Il est des annonces qui sonnent comme des ruptures, et d'autres qui ressemblent à des épilogues logiques. L'accord historique signé entre Maroc Telecom (IAM) et Inwi relève des deux. En acceptant de mutualiser leurs infrastructures de télécommunications, les deux opérateurs mettent un terme à des années d'antagonisme judiciaire tout en redéfinissant les règles du jeu sur un marché où la concurrence avait jusqu'ici des allures de guerre froide. Les deux opérateurs s'engageront à mutualiser leurs infrastructures passives de télécommunications en créant deux joint-ventures détenues à 50-50 : FiberCo et TowerCo. Les chiffres donnent le tournis : 4,4 milliards de dirhams d'investissement pour la première phase, un million de foyers connectés à la fibre optique en deux ans, 2 000 tours de télécommunications construites ou rénovées en trois ans et 6 000 tours d'ici 10 ans. Pour un secteur qui cherche à accélérer son virage vers la 5G et la fibre, ce partenariat a tout d'un big bang industriel. Mais au-delà des promesses de connectivité, cette alliance interroge. Faut-il y voir un mariage de raison imposé par la réalité économique, ou le signe d'une concentration inévitable dans un marché où les infrastructures coûtent cher et où la rentabilité à court terme devient un défi ? La réponse tient peut-être dans l'histoire récente des relations entre IAM et Inwi. Il y a quelques mois encore, ces deux géants s'affrontaient devant les tribunaux, Maroc Telecom écopant d'une amende record de 6,38 milliards de dirhams pour abus de position dominante. Aujourd'hui, cette sanction se transforme en compromis : IAM versera 4,38 milliards de dirhams, en échange d'une coopération qui rebat les cartes du secteur. La suspension de l'action IAM à la Bourse de Casablanca, avant l'annonce officielle, ce jeudi matin, avait déjà alimenté les spéculations. Aujourd'hui, la question qui se pose est celle de la régulation. L'ANRT donnera-t-elle son feu vert sans condition à cette opération, alors même que la mutualisation des infrastructures pourrait, à terme, renforcer un duopole IAM-Inwi au détriment du troisième acteur, Orange ?