Ce mercredi, l'examen du dossier impliquant l'historien Maâti Monjib et le journaliste Hicham Mansouri, entre autres, a été reporté au 30 janvier 2019. Le comité de soutien aux militants poursuivis pointe du doigt les «motivations politiques» derrière un procès qui dure depuis 2014. A sa treizième audience en première instance, l'examen du dossier impliquant l'historien Maâti Monjib qui a été à la tête du Centre Ibn Rochd d'études et de communication, le journaliste Hicham Mansouri, ainsi que le président de l'Association des droits numériques (ADN), Hicham Almiraat, a été repoussé au 30 janvier 2019. Les trois hommes font partie d'un groupe de sept journalistes et acteurs de la société civile, poursuivis pour «atteinte à la sécurité de l'Etat» ainsi que pour la non-notification d'un financement étranger réceptionné par l'Association marocaine pour le journalisme d'investigation (AMJI), dont Hicham Mansouri a été le chargé de projet. Le comité de soutien explique que le Parquet reproche aux journalistes et militants l'organisation de formations sur Story Maker, une application gratuite largement utilisée par les journalistes citoyens, ainsi que leurs enquêtes sur la cybersurveillance au Maroc. Dans le cadre de la mobilisation du comité, une conférence de presse s'est d'ailleurs tenue ce matin, au siège de l'Association marocain des droits humains (AMDH) à Rabat. Dans l'après-midi, un sit-in a eu lieu devant le tribunal de première instance, parallèlement à l'audience qui a finalement été repoussée. Un procès politique Président de l'AMDH, Ahmed El Haij indique à Yabiladi que pour certains prévenus dans le cadre de ce dossier, l'instruction dure depuis 2014 mais n'avance pas. C'est le cas pour Hicham Mansouri, arrêté une première fois cette année-là et désormais installé en France. Dans ce sens, l'une des raisons avancées par le Parquet pour reporter les audiences est que tous les concernés ne font pas acte de présence. Mais pour le militant, «cet argument n'est pas valable, puisque si la justice voulait avancer dans cette affaire, elle aurait pu recourir à d'autres procédures ne nécessitant pas la présence impérative de toutes les personnes poursuivies, d'autant plus que deux parmi elles sont désormais à l'étranger», à savoir Hicham Mansouri et le président d'ADN. C'est ce qui mène Ahmed El Haij à s'interroger sur «les motivations et les objectifs politiques derrière ces retards, traduisant une volonté de resserrer l'étau sur des journalistes et des défenseurs des droits humains». Le président de l'AMDH parle également de ce procès comme étant «une épée de Damoclès pour avoir les prévenus à l'usure, parallèlement aux campagnes de diffamation publique à l'encontre de l'historien Maâti Monjib». Pour lui, il s'agit encore d'«un élément de pression gardant ces personnes dans une situation où ils peuvent être arrêtés à tout moment». Une mobilisation internationale Autre point de discorde, le comité de soutien reproche au Parquet de ne pas être à l'écoute des avocats de la défense. «Si c'était le cas, l'affaire n'aurait pas trainé pendant toutes ces années», nous explique Ahmed El Haij, soulignant que les avocats soulignent l'incompatibilité de ce procès avec les principes d'une justice indépendante. «C'est une image négative que l'on donne de notre pays et du degré d'indépendance de la justice marocaine, d'autant plus que cette affaire est suivie de près depuis le début par la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) et Reporters sans frontières (RSF). Le rapporteur spécial de l'ONU sur l'indépendance des juges et des avocats est également attendu au Maroc. Nous espérons que sa présence contribuera à changer le cours de ce dossier.» Ahmed El Haij, président de l'AMDH Dans le rapport de RSF pour l'année 2018, le Maroc a d'ailleurs été épinglé, notamment pour la poursuite de journalistes. Dans le classement mondial, le royaume a occupé la 135e place, reculant ainsi de deux places par rapport à 2017. Son score global s'est établi à 42,42 points, enregistrant une régression due aux entraves à la presse nationale, mais également à la presse internationale ayant couvert les manifestations dans le Rif. Dans ses notes d'information, RSF a également appelé à plusieurs reprises à l'abandon des charges contres les journalistes poursuivis dans le cadre de ce dossier.