Alors que Benkirane avait ouvertement ordonné à son ministre de l'Education nationale de retirer la circulaire sur l'enseignement de certaines matières scientifiques en langue française, Rachid Belmokhtar n'a pas dit son dernier mot. Ce dernier a refusé d'obtempérer et menace de recourir à un arbitrage royal. Début novembre, l'annonce par le ministre de l'Education nationale de la mise en place de l'enseignement de certaines matières scientifiques en français avait eu l'effet d'une bombe. Quelques semaines plus tard, Abdelilah Benkirane avait profité de son passage devant la Chambre des conseillers pour recadrer Rachid Belmokhtar. Devant les caméras d'Al Aoula qui retransmettaient la séance parlementaire du 1er décembre en direct, le chef du gouvernement annonçait, non sans enthousiasme, qu'il avait suspendu la circulaire tant décriée. La décision a été vivement saluée par les défenseurs de la langue arabe. Mais trois semaines plus tard, il semblerait que Rachid Belmokhtar ait refusé de se plier à l'injonction du chef du gouvernement. «Jusqu'à présent les directeurs des académies n'ont reçu aucune note de la part du ministère les avisant d'un possible retrait de la circulaire. Si rien n'est entrepris pour suspendre la décision de Belmokhtar, la langue française marquera alors, dès la saison scolaire 2016-2017, son retour dans l'enseignement de certaines matières dans le secondaire», nous confie une source au ministère. Ce retour qui devrait tourner la page de plusieurs décennies d'absence, suite à la mise en place de la politique de l'arabisation au début des années 80. Vers un arbitrage royal ? Ce bras de fer entre Belmokhtar et Benkirane n'est que la face visible de l'iceberg. Depuis sa nomination au gouvernement le 10 octobre 2013, le ministre technocrate a toujours revendiqué son indépendance vis à vis de l'exécutif. Il était même allé jusqu'à confier à des parlementaires qu'il n'avait d'ordre à recevoir d'aucune autre autorité à part celle du roi. Pour rappel sa désignation pour reprendre les commandes du ministère de l'Education nationale avait fait suite au discours du trône du 30 juillet 2013, très critique de Mohammed VI à l'égard de la gestion de Mohamed El Ouafa du département de l'enseignement. Le bras de fer entre Belmokhtar et Benkirane est d'ailleurs appelé à s'installer dans la durée. Le ministre menace même de recourir l'arbitrage royal pour trouver une solution au problème. Aujourd'hui le conseiller royal Omar Azziman, le président du Conseil supérieur de l'enseignement, a profité de la réunion de l'assemblée générale de son institution, pour rappeler des passages du discours du roi du 30 juillet 2015. Il a notamment évoqué les bienfaits de l'«ouverture» sur les autres langues et cultures. Ce rappel devrait sans doute conforter Belmokhtar dans ses positions et sans aucun doute susciter l'ire des défenseurs de l'arabe à commencer par Benkirane.