Les «moqaddem» et les «chioukh» sont par excellence des lanceurs d'alertes à la marocaine. Ces agents locaux de l'autorité sont un maillon très important dans la lutte contre les cellules supposées terroristes, notamment dans le monde rural où les recruteurs de Daesh sont de plus en plus actifs. Si les renseignements marocains ont la cote en Europe c'est en grande partie grâce à l'implication des «moqaddem» et des «chioukh». Ils étaient là bien avant la création de la DGST, du BCIJ ou de la DGSN. Eux, ce sont les «moqaddem» et les «chiouk». Ces agents de l'autorité travaillent dans l'ombre et avec des moyens plutôt dérisoires. Ils doivent souvent se contenter d'une moto pour circuler et ont dans les meilleurs des cas un téléphone portable pour communiquer en cas d'urgence. Au fil des ans leur condition a peu évolué. Ils ont un salaire mensuel, oscillant entre 2 200 et 3 000 dirhams. Ce qui ne correspond en aucun cas aux rôles qu'ils jouent dans l'effort de la sécurisation du pays. Mardi à la Chambre des représentants, députés de la majorité et de l'opposition ont plaidé la cause des ces éléments de base de la politique sécuritaire du Maroc. Ils ont ainsi exigé du gouvernement de faire un geste en faveur de ces «oubliés». Le ministre de l'Intérieur a répliqué en annonçant une hausse de leur salaire de 500 dirhams, réparties sur deux années (2016 et 2017). L'Europe intéressée par le modèle marocain Devant les députés Mohamed Hassad n'a pas tari d'éloges sur le travail accompli par ses agents, soulignant qu'ils «sont opérationnels 24 h sur 24». Il a également révélé que son département avait prolongé le contrat de 30% des «moqaddem» et des «chioukh» qui avaient atteint l'âge de la retraite. Hassad a justifié cette mesure par l' «expérience» des bénéficiaires. C'est justement cette «expérience» qui permet à ces agents d'être les premiers à lancer des alertes sur les activités suspectes de certains individus. Les dernières opérations de démantèlement de présumées cellules terroristes par le BCIJ comme celles du douar «Ghram Laâlam» près de Béni Mellal et d'Aït Ishak (province de Khénifra) sont la conclusion d'un processus souvent lancé par un «moqaddem» ou un «chikh». Cela est d'autant plus vrai dans les localités éloignées et enclavées où ni la DGST ni le BCIJ n'ont d'antennes locales pour traquer les présumés terroristes. Cette force de frappe des renseignements marocains commence à intéresser des partenaires européens du royaume, a annoncé tout sourire Mohamed Hassad, mardi à la Chambre des représentants. Mais le modèle serait-il transposable en Europe ? C'est peu probable. Il serait très difficile de trouver des Européens qui acceptent une rémunération dérisoire pour une mission d'une si haute importance. Et le comble c'est que les «moqaddem» et les «chiouk» ne sont même pas intégrés à la fonction publique.