waqf, l'office des biens religieux musulmans. "C'est une agression contre (l'Esplanade des) mosquées", a renchéri Mohammed Hussein, le grand mufti de Jérusalem, interrogé par téléphone alors qu'il se trouvait sur l'Esplanade. "Je ne sais pas quel impact cette agression aura sur les Territoires palestiniens, mais l'expérience passée a montré que chaque fois qu'il y a eu des affrontements sur l'Esplanade, cela a enflammé les autres parties de la Cisjordanie et Gaza." A l'appel d'organisations islamistes, des manifestations ont également eu lieu au Caire -émaillées d'incidents-, ainsi qu'au Liban et en Jordanie.