Alors qu'elle abrite un musulman sur deux en Belgique, la région de Bruxelles, ne reconnait que 14 mosquées sur les 80 que compte la région. Un chiffre minime par rapport aux autres régions qui s'explique par une lenteur administrative dans le processus de reconnaissance mais aussi par des raisons financières. Détails. Grande mosquée de Bruxelles (DR) Grande mosquée de Bruxelles (DR) La région de Bruxelles serait-elle frileuse à la reconnaissance des mosquées ? La question se pose avec acuité. La Dernière Heure révèle que seules 14 mosquées de la région ont été reconnues par les autorités régionales. Une proportion minime puisque la région compte 80 mosquées. Et le nombre de mosquées reconnues est d'autant plus infime que 10 des mosquées reconnues l'étaient déjà en 2012. En somme en 3 ans, seules 4 mosquées ont été officialisées par la région de Bruxelles. Et pour montrer encore plus dans cette difficulté à reconnaître les mosquées de la région, la même source révèle encore que 7 demandes de reconnaissance sont sur la table du président de la région. Avec plus de 300 000 musulmans, la région bruxelloise a encore du chemin à faire. A titre de comparaison avec les autres régions belges, la Wallonie reconnait 39 mosquées tandis que la Flandre en reconnait 32. «On répertorie 80 mosquées dans la capitale, pour 300 sur l'ensemble du pays, et il reste donc effectivement près de 60 mosquées qui n'ont pas fait la demande. On essaie de les convaincre de l'utilité de le faire», argumente Nouredinne Smaïli, président de l'Exécutif des musulmans de Belgique (EMB). Pourtant, la reconnaissance offre un double avantage. D'un côté, la région se charge du déficit enregistré par l'édifice religieux. De l'autre, l'Etat fédéral paie le salaire du ou des imams. Au vu de tous ces avantages, pourquoi donc, les mosquées rechignent-elles à se faire reconnaître ? Des raisons administratives… Les raisons peuvent être purement administratives. Interrogée par la Dernière Heure, Corrine Torrekens, spécialistes des questions liées à l'islam avance la lenteur du processus de reconnaissance. «La Région doit attendre l'avis du Fédéral avant de reconnaître des mosquées. Or, le fédéral tarde à rendre ses avis.», explique-t-elle. Plus loin dans son explication, elle ajoute qu'«il y a d'abord l'aspect administratif. Pendant longtemps, un certain nombre de mosquées bruxelloises n'ont pas pu recevoir de reconnaissance parce que les dossiers ont traîné, notamment en raison de la sûreté de l'Etat qui émettait des réserves sur des dossiers ». «Toujours d'un point de vue administratif, les procédures sont assez lourdes. Il faut compléter d'importants dossiers, ou encore savoir lancer des procédures de marché public lors d'achats de matériel. Il s'agit de difficultés techniques quand on sait que les mosquées sont souvent gérées par des immigrés de la première génération, qui ne parlent pas toujours bien français ou néerlandais», complète-t-elle. Autre raison avancée par la docteure en sciences sociales et politiques, le financement venant de l'étranger. «Il y a aussi le fait que beaucoup de mosquées n'ont en fait pas besoin qu'on leur paie le salaire de leurs imams. Elles ont assez de fidèles ou des pays étrangers les subventionnent. Les mosquées turques, que j'estime à environ 30, sont financées par l'Etat turc ou d'autres mécènes», révèle-t-elle. ... et financières Une autre explication est cependant à ajouter à cette liste. Pour que la demande de reconnaissance soit validée, la mosquée est tenue outre de tenir une comptabilité rigoureuse, de faire soumettre la validation du choix de son ou ses imams par l'EMB, seul organisme de représentation des musulmans reconnu par l'Etat belge. Certaines mosquées interprètent ce critère de reconnaissance comme «une ingérence». On comprend dès lors qu'elles soient réticentes à introduire une demande de reconnaissance auprès des autorités régionales. Mais la reconnaissance par les autorités régionales n'empêche pas de bénéficier de subsides ou d'avoir des relations avec la région. «On a un très bon contact avec l'Association des mosquées schaerbeekoises, qui regroupe une dizaine d'entre elles. On leur donne chaque année 15 000€ pour la fête du Sacrifice, et pour cela, elles doivent montrer leurs comptes», confie l'échevin des Cultes schaerbeekois, Etienne Noël. La bourgmestre de Moleenbeek, Françoise Schepmans a indiqué pour sa part «sur les 24 mosquées de Molenbeek, quatre sont reconnues par la Région. Mais 16 d'entre elles font partie du Conseil consultatif des mosquées, avec lequel on est en contacts. On donne à ce conseil 45 000 € de subsides ». C'est peut-être là le nœud du problème. Les dirigeants des mosquées savent que la reconnaissance ne comporte aucune force contraignante. Pour une plus grande reconnaissance des mosquées, les régions devraient peut-être lier les subsides à la reconnaissance.