L'information selon laquelle des traversées gratuites sont proposées s'est propagée comme une trainée de poudre sur les réseaux sociaux. Mais plusieurs associations et experts alertent sur la prolifération de fake news, car, la traversée ne serait pas donnée. Alors que le prix peut attendre les 3 000 euros, l'immigration clandestine vers l'Espagne connaît un phénomène nouveau ; celui des «traversées gratuites». En effet, depuis quelques semaines, plusieurs personnes affirment sur les réseaux sociaux qu'il est désormais possible de rejoindre l'Espagne gratuitement. L'information s'est vite propagée après une vidéo datant d'il y a deux semaines. On y voit une embarcation rapide sur les côtes marocaines, proposant aux passants de monter à bord pour regagner le royaume ibérique. Sous l'emprise de narcotrafiquants ? Les embarcations proposant ces services ne sont pas celles utilisées conventionnellement pour la traversée clandestine, précise Fouad Acharf, de l'Association Pateras por la Vida (Embarcation pour la vie) au site El Confidencial. Il s'agit d'«un Phantom [une marque de hors-bord] de 150 000 euros, généralement utilisé pour le trafic de drogue, avec trois moteurs de 500 chevaux chacun». Par conséquent, les experts ont du mal à croire qu'aucune contrepartie ne soit demandée. Pour Fouad Achraf, ces jeunes migrants «pourraient être exploités pour le trafic de drogue jusqu'à ce qu'ils paient la totalité de leur dette du voyage». Par ailleurs, selon l'Association marocaine des droits humains (AMDH) contactée par El Confidencial, les narcotrafiquant «avaient besoin de plus de gens à bord, afin d'équilibrer l'embarcation qui contenait une très grande quantité de marchandise». Selon Fouad Achraf, cet épisode a été l'élément déclencheur d'une avalanche de fake news, précise-t-il. Fake news, car selon plusieurs militants et experts, «la traversée n'est jamais gratuite». «L'apogée du Printemps arabe au Maroc» Selon Pateras por la Vida, inconsciemment ce sont «les migrants eux-mêmes qui diffusaient ces fake news». Cependant, plusieurs facteurs sont à prendre en compte selon les experts. Chama Darchoul, experte en analyse des médias et réseaux sociaux, affirme que ces fausses informations «sont publiées par des opposant et des militants qui aspirent à créer un Etat islamique ou par d'autres qui rêvent d'un république marocaine libre et sont déçus par les fausses promesses du Printemps arabe». Ces deux profils «visent à détruire le Maroc, à le rendre instable et à créer une situation catastrophique pour tenter de détruire ce système et en construire un nouveau», enchaîne-t-elle. Dans ce sens, les réseaux sociaux sont devenu «le seul moyen pour eux d'exprimer leur mécontentement afin d'attirer l'attention», conclût la spécialiste. Cette théorie est défendue en partie par Mohammed Benaïssa, président de l'Observatoire du nord pour les droits de l'Homme (ONDH). Il estime que la prolifération de ces discours sur les réseaux sociaux constitue l'apogée du Printemps arabe au Maroc. De plus, selon lui, «les gens ont cessé d'espérer un changement dans le pays». Par conséquent, «ils ont l'intention de modifier l'ordre établi, créant le changement à travers les réseaux sociaux». Toujours plus de «candidats» L'annonce de ces traversées qui seraient sans contrepartie a conduit des centaines de Marocains à franchir le pas. Pour rappel, dans la nuit du mardi à mercredi, une étudiante universitaire âgée de ving ans a succombé à ses blessures, après une fusillade ayant mis en échec son périple. Elle faisait partie des 25 passagers d'une embarcation de type «Go fast», qui a tenté de conduire des jeunes de la régions vers l'Espagne. Dans le temps, le président de l'ONDH avait affirmé à Yabiladi que contrairement à certaines versions diffusées sur les réseaux sociaux, ce passage aurait été «proposé gratuitement, puisque cette embarcation fait partie de celles qui s'introduisent depuis plusieurs jours dans les côtes du Nord en appelant les passants à les rejoindre pour regagner l'Espagne». Par ailleurs, Karima Layachi, présidente de l'AMDH Fnideq, avait confié à Yabiladi que les jeunes sont de plus en plus tentés par cette traversée, déplorant la vitesse avec laquelle «le phénomène de voir nos nationaux traverser la mer de la sorte s'est répandu». Pour la militante, ces jeunes restent «des victime de l'Etat marocain», la situation actuelle traduisant un «échec collectif à pouvoir leur tendre la main». Dans ce sens, la militante alerte sur la situation des jeunes de la région qui sont «livrés à eux-même», affirmant que En effet, «il ne s'agit pas uniquement que de leur trouver un travail», mais surtout de «ceux qui ne meurent pas en mer meurent de la consommation des drogues ; c'est une réelle problématique sociétale».