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Maroc : Les délicates relations entre le ministère des Habous et les imams (Partie 3)
Publié dans Yabiladi le 19 - 04 - 2015

Le 13 mai 2012, descendant du train à Rabat-ville en provenance de Meknès, j'ai observé des hommes d'un certain âge en train de courir en tous sens, vêtus de djellabas blanches, de tuniques, de bonnets et de babouches de couleur blanche et jaune. La plupart d'entre eux portaient la barbe, tenaient le Coran à main et scandaient «nous sommes victimes de la nouvelle politique religieuse». En fait, il s'agissait d'une manifestation d'imams et préposés religieux qui avaient lieu devant le parlement marocain ce jour-là, les forces de l'ordre venaient d'intervenir pour disperser les imams violemment. Récit ethnographique. (Partie 3)
Le 28 mai 2012, le ministre Ahmed Toufiq a affirmé, lors de la séance des questions orales à la chambre des représentants, que «la situation des imams des mosquées compte parmi les questions majeures qui relèvent de l'encadrement religieux au Maroc». Il a insisté sur l'augmentation de la dotation financière allouée aux imams des mosquées, passée de 60 millions de dirhams en 2004 à 740 millions en 2012, soit une augmentation de 1130%.
Le ministre déclare, dans la même séance, que les imams ont des statuts différents, les imams des mosquées qui ne bénéficient pas de chart [14] perçoivent une allocation mensuelle de 1400 dirhams, ceux qui exercent les deux fonctions d'imamat et du prêche reçoivent une indemnité mensuelle de 2300 dirhams, ceux qui bénéficient du chart perçoivent une dotation mensuelle de 1100 dirhams ou de 2300 dirhams pour tout imam faisant également office de prêcheur. Le ministre a ajouté que les imams des mosquées bénéficient des prestations de la «Fondation Mohamed VI pour la Promotion des Oeuvres Sociales des Préposés Religieux» ayant pour objectif l'amélioration des conditions sociales des imams et de leurs familles, dont leur couverture médicale.
Dans tous ses discours, le ministre des Habous et Affaires islamiques laisse entendre que l'imam est le représentant de l'imam suprême, Commandeur du Croyants, et que l'imam doit respecter les choix et les règles de l'islam d'Etat tels qu'ils sont prescrits par le Roi. Le fait que cette catégorie sociale souhaite s'auto-organiser en syndicats ou associations indépendantes montre qu'elle n'est plus seulement sous le haut patronage du Roi. L'Etat considère les préposés religieux comme une réserve importante pour défendre ses doctrines politico-religieuses, le sermon du vendredi unifié et imposé par le ministère du Habous dans toutes les mosquées du royaume montre à quel point l'imam doit appliquer littéralement, sans ajout, les consignes et les directives données par la hiérarchie.
Depuis le début des grandes opérations de reconstitution du champ religieux au Maroc, à l'arrivée à la tête du ministère Ahmed Toufiq en 2002, un bras de fer est engagé entre le ministère et quelques groupes d'imams. En fait, l'ex-ministre El-Mdaghri, était un proche des salafistes et durant son mandat, une génération d'imams, prêcheurs et sermonnaires plus au moins proches de sa ligne doctrinale a été formée. Le nouveau ministre, Ahmed Toufiq, est un célèbre disciple de la zâwiya Qadiriya Boutchichiya, bien que la zâwiya ait déclaré à plusieurs reprises l'importance de distinguer Toufiq le ministre de Toufiq le disciple [14], les imams en colère accusent ce dernier de vouloir annexer le ministère aux zâwiya soufies [15].
Les réactions du ministère des Habous
Le département des affaires islamiques a mis en place depuis 2005 un programme de formation, de qualification et de remise à niveau des imams. Dans le cadre de cette même opération de qualification, le ministre a expliqué, qu'il s'agit de «sensibiliser les imams au cadre doctrinal qui gouverne leur action, de leur permettre de remplir leur rôle pour conforter les mosquées dans leur vocation en tant que lieux d'orientation religieuse et de diffusion de la pensée religieuse authentique, de renforcer leur présence en matière d'encadrement et de guidance vers le droit chemin en s'inspirant des principes du Fiqh Attayssir, et de favoriser un climat de communication et d'échange avec les ouléma».
Cette initiative a permis aux bénéficiaires du programme de devenir des formateurs, d'obtenir un statut proche de celui des fonctionnaires qui leurs garantit des droits minimes. En 2013, la neuvième promotion de cette catégorie des imams est formée. Cette opération de formation inédite des imams nécessite un budget annuel de 125 millions de dirhams et est prévue pour les 44600 imams que compte le Royaume, encadrés par 1426 Oulémas [16].
Sur le site internet officiel du ministère, la mise en place d'une stratégie globale très ambitieuse est présentée pour améliorer la situation. Parmi les principaux jalons de cette stratégie, figurent le développement du discours religieux, la qualification des acteurs du champ religieux, l'intégration des établissements de l'enseignement traditionnel dans le système éducatif, la contribution aux efforts nationaux en matière de lutte contre l'analphabétisme, le rehaussement des lieux de culte, de leur gestion et l'amélioration de la situation de ses préposés ainsi que le développement de l'institution des habous, de sa rationalisation, de sa gestion et la qualification de ses ressources humaines.
Le gouvernement a alloué une enveloppe budgétaire additionnelle pour l'année 2011 de 500 millions de DH relative à l'opération de contrôle et d'expertise technique des mosquées.
 Pour ce qui est de l'amélioration des conditions des préposés religieux, une enveloppe budgétaire de 611 millions de DH a été allouée aux rétributions supplémentaires des imams. Le nombre des préposés bénéficiant de la couverture médicale a augmenté puisqu'il a atteint 190.042.
Pour conclure, ce texte a mis en lumière les raisons de mécontentement de la catégorie des imams et préposés religieux dans un contexte marqué par la mise en place de la nouvelle constitution de 2011 et des nouvelles directives et lois relatives aux réformes religieuses. Notre attention est attirée par le fait que cette catégorie sociale manifeste dans l'espace public pour la première fois dans l'histoire du Maroc contemporain pour avancer des revendications d'ordre social, professionnel et démocratique. Elle s'identifie comme le maillon faible de la chaîne des sources humaines du puissant ministère des Habous et des affaires islamiques. Nous avons eu quelques échanges et entretiens avec les manifestants, imams et préposés religieux, devant le parlement, dans leurs propos, leur situation apparaît chaotique matériellement et humainement. De son côté le ministère de tutelle avance le fait que cette catégorie a bénéficié de plusieurs avantages, d'un programme et d'une stratégie globale d'évaluation et d'amélioration de leur situation matériellement, professionnellement et démocratiquement. Cette catégorie devrait être honorée d'être la «représentante de l'Imam suprême». Le chercheur en sciences sociales, enquêtant sur un conflit où les informations contradictoires se croisent, doit garder une neutralité objective qui permet de décrire et analyser son terrain sans aucunes contraintes, ni prise de position. La juste description des faits, des paroles et des actions observées permet au chercheur enquêteur de garder sa distance vis-à-vis des parties en conflit.
[14] Chart : sorte de contrat de volontariat dans lequel l'imam travaille dans la mosquée et est payé par les mécènes et les fidèles selon leur générosité, ce statut fonctionne encore efficacement dans les campagnes et dans de rares villes.
[15] Hamada(2009), Nous et le soufisme, la Tariqa Qadiriya Boutchichiya comme exemple, Ed.Chourouk. Rabat. P.93
[16] Kharbouch Abdelaziz, «Toufiq et sa relation avec les préposés religieux» in www.osratalmasajid.com


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