Mountassir Hamada, auteur de «De la critique du réseau d'Al Quaïda», aux éditions du centre de Recherches et d'Etudes d'Al Jazeera, en 2010 et de «Salafia al-Wahabiya au Maroc», en janvier 2012 aux éditions Toubkal, explique que le salafisme au Maghreb en général, avec les révolutions arabes, et au Maroc en particulier, tend à renoncer au jihad. Quel effet a eu le printemps arabe sur les mouvements salafistes ? Depuis janvier 2011, le Printemps arabe, pour moi, c'est un printemps islamiste. Frères musulmans et salafi ont gagné la majorité des sièges au Parlement, en Egypte. En Tunisie, le parti islamiste Ennahda a également remporté les élections, comme le PJD au Maroc. Cette montée des partis islamistes n'est pas synonyme de jihad. Les mouvements salafi sont entrés dans une «aire de révision» où ils renoncent au jihad et à la violence. La Libye est, elle, dans une situation plus particulière, où tout peut encore arriver. Au Maroc, dans le contexte des révolutions arabes, le 14 avril, 96 prisonniers politiques dont des salafistes Salafia jihadia, impliqués dans les attentats de Casablanca de 2003, ont été graciés. Que deviennent les salafistes marocains, aujourd'hui ? Ils connaissent le même mouvement de réforme que les autres mouvements salafi du Maghreb. Aujourd'hui, ils sont contre le jihad au Maroc, contrairement à ce qu'ils disaient avant le 16 mai 2003, mais restent divisés sur sa légitimité en Europe et aux Etats Unis. Hassan Khattab fait parti des prisonniers et des détenus salafistes libérés et a annoncé dans une lettre au roi sa volonté de renoncer au jihad. Mohamed Fizazi [qui a annoncé à Yabiladi sa volonté de créer un parti salafiste] en a fait autant. Omar Haddouchi, Hassan Kettani, Abou Hafs font également parti des salafistes libérés le 14 avril à participer à cette «rénovation». Avant eux, d'autres salafistes marocains avaient aussi condamné le jihad, dans les pays musulmans, du moins. Ali Aallam avait condamné les actions d'Al Quaïda dans les pays musulmans et Mohamed Ben Abderrahmane El Maghraoui, salafiste traditionnel, est contre le jihad depuis toujours. Les mouvements salafistes, en Europe, connaissent-ils les mêmes évolutions ? A l'étranger, on ne peut pas contrôler ces mouvements salafi jihadistes. Ils appartiennent à des réseaux que l'on ne connait pas, mais on peut dire qu'il existe, sinon des réseaux, du moins des individus qui s'en réclament quand on voit, comme moi, récemment, un salafi belge appelé au jihad dans une vidéo sur internet. Une chose est sure, la voix des représentants officiels des musulmans en France, comme le CFCM est trop faible, leur influence est minime.