Il y a belle lurette qu'on savait que l'espace politique marocain est une risée. Rien de plus beau pour illustrer cela que d'inviter les «leaders» du gouvernement et de l'opposition sur le plateau d'une émission pour converser de la rentrée politique, à supposer qu'il y a déjà politique... Mais rien ne prédestinait cette rencontre à nous pondre un leitmotiv qui restera marqué dans nos esprits. Dans une joute verbale aussi intense que ridicule, les deux parties scandaient à haute voix : «Nous sommes le gouvernement de sa majesté», «Mais nous aussi, nous sommes l'opposition de sa majesté». On savait d'ores et déjà que le roi du Maroc est l'un des rois les plus riches de la planète et le plus riche du continent. On savait qu'à côté de cette immense richesse matérielle, le roi accumulait l'essentiel des pouvoirs du pays et que cette union illicite entre richesse et pouvoir ne ferait que freiner le développement du pays. Mais ce que j'ai découvert hier, c'est que le roi possédait un immense capital immatériel. Oui, nulle peine que Nizar Baraka et son Conseil économique et social, pardon : le conseil de «sa majesté» mène l'enquête sur la richesse. Richesse immatérielle Une classe politique qui se prosterne durant toute l'année et se met à l'exercice physique durant la fête de l'allégeance, un patronat prêt à servir corps et âme sa majesté, une armée de pseudo-intellectuels et de technocrates arrivistes à la solde de sa majesté, des artistes chantant les louanges de sa majesté, des journalistes et des scribes rapportant le moindre mouvement de sa majesté et surtout, des sujets qui ne rêvent que de baiser la main de sa majesté. Tous, sans exception, appartiennent à «Sa Majesté». Même les nihilistes et les damnés qui ne veulent appartenir à «Sa Majesté», sont la proie de ses fanatiques jusqu'à ce qu'ils redeviennent sages ou qu'ils meurent dans l'indifférence. Y a-t-il une personne sur Terre possédant un capital immatériel aussi immense que cela ? J'en doute. Cela n'aurait pas pu s'accomplir sans l'acquiescement des Marocains. Oui, les Marocains dans leur majorité admettent cette situation, l'acceptent et certains en sont même fiers. Ce culte de la personnalité entourant la monarchie ne peut se cultiver sans adeptes. Même avec la propagande la plus rodée et le despotisme masqué le plus abouti, cette situation exige un consentement aussi implicite qu'il soit du peuple qui y est assujetti. C'est ce consentement et cette abnégation crédule qui pousse des «leaders» de partis politiques à s'exercer à cette mascarade sans dignité en direct sur une des émissions les plus suivies du royaume … de «Sa Majesté». Et d'après plusieurs indices, cette richesse matérielle ainsi qu'immatérielle n'est vouée qu'à croitre et augmenter durant les années qui suivent. D'ici là, ceux qui rêvent de temps meilleurs, n'ont qu'à changer de cieux ou rire de notre détresse dans le pays où tout appartient ou se laisse appartenir à «Sa Majesté». PS : Cet article ainsi que son auteur n'appartiennent pas à «Sa Majesté». Visiter le site de l'auteur: http://mahdizahraoui.blogspot.com