Tout au long des siècles, la ville antique d'Anfa a survécu à plusieurs conquêtes étrangères. La ville côtière connue aujourd'hui sous le nom de Casablanca fait partie de l'histoire ancienne de l'Afrique du Nord. Contrôlée par les Amazighs, les Romains, et détruite par les Portugais, Anfa, comme un phénix, a su renaître de ses cendres pour devenir Dar el Beida plusieurs siècles plus tard. Histoire. Avant de devenir l'une des plus grandes métropoles d'Afrique et la plus grande agglomération du Royaume du Maroc, Casablanca a franchi plusieurs étapes au fil des siècles. De nos jours, la capitale économique se situe sur les ruines de la ville d'Anfa, une ancienne cité berbère fondée au 10e siècle av. J.-C. Anfa est une appellation berbère, synonyme de «petite colline», d'après le livre «Africa Ethnonyms and Toponyms» publié par l'UNESCO. L'ancienne Casablanca a été témoin des différents changements qui se sont produits au cours des siècles précédents. Habitée et gouvernée par les Amazighs, la région comprenant le Maroc, l'Algérie et la Tunisie d'aujourd'hui a porté comme surnom «Maurétanie», du 3e siècle avant J.-C. à l'année 40 après J.-C. Anfa au cours de l'Empire romain Selon la version apportée par Roman Heritage, un site culturel à but non lucratif sur la Rome antique, le nord du Maroc était occupé par les Amazighs, appelés «Berbères». «Le nord du Maroc, l'Algérie et les villes espagnoles de Ceuta et Melilla (...) ont été habitées par des tribus berbères semi-nomades», raconte cette source. «Vers 800 avant J.-C., les villages phéniciens de la Méditerranée ont commencé à créer des colonies commerciales dans la zone côtière et se sont mélangés avec la population berbère. En 814 avant J.-C., la ville de Carthage a été fondée (...) Vers 500 avant J.-C., les Carthaginois formaient un empire qui s'étendait jusqu'à la péninsule ibérique, le nord de l'Afrique, les îles Baléares, la Corse, la Sardaigne et la Sicile et leurs échanges commerciaux s'effectuaient jusqu'aux fin fonds de l'Afrique.» L'Empire romain s'est ainsi développé dans les régions nord-africaines et de Maurétanie. Vers 15 av. J.-C., les Romains occupèrent la région et créèrent un port sous le règne d'Octavius Augustus (Octave Auguste), premier empereur à contrôler l'Empire romain de l'an 27 av. J.-C. jusqu'à sa mort en l'an 14 apr. J.-C. Le port d'Anfa établi par les Romains devint donc un important pilier reliant la région au port de Mogador (aujourd'hui Essaouira). Illustration du port d'Anfa détruit par les Portugais. / Ph. DR Il semblerait aussi que l'expédition de Juba II, un roi amazigh de l'Afrique du Nord, pour découvrir les îles Canaries eut comme point de départ le port d'Anfa. Ce dernier a été nommé Anfus par les Romains lorsque la Maurétanie était un partenaire commercial de l'Empire européen. Les histoires suggèrent qu'Anfa et la partie nord du Maroc appartenaient à la «Maurétanie Tingira», une province romaine créée après que l'empereur romain Claudius eut divisé le royaume en deux provinces. La ville antique d'Anfa aurait entretenu des relations commerciales avec Volubilis jusqu'au 5e siècle av. J.-C. La conquête des Vandales L'Anfa romaine a ensuite été conquise par les Vandales, une tribu germanique orientale qui a migré du sud de la Scandinavie pour atteindre l'Espagne et l'Afrique du Nord au 5e siècle apr. J. -C. Une version rapportée par le livre «Afrique du Nord: Une histoire de la Rive méditerranéenne au Sahara» (Editions Duckworth Overlook, 2012) de Barnaby Rogerson, un écrivain et historien britannique qui indique que «la conquête vandale fut un événement de courte durée mais dramatique dans l'histoire de l'Afrique du Nord». «Tous les propriétaires romains ont été expulsés d'Afrique du Nord et leurs domaines donnés aux guerriers vandales qui sont devenus une classe dirigeante», écrit-il. Carte de la Maurétanie Tingira. / Ph. DR Peu d'informations existent sur la façon dont la ville d'Anfa s'est remise de la conquête des Vandales. En 744, un royaume amazigh appelé Barghawata, appartenant à la confédération Masmouda, s'installe entre le Bouregreg et l'Oum Errabiâ au sud du port romain (Anfus). Dans son livre, l'historien britannique a décrit Casablanca comme le «port punique d'Anfa». Il précise aussi que le port était «la capitale de l'hérésie Barghawata du VIIIe au XIIe siècle». La destruction par les Portugais Contrôlée par la dynastie amazighe, la ville d'Anfa est ciblée par les Portugais au XVe siècle. Barnaby Rogerson rapporte que «le port de corsaire a été attaqué par les Portugais [à deux reprises] en 1486 [puis en] 1515 avant qu'ils réussissent à l'occuper de 1575 jusqu'au tremblement de terre de Lisbonne de 1755». Une autre version presque identique est racontée par Paul Puschmann, professeur adjoint d'histoire économique, sociale et démographique à l'Université Radboud aux Pays-Bas. Il souligne dans son livre «Casablanca: un miracle démographique sur le sol marocain ?» (Editions Uitgeverij Acco, 2011) que «pendant la dernière partie du XVe siècle, l'armée portugaise attaqua Anfa pour se débarrasser des pirates locaux». «Bien que les Portugais n'ont pas occupé la ville, sa population locale l'a abandonnée, laissant Anfa se transformer en une ville fantôme.» Ainsi, Anfa n'aurait pas pu survivre au raid portugais. Elle deviendra et restera une ville abandonnée jusqu'en 1770. Paul Puschmann se réfère dans son livre à la période qui a suivi l'attaque portugaise, affirmant que «trois siècles s'écouleront avant qu'Anfa ne soit sortie de ses ruines en 1770 grâce aux plans militaires du Sultan Mohammed Ben Abdallah (sultan alaouite de 1757 à 1790, ndlr) qui tentait de libérer le Sultanat marocain des envahisseurs étrangers». Des pièces de monnaie de l'époque du roi Juba II. / Ph. DR Anfa rebaptisée Dar El Beida Grâce au sultan alaouite, Anfa est épargnée des attaques étrangères pour renaître de ses cendres. L'auteur de «Casablanca : un miracle démographique sur le sol marocain ?» suggère que «Casablanca a fonctionné comme un bastion contre les attaquants étrangers à cette époque». «Le Sultan construira d'extraordinaires remparts et placera une garnison dans la Médina. Il construira également une mosquée, une école coranique, des bains publics et des moulins et, sous son commandement, la ville sera repeuplée par des Chleuh berbères de la région d'Essaouira et des environs de Meknès.» C'est sous le règne de Moulay Mohammed Ben Abdallah que la ville d'Anfa est baptisée Dar el Beida, une appellation qui existe jusqu'à présent. «Le renouveau de la ville s'est accompagné d'un changement de nom : Anfa est devenue Dar el Beida, même si les Européens ont commencé à parler de plus en plus de Casablanca», conclut Paul Puschmann. Le nom Anfa se réfère actuellement à un quartier de la ville moderne de Casablanca. La métropole est aujourd'hui considérée comme le cœur économique accueillant plusieurs multinationales et son port est l'un des plus célèbres d'Afrique du Nord.