En l'espace de deux semaines, 9 aigles rares ont été retrouvés morts des suites d'électrocutions dans la province de Guelmim, alors que celle-ci est réputée pour être le foyer d'un grand nombre de rapaces en hiver. Une association de protection des oiseaux tire la sonnette d'alarme. Un aigle impérial ibérique électrocuté, découvert le 22 octobre. Photo / Moroccan Birds / Ali Irizi Un aigle royal électrocuté, découvert le 22 octobre. Photo / Moroccan Birds / Ali Irizi Deux aigles de Bonelli électrocutés, découverts le 7 novembre. Photo / Moroccan Birds / Ali Irizi Photo / Moroccan Birds / Ali Irizi Photo / Moroccan Birds / Ali Irizi Photo / Moroccan Birds / Ali Irizi «Il faut faire quelque chose, et vite !», martèle Mohamed Amezian, ornithologue et membre de l'association GREPOM (Groupe de Recherche pour la Protection des Oiseaux au Maroc). Il réagit ainsi à l'électrocution de 9 aigles rares en l'espace de deux semaines dans la province de Guelmim, dans le sud-ouest du Maroc. Trois aigles impériaux ibériques, cinq aigles de Bonelli et un aigle royal ont, en effet, été retrouvés électrocutés dans cette région les 22 octobre et 7 novembre 2015, l'un des aigles ibériques ayant été suivi par émetteur satellite. Guelmim, zone de refuge pour les aigles rares en hiver Selon l'association, le nombre d'oiseaux électrocutés pourrait être encore plus élevé. «Ces aigles ont été retrouvés dans une petite section de la ligne électrique. On ne sait pas ce qu'il en est ailleurs dans la province. De plus les carcasses sont souvent vite éliminées par les charognards», explique M. Amezian. Phénomène d'autant plus inquiétant car nous entrons dans la saison hivernale, période d'affluence des aigles dans la région, selon l'ONG. La zone étant riche en nourriture, selon le responsable, les aigles ibériques venant d'Espagne, ainsi que les aigles de Bonelli du sud du Maroc ont tendance à migrer vers Guelmim et sa région. «Les aigles immatures sont encore plus concernés. Dans leurs premières années, ils se dispersent souvent», explique Rachid El Khamlichi ornithologue et membre de l'association GREPOM. «Il est possible qu'il y ait eu d'autres décès d'aigles ces derniers jours», dit-il. «C'est grave ! Cette situation est dangereuse pour les rapaces du Maroc», alerte l'ornithologue. Les autorités doivent réagir «Le problème de l'électrocution dans l'une des principales zones de concentration en hiver peut menacer la population marocaine d'aigles de Bonelli dans le future, si ces pylônes électriques dangereux ne sont pas neutralisés», averti M. Amezian, soulignant que l'électrocution d'aigles dans la région s'accompagnerait de coupure d'électricité. D'après lui, l'intervention des autorités «sera bénéfique non seulement pour les oiseaux, mais aussi pour les habitants et l'ONEE qui économisera les coûts de maintenance récurrents», suite aux coupures de courant provoquées par l'électrocution des oiseaux. Joint par nos soins, la direction provinciale de l'ONEE à Guelmim reconnait l'électrocution des aigles devenue fréquente dans la région. «Mais cela a lieu au niveau des pylônes à haute tension. Ils sont gérés par le ministère des Transports», assure le directeur Ahmed Essakali. Nous avons cependant tenté en vain de contacter la direction provinciale du ministère des Transports à Guelmim. Les Espagnols, prêts à transmettre leur savoir-faire En attendant la réaction des autorités, les militants pour la protection des oiseaux du Maroc cherchent de l'aide auprès de leurs homologues espagnols. Ils ont récemment participé à un séminaire sur la protection transfrontalière des rapaces dans la Méditerranée, organisé conjointement par l'Union internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) et la Junte d'Andalousie à Malaga. «Parmi les soucis évoqués, nous avons parlé de l'électrocution des oiseaux. C'est un réel problème pour les grands rapaces qui sont souvent des espèces menacées», explique Rachid El Khamlichi. Et d'ajouter : «Avec l'expérience accumulée dans le domaine de l'électrocution des oiseaux, nos collègues en Andalousie, aussi bien ceux du ministère de l'Environnement de la Junte que ceux des chercheurs de EBD-CSIC [un institut de recherche public, ndlr], sont disposés à collaborer avec le Maroc en termes de transferts de connaissances dans le domaine de protection des lignes électriques dangereuses».