Faisant suite à l'annonce de l'ouverture de nouvelles universités privées à partir de la rentrée prochaine –Université Internationale de Casablanca (Mundiapolis), Université Internationale de Rabat et Université Internationale d'Agadir – une polémique autour des universités privées s'est invité au débat sur l'enseignement supérieur. Non pas sur le fond, mais sur la forme. Tout d'abord, et selon la direction générale de HEM (Hautes Etudes en Management), établissement privé d'enseignement supérieur, de formation et de recherche, reconnu par le ministère de l'Education nationale, «si le Maroc a besoin d'universités privées, que la loi le permet, il n'en reste pas moins que le ministère de l'Education nationale a tardé à sortir le cahier des charges destiné à traiter les dossiers de demande d'autorisation. Aujourd'hui, il faut savoir qu'aucune université privée n'est encore légalement autorisée», indique Yasmine Benamour, Administrateur à HEM. Reste que l'absence de cadre juridique ne constitue pas le seul maillon faible pour l'encadrement de l'enseignement supérieur privé au Maroc. Qu'en est-il de l'accessibilité pour le plus grand nombre alors que les frais de scolarité s'élèvent à 100 000 dirhams par année scolaire, voire 120 000 dirhams par an? Du coup, seule une certaine catégorie sociale est éligible. Conséquence directe? Peu de modification apportée au moule dédié à la production des élites. Pour tenter de rendre plus accessible l'accès aux universités privés, il y a quelques années, une idée avait fait un bout de chemin. Celle de mettre en place des mécanismes à même de solvabiliser la demande s'adressant au privé. Plusieurs pistes avaient été évoquées comme l'accès au crédit étudiant, des dégrèvements fiscaux (défiscalisation sur l'impôt sur le revenu). Aujourd'hui, rien n'a vu le jour. Si les établissements privés ne réclament pas d'aide particulière, néanmoins, ils verraient d'un bon œil un élargissement de «l'assiette», via la mise en place, par l'Etat, d'instruments de soutien destinés aux parents qui n'ont pas les moyens de scolariser leurs enfants dans le privé. Certains chefs d'établissements privés parlent de mise en place de bourses de mérite et d'un système approprié de crédits d'études. «Pourquoi l'Etat a mis sur pied une série de mesures pour accompagner et soutenir le secteur immobilier alors que rien n'est fait au niveau de l'éducation et de l'enseignement? C'est une situation anormale», précise Hassan Sayrah, Directeur général adjoint à HEM. Pour Driss Ksikès, Directeur du CESEM (Centre de recherche de HEM), «il ne faut pas opposer le système public au domaine privé. Les deux vont de pair et ils doivent être complémentaires. Il faut dépasser le débat public / privé. L'objectif commun doit être d'attirer le plus grand nombre d'étudiants et de les tirer vers le haut, à savoir les standards internationaux. On ne veut pas d'une élite déconnectée des réalités et d'une masse, bas de gamme. Pour cela, on a besoin d'un système public fort», dit-il. Dès lors, à quand un grand débat national sur l'école, sa place et son rôle dans la société ? C'est aussi un débat de fond nécessaire. Reste que le mal est profond et qu'il n'est pas nécessairement rentable comme peut l'être le «marché» de l'enseignement privé au Maroc et ailleurs.