L'investiture d'une sénatrice franco-algérienne pro-Polisario à la 9e circonscription des Français de l'étranger fait grincer des dents au royaume. En Marche Maroc assure que sa désignation est toujours suspendue aux lèvres du MoDem, dont elle fait partie. Législatives, en marche ! Le mouvement du président fraîchement élu a embrayé jeudi 11 mai la campagne électorale pour les élections législatives françaises, dont le premier tour aura lieu dimanche 11 juin. Sur 577 circonscriptions, 428 candidats ont d'ores et déjà été investis sous la bannière «La République en Marche». Parmi eux, la sénatrice de Paris Leïla Aïchi, parachutée dans la 9e circonscription des Français établis hors de France, qui comprend 16 pays du Maghreb et de l'Afrique de l'Ouest. Au Maroc, c'est peu dire que son investiture a suscité une levée de boucliers : Leïla Aïchi compte parmi les soutiens des thèses séparatistes du Front Polisario. «Jeter de l'huile sur le feu» Le 2 février 2013, elle avait convié au Sénat des représentants du Polisario dans le cadre d'une conférence «entièrement acquise aux thèses des séparatistes», écrit le site d'information Atlas Info. Sa directrice de publication Hasna Daoudi, présente lors de l'évènement, nous raconte : «Il n'y avait aucune voix contradictoire. Seul le représentant du Polisario en France à l'époque (Omar Mansour, ndlr), des séparatistes dont Mohamed Sedati et leurs soutiens en France et en Belgique étaient présents, ainsi que beaucoup d'Algériens venus d'Algérie. Personne n'a apporté la moindre contradiction aux thèses séparatistes. C'est Leïla Aïchi qui était à la manœuvre, qui a organisé l'évènement et invité les participants. C'est sous sa houlette que la conférence s'est déroulée.» Hasna Daoudi juge inappropriée l'investiture de Leïla Aïchi : «C'est absurde de l'avoir désignée. Ce qui pose problème, c'est son soutien et son parti pris avéré, en tant qu'élue de la République, aux thèses des séparatistes. Elle offre des tribunes de propagande au Polisario, d'autant plus au Sénat, un lieu emblématique de la démocratie. Or quand vous êtes élue de la République, vous n'êtes pas là pour faire la propagande d'un groupement de personnes dont les chefs sont poursuivis par la justice espagnole pour torture et génocide. Son élection risque de semer la zizanie et de diviser. Elle ne fera que jeter de l'huile sur le feu.» A l'instar de Hasna Daoudi, d'autres voix s'étaient élevées pour dénoncer le caractère partisan de cette manifestation : hormis Christian Cambon, président du Groupe d'amitié France-Maroc au Sénat dont fait partie Leïla Aïchi («un paradoxe de taille !», relève encore Hasna Daoudi), Mohammed Mraizika, du Collectif associatif international Almohagir, avait lancé un appel pour demander l'exclusion de la sénatrice de ce Groupe. «Stand-by» Au Sénat, Leïla Aïchi a d'abord été élue sous les couleurs d'EELV, dont elle a été exclue temporairement en décembre 2015, avant de rejoindre le MoDem de François Bayrou. «C'est une girouette qui utilise beaucoup la mobilité politique, dit Hasna Daoudi. Quand elle faisait partie du Groupe d'amitié France-Maroc, elle était chez les écologistes. Puis elle a changé de bord pour aller au MoDem de François Bayrou.» Ce dernier s'étant rallié à Emmanuel Macron, c'est finalement le mouvement du nouveau président qui a validé l'investiture de la sénatrice. «Sans que le MoDem ne soit au courant de cette validation», nous confie une source. «A 17 heures, c'est Augustin Augier qui a été investi par 'En marche !', avant qu'il démente cette information sur Twitter. Trois heures plus tard, vers 20 heures, on a appris que c'est Leïla Aïchi qui avait été choisie.» Contrairement à la liste publiée par @enmarchefr je ne suis pas candidat dans la 9eme circonscription des français établis hors de France. — Augustin Augier (@aaugier) 11 mai 2017 Du côté de la section marocaine du mouvement macronien, on annonce un «stand-by» : «Tout ce que l'on peut vous dire à ce stade, c'est qu'on attend tous la tenue, ce soir, du bureau politique du MoDem pour qu'il confirme toutes ses investitures. Aujourd'hui, on ne peut pas dire que sa candidature (celle de Leïla Aïchi, ndlr) se fera sous l'étiquette d'En marche car elle n'a pas encore été officialisée par le MoDem. Elle peut être confirmée, comme elle peut être remplacée», assure Hamza Hraoui, représentant d'En Marche Maroc. Selon une source au sein du Mouvement En Marche ! à Paris, il semblerait que ce soit la proximité de Leïla Aïchi avec Bariza Khiari, déléguée nationale d'En marche, qui ait permis cette désignation. Le MoDem semble jouer le rôle de bouc émissaire, le temps peut-être de rectifier le tir. Bariza Khiari dément tout lien avec la désignation de Leïla Aïchi Contactée par nos soins, Bariza Khiari a tenu à démentir tout lien avec la désignation de Leïla Aïchi en tant que candidate de la 9ème circonscription.«Ma proximité avec Leïla Aïchi n'a aucun lien avec sa désignation», a-t-elle précisé. «Les choses sont assez confuses donc je souhaite démentir de manière formelle. J'ai toujours oeuvré pour l'excellence des relations franco-marocaines», a-t-elle encore ajouté. Article modifié le 12/05/2017 à 20h22