Un nouveau rapport de la CESAO avertit que les nouveaux tarifs douaniers américains menacent 22 milliards de dollars d'exportations arabes hors pétrole. Le Maroc, l'Egypte, la Jordanie et la Tunisie devant faire face à 114 millions de dollars de paiements d'intérêts souverains supplémentaires en 2025. Cependant, les exportations marocaines pourraient bénéficier des changements tarifaires douaniers au détriment de la Chine et de l'Inde. Dans une note d'orientation publiée samedi, la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie occidentale (CESAO) a mis en garde contre les effets du «protectionnisme commercial» des Etats-Unis. En référence aux tarifs imposés par le président Donald Trump, la CESAO souligne que ces mesures pourraient sérieusement affecter les économies arabes. La Commission, qui regroupe 21 Etats membres d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient, estime que ces politiques pourraient menacer 22 milliards de dollars d'exportations non pétrolières. Pour le Maroc, ainsi que pour l'Egypte, la Jordanie et la Tunisie, la CESAO prévoit une augmentation de 114 millions de dollars des paiements d'intérêts souverains d'ici 2025 en raison de ces nouveaux tarifs. Cette hausse est due à l'augmentation des rendements obligataires mondiaux et à une incertitude accrue chez les investisseurs, ce qui pourrait exercer une pression sur les finances publiques et retarder les investissements en développement. Le Maroc pourrait également ressentir les effets d'une demande réduite de la part de partenaires clés, notamment l'Union européenne, qui absorbe actuellement 68 % des exportations du Royaume. Toutefois, il y a aussi des opportunités. La CESAO note que les changements dans les dynamiques commerciales américaines pourraient ouvrir des possibilités de réorientation en faveur du Maroc et l'Egypte. Avec l'augmentation des tarifs américains sur les produits chinois et indiens, les exportations marocaines et égyptiennes pourraient devenir plus compétitives sur le marché américain. Cependant, la Commission avertit que la récente pause tarifaire de 90 jours — qui exclut la Chine — pourrait limiter cet avantage. Globalement, les exportations totales des pays arabes vers les Etats-Unis ont chuté, passant de 91 milliards de dollars en 2013 à 48 milliards en 2024, principalement à cause de la baisse des importations américaines de pétrole brut. En revanche, les exportations non pétrolières ont presque doublé, passant de 14 milliards à 22 milliards de dollars, grâce à la croissance dans les secteurs du textile, des produits chimiques, de l'aluminium, des engrais et de l'électronique. Ces progrès sont désormais menacés. La Jordanie est particulièrement vulnérable, avec près de 25 % de ses exportations destinées aux Etats-Unis. Les secteurs de l'aluminium et des produits chimiques de Bahreïn sont également à haut risque. Les Emirats arabes unis doivent faire face à des tarifs sur environ 10 milliards de dollars de réexportations vers les Etats-Unis, principalement des biens provenant de pays tiers. La CESAO appelle à une coopération régionale renforcée La CESAO insiste sur l'importance d'une coopération régionale accrue pour surmonter cette crise. Elle appelle à accélérer la mise en œuvre de la Zone arabe de libre-échange, à faire avancer l'Union douanière du CCG, et à renforcer la coopération dans le cadre de l'Accord d'Agadir — un pacte de libre-échange entre l'Egypte, la Jordanie, le Maroc et la Tunisie, en vigueur depuis 2007. Les investissements dans la logistique et l'harmonisation réglementaire sont également jugés essentiels pour repositionner les pays arabes dans les chaînes de valeur mondiales. «Malgré les pressions, il y a ici une opportunité d'accélérer les réformes structurelles et de renforcer la résilience», a déclaré Rola Dashti, secrétaire exécutive de la CESAO. «La région est à un point d'inflexion stratégique», a-t-elle ajouté. Le 2 avril, le président Donald Trump a annoncé une nouvelle politique commerciale mondiale imposant un tarif de base de 10 % sur toutes les importations aux Etats-Unis. Le Maroc sera soumis à ce tarif de 10 %, qui sert de taux standard. Bien que les principales cibles soient la Chine, l'Union européenne et le Canada, cette mesure pourrait également affecter le commerce du Maroc avec les Etats-Unis — une relation déjà marquée par un déséquilibre. En 2024, l'excédent commercial des Etats-Unis avec le Maroc a atteint 3,4 milliards de dollars, une augmentation spectaculaire par rapport aux 35 millions de dollars en 2005, un an après que les deux pays ont signé un Accord de libre-échange.