Les enclaves espagnoles du nord du Maroc ont vu transiter moins de monde cet été. Cette situation continue d'aggraver le déclin économique des deux villes. Si on y rajoute la concurrence imposée par les grandes villes du nord marocain, ou encore l'évolution démographique qui voit la communauté musulmane de Ceuta et Melilla se renforcer, on peut s'interroger sur l'avenir des présides encore sous souveraineté espagnole. Moins de personnes sont entrées au Maroc en passant par Ceuta et Melilla entre 2010 et 2011. Au 31 juillet 2011, le nombre cumulé de rotation entre Ceuta et le sud de l'Espagne depuis le 1er mai 2011 marquait une légère hausse de 2,7% par rapport à 2010. Il est alors passé de 1329 à 1365. Paradoxalement, les nombres de passagers et de véhicules ont respectivement chuté de 9,3 et 7,4 %. Le constat est presque le même pour la ville de Melilla, où le recul du nombre de rotations cumulées avec le sud de l'Espagne (-2,5%) a été suivi d'un recul des entrées de passagers (-3,2%). Les statistiques de la Protection civile espagnole l'attestent et ce déclin s'affirme depuis plusieurs années. On remarque donc une fréquentation à la baisse pour les deux enclaves espagnoles, qui est susceptible d'avoir des effets néfastes sur l'économie. En effet, qu'il y ait moins de visiteurs (MRE et touristes) suppose moins de recettes touristiques, moins de personnes pour acheter des souvenirs en quittant la ville, moins de taxes récupérées sur les entrées de marchandises, etc… La position du Maroc renforcée Pour ne rien arranger, les enclaves de Ceuta et Melilla ont pâti de la concurrence directe des grandes villes du nord, notamment Tanger et son nouveau port, qui accapare l'essentiel du trafic de passagers et de véhicules sur le Détroit de Gibraltar. Il faut ajouter à cela les grands aménagements socio-économiques réalisés dans le nord du pays, et qui ont rendu Ceuta et Melilla moins attractives. L'ouverture des grandes surfaces Marjane, Aswak Assalam, Acima et d'autres grands magasins dans les principales villes du nord, a donné plus de facilité aux habitants de la région pour leurs achats, détournant du même coup la clientèle des présides tout en diminuant l'attrait vers les produits de contrebande sur le marché local. Conscients du poids économique que représentent les Marocains, les autorités locales de Ceuta et Melilla ont d'ailleurs développé de véritables politiques de séduction pour les attirer (suppression du visa d'entrée, parking gratuit pour les touristes, etc). Mais l'export de produits alimentaires ou manufacturés n'est pas le seul lien économique avec le Maroc. Les enclaves espagnoles sont dépendantes du Maroc pour tout ce qui est produits frais comme on a pu l'observer lors de la campagne de boycott organisé par des ONG marocaines durant l'été 2010. Péril démographique qui devient casse-tête politique Autre inquiétude pour les autorités (espagnoles) des deux présides, la tendance démographique qui risque de voir la communauté d'origine marocaine y jouer un rôle de plus en plus important. Principalement à Melilla, où la moitié de la population est de confession musulmane et d'origine marocaine. On le voit, l'empreinte marocaine se fait plus nette sur les villes de Ceuta et Melilla. L'équation se complique d'avantage avec la réciprocité du droit de vote pour les Marocains (n'ayant pas la citoyenneté espagnole) résidants au sein des présides. Si à court terme, le poids politique des musulmans/marocains résidants dans les enclaves est pris en compte par les leaders politiques de Ceuta et Melilla, l'avenir économique s'annonce délicat pour les deux confettis espagnols en territoire marocain, héritage d'un passé colonial anachronique.