Annoncée par le premier ministre Edouard Philippe ce lundi, la «Stratégie d'attractivité pour les étudiants internationaux» ne passera pas sans frapper de plein fouet des milliers d'étudiants marocains souhaitant se rendre en France l'année prochaine. Les frais de scolarité dès la licence devraient passer de 170 euros à 2 770 euros l'année. La «Stratégie d'attractivité pour les étudiants internationaux» est un nouveau plan annoncé ce lundi 19 novembre par le premier ministre français, Edouard Philippe. Lors des Rencontres universitaires de la francophonie, le chef de l'exécutif en a profité pour dévoiler ce plan visant, selon lui, à augmenter le nombre d'étudiants étrangers en France. Le 20 mars dernier, le président français Emmanuel Macron, a annoncé lors de son discours sur la langue française et la francophonie que «la France devra accroître le nombre d'étudiants étrangers sur son territoire et le nombre de ceux qui viennent des pays émergents doublera». Et d'ajouter, s'il fallait être plus clair : «Etudiants indiens, russes, chinois seront plus nombreux et devront l'être», rapporte Le Monde. Mais en réalité, ce nouveau plan qui se veut une stratégie visant à augmenter le nombre d'étudiants étrangers en France, ne manquera pas d'impacter des centaines de milliers d'étudiants étrangères venant d'ailleurs et notamment de l'Afrique, le continent le plus présent dans les universités françaises. Les Marocains en tête des étudiants étrangers Selon Campus France, six pays africains sont dans la liste des dix qui envoient le plus d'étudiants en France dont le Maroc. D'ailleurs, rien que l'année dernière, la France a accueilli 39 855 étudiants marocains pour l'année universitaire 2017-2018, occupant ainsi la première place. «Plus globalement, 45 % des étudiants étrangers présents en France sont originaires du continent», indique Campus France. Un chiffre qui risque de baisser en cas d'augmentation des frais d'inscription annoncée dès la rentrée prochaine. Ainsi, le droit d'étudier passe de 170 euros à 2 770 euros en licence. En master, les étudiants doivent payer près de 3 770 euros contre 243 euros actuellement alors que les frais de scolarité pour le doctorat passent aussi de 380 euros à 3 770 euros. «C'est toujours moins du tiers du coût réel de la formation, explique-t-on, mais c'est néanmoins assez dissuasif pour les moins fortunés», commente Le Monde. Au sein de la communauté des étudiants marocains, cette nouvelle crée déjà la polémique. Sur les groupes Facebook des étudiants marocains de France, certains se posent encore la question si cette nouvelle mesure concernera les Marocains déjà établis en France. Les étudiants déjà établis en France pas concernés D'autres ne manquent pas d'ironiser quant à la nouvelle stratégie annoncée par le premier ministre Français. Youssef El Malki, Marocain établi dans l'Hexagone et qui gère une page destinée à faciliter les démarches pour les futurs étudiants marocains en France sur Facebook, évoque une «mauvaise nouvelle qui impactera les étudiants africains en général». «Cela nous a choqué, d'autant qu'il n'y avait pas de circulaire qui évoque ce nouveau plan», poursuit-il. Notre interlocuteur fustige les soutiens de cette stratégie, arguant qu'elle a été instaurée pour «répondre à ceux qui critiquaient le fait que les étudiants étrangers hors UE payaient les mêmes montants que les étudiants français et européens». «Dans les réseaux des étudiants marocains en France, on parle de certains cas exceptionnels et le fait qu'un élève sur 4 sera exonéré de ces frais et aura une bourse, mais pour cela, il y a des conditions et ils seront comptés sur les bouts du doigts», enchaîne-t-il. «Mine de rien, 2 770 euros, autant faire une école privée à 3 000 ou 4 000 euros. Mais 2 770 euros pour une licence, c'est aberrant et inacceptable pour un étudiant étranger qui n'a pas les moyens», conclut-il en notant que les étudiants étrangers en France «ne resteront pas les bras croisés». Et ils expriment déjà leur mécontentement. Joint par Yabiladi ce lundi, Kaoutar, une étudiante marocaine en France considère que «cette augmentation risque de limiter les places accordées aux étrangers». «On dirait que la France, qui ne peut pas refuser des dossiers, a trouvé une solution», s'insurge-t-elle. «C'est aberrant et une pression outrancière vis-à-vis des étudiants étrangers, pour qui la France est un ultime recours», ajoute Zineb Agzit, également étudiante marocaine qui poursuit ses études en France. «C'est une politique de renfermement prônée par le nouveau gouvernement mais c'est vraiment défavorable à son image en tant que hub scientifique», lâche-t-elle. «Il y a aussi un cliché avancé par Edouard Philippe selon lequel les étudiants qui viennent en France sont aisés. Ce n'est pas vrai parce que je suis issue d'une classe moyenne, et tous les étudiants marocains ne bénéficient pas de bourse non plus.» Zineb, étudiante marocaine en France Mais une chose est sûre : seuls les étudiants inscrits pour la première fois dans l'enseignement public français devront s'acquitter des nouveaux frais de scolarisation, à compter de la prochaine rentrée. «Les étudiants internationaux qui ne sont pas ressortissants d'un pays de l'Espace économique européen ou de la Suisse et qui s'inscrivent pour la première fois dans un cycle supérieur de formation en France seront amenés à acquitter des frais d'inscription différenciés, qui apporteront plus d'équité», indique-t-on dans la présentation de la stratégie. L'augmentation des frais de scolarité en France ne manquera pas de décourager une partie des étudiants Marocains, la France étant jusque-là choisi notamment pour les frais de scolarité relativement plus bas que ceux du Canada, de l'Espagne ou encore de la Grande-Bretagne…