Le dossier du Hirak continue de diviser les institutions de l'Etat marocain. Si en 2017, le premier acte avait opposé la DGSN et le CNDH, le deuxième a connu l'entrée en jeu de la DGAPR qui s'en est pris violemment aux observations du même CNDH sur des incidents de la prison Ras El Ma à Fès. Le torchon brûle entre le Conseil national des droits de l'Homme et la Délégation générale de l'administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR). Et c'est par voie de communiqué de presse que les services de Mohamed Saleh Tamek ont répondu, mercredi soir, à la publication des conclusions des visites effectuées par des membres du CNDH. Des visites qui interviennent «suite aux mesures disciplinaires à l'encontre de certains détenus de la prison de Ras El Ma». La Délégation reproche, dans un premier temps, au CNDH d'avoir uniquement observé «quelques ecchymoses» qui ont résulté sur le corps de deux prisonniers suite à des «altercations» avec les fonctionnaires et constaté la «prescription d'un arrêt de travail pour les agents». Très remontée contre ces observations, la DGAPR n'a pas hésité à accuser le Conseil d'Amina Bouayach de défendre les détenus aux dépens de ses agents «ayant reçu d'établissements hospitaliers publics des attestations médicales légales attestant du niveau de violence qu'ils ont subi de la part des détenus concernés». Comme un air de déjà vu La DGAPR a affirmé que la délégation du CNDH dépêchée à la prison de Ras El Ma «n'a mené aucune investigation pour s'assurer de l'étendue des dommages subies par ces fonctionnaires». L'établissement a estimé que le travail accompli par le CNDH dénote «un mépris incompréhensible pour le droit du personnel à être pris en considération et à sa protection». La DGAPR n'a pas apprécié que le Conseil qualifie d'«altercations» le face-à-face entre les détenus et ses fonctionnaires et concerne cela comme «totalement faux». «Cela concerne des prisonniers qui doivent légalement exécuter les ordres émanant de fonctionnaires qui représentent l'autorité de la direction de l'établissement», écrit-elle. Pour les services de Tamek, les incidents se sont produits dans «une institution de sécurité où les règles de discipline doivent être respectées». «Il s'agit d'une sédition, d'une désobéissance et d'une agression du personnel (…) Ce sont de graves violations menaçant la sécurité de l'établissement et la sécurité de ses pensionnaires et employés», souligne-t-on. Ce face-à-face entre le DGAPR et le CNDH, deux organismes étatiques censés jouer la même partition, a une nouvelle fois mis en exergue les divergences des officiels sur le dossier du Hirak. Il n'est pas sans rappeler le grand couac de juillet 2017 entre la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) et le CNDH dirigé alors par le tandem Driss El Yazami- Mohammed Sebbar au sujet d'un rapport dont des extraits avaient fuité à la presse sur la torture qu'aurait subie Nasser Zefzafi.