Dans son numéro 18 de ce mois de juillet, la publication espagnole sur la sécurité et la défense, «Atenea» consacre une vingtaine de pages à l'analyse des revendications marocaines autour de Sebta et Melilla. En couverture du magazine sous le titre «Maroc, un voisin difficile», le mensuel s'insurge contre «une lente marche verte» des Marocains vers les enclaves de Sebta et Melilla. Il s'interroge également sur l'avenir socio-économique et politique de ces présides. «Le Royaume du Maroc est devenu un voisin difficile et gênant à cause de ses constantes revendications de Ceuta et Melilla, sans aucune base juridique», écrit Atenea. Cette prise de position d'une publication espagnole n'est pas nouvelle et n'est guère surprenante. Elle devient de plus en plus virulente après les récentes réclamations pour le retour dans le giron marocain, des villes de Sebta et Melilla. Le 17 mai dernier, devant le Parlement, le premier ministre Abbas El Fassi avait appelé à «mettre fin à l'occupation de Sebta et Melilla». La réponse ne s'est faite attendre que deux jours. María Teresa Fernández de la Vega, première vice-présidente du gouvernement espagnol, estimait que «la souveraineté et le cachet espagnol de Sebta et Melilla ne souffrent d'aucune discussion, sous quelque forme que ce soit. Le Maroc avec qui nous entretenons de bonnes relations le sait parfaitement». Le 28 juin, c'était au tour du ministre de l'Economie et des Finances, Salaheddine Mezouar, en visite dans la capitale espagnole, d'affirmer que «les Espagnols savent que Sebta et Melilla sont deux villes marocaines». En dehors de ces revendications nationales marocaines, c'est l'augmentation démographique de la population d'origine marocaine dans les enclaves qui inquiète les décideurs politiques. Ces derniers craignent une «islamisation de la vie sociale». En effet, il y a selon Atenea, une croissance de mariages mixtes entre Espagnols musulmans ou pas, et des Marocains s'installant dans les enclaves pour obtenir des papiers. «Il n'existe pas de données précises, mais 40% des habitants des deux villes sont d'origine marocaine et 60% de la population sont des enfants». Alors qu'en 1986, «la population d'origine marocaine de 32% à Melilla et 18% à Sebta» ajoute-t-elle. De même, selon le magazine, cette islamisation supposée conduirait à l'«hypothétique livraison – de Sebta et Melilla – au Maroc». Le journal rappelle aussi le déclin économique des deux villes, qui dépendent essentiellement du commerce informel avec le Maroc. Que deviendraient-t-elles sans le Maroc ? Cette agonie économique, couplée à «l'explosion» démographique marocaine dans les présides, ainsi que les pressions diplomatiques du Maroc pourraient jouer un rôle déterminant voire accélérer le retour des enclaves sous drapeau marocain. Rappelons que Sebta et Melilla sont pour le Maroc, ce qu'est Gibraltar pour l'Espagne. Bien que situé au sud de l'Espagne, ce territoire est sous l'autorité du Royaume-Uni depuis 1704. Madrid a toujours contesté cette souveraineté, et le Rocher est au centre de dissensions dans les relations hispano-britanniques, comme lors de la visite d'Anne d'Angleterre, la fille de la reine Elisabeth II à Gibraltar, en mars 2009. Le pays de Zapatero conteste donc autant la souveraineté des Britanniques sur Gibraltar que la marocanité de Sebta et Melilla. Jusqu'à quand ?