En 2010, le gouvernement marocain a fait voté une loi pour voir disparaître les milliers de sacs plastiques qui flottent éternellement au vent dans la nature marocaine. 2 ans plus tard cette loi n'a pas été appliquée. Explications. La loi 22-10 interdisant la production de sacs non-dégradables et non-biodégradables du 16 juillet 2010 n'est pas respectée au Maroc, 2 ans après son adoption. Selon Edwin Sluisman, DG de Greenberry, l'une des rares sociétés à vendre au Maroc l'additif accélérant le vieillissement des sacs plastiques, seul 3% du marché respecte la réglementation. «Seules les grandes sociétés qui ont une démarche marketing comme Maroc Telecom, Carrefour, Marjane, Bim, Kitea … ont adopté les sacs sur mesure oxo-biodégradables que nous proposons», affirme-t-il. 97% du marché, dont 33% d'informel, n'est pas conforme à la loi. Le directeur de la Fédération de Marocaine de Plasturgie (FMP), Nabil Saouaf, qui s'exprime ici en tant que simple citoyen, estime que cette loi est obsolète depuis le premier jour. «Elle fait reposer toute la responsabilité sur les seuls transformateurs, sur un seul maillon de la chaîne de production des sacs en plastique, explique-t-il. Ils risquent 200 000 à 1 million de dirhams d'amende s'ils ne produisent pas des sacs biodégradables ou dégradables.» Une amende qu'aucun industriel n'a jamais payé sans quoi la loi aurait été respectée. 0,01DH de plus par sac Il existe une explication beaucoup plus simple et directe aux réticences des industriels : le coût supplémentaire engendré par la technologie dégradante. « Un sac coûte 14 centimes en temps normal, il faut ajouter 1 centime pour qu'il soit oxo-biodégradable. C'est un surcoût acceptable pour de grandes sociétés prêtent à investir dans leur image, mais pas pour les épiciers et les marchands dans les kissarias», estime Edwin Suisman. Ces derniers se fournissent au sein du secteur informel : un tiers du marché des sacs en plastiques. «Au moment où la loi était en discussion, une étude d'expertise a été réalisée par le ministère de l'Industrie : si le gouvernement voulait mettre en place une telle loi, il devait lutter contre le secteur informel, reconnaît Nabil Saouaf, il ne l'a pas fait.» «Ce secteur concurrence en permanence les sociétés qui se donnent la peine de se déclarer légalement. Il les talonne et leur interdit tout investissement, les maintient dans une forme de moins disance», explique Edwin Sluisman. Bonus malus écolo Pour conserver la loi en l'état, puisque sa société est la première à en bénéficier, le DG de Greenberry propose de lutter enfin contre les sociétés non déclarées «que tout le monde connaît», selon lui et de «surtaxer les sacs qui ne respectent pas la loi de 10% ou 20%, pour que le surcoût de 10% attaché à la technologie des sacs oxo-biodégradables ne pénalisent pas les industriels qui adoptent les bonnes pratiques.» Pour le FMP cette loi obsolète doit être totalement oubliée. A l'adjonction d'un oxydant au polyéthylène, Nabil Saouaf, préfère le recyclage des sacs en plastique. « Le Maroc a désormais une vision stratégique globale nouvelle qui intègre le recyclage des matières plastiques. Un arsenal de lois et de règles est en préparation», assure-t-il. «Le sac plastique ne sera jamais recyclable, économiquement son poids est beaucoup trop faible pour justifier qu'on le ramasse pour le valoriser», insiste Edwin Sluisman. «Il faut imaginer un système où la ménagère marocaine stocke tous ses sacs en plastique et les revende ensuite à son épicier pour qu'ils passent dans une filière de recyclage», répond Nabil Saouaf. Recycler au Maroc La filière n'existe pas aujourd'hui, au Maroc, et ce système semble peu applicable à la réalité du royaume. «Ce que dépense les pays européens dans la gestion des déchets ménagers est colossal par rapport au budget marocain, de 1,5 milliards de dirhams par an. Le Maroc n'a tout simplement pas les moyens d'avoir une gestion idéale des déchets or les sacs oxo-biodégradable offrent une solution pragmatique, simple et à moindre coût du problème des sacs plastiques, en attendant que le tri sélectif se mette en place au Maroc», argumente Ewin Sluisman. «Cette solution entraîne une perte de valeur, alors que le recyclage en crée», insiste Nabil Saouaf. «Je ne pense pas que toutes les solutions pratiques soient les bonnes, quand on ne connait pas leurs conséquences. L'étude d'impact que la FMP souhaitait au moment où la loi était en préparation n'a jamais été réalisée», explique-t-il. Pour Edwin Sluisman, ces sacs, détruits progressivement en pleine nature ne représentent aucun danger. «L'additif accélère simplement le processus naturel de vieillissement du sac. Son plastique, du polyéthylène, n'est jamais que composé de carbone et d'hydrogène, des molécules qui sont parfaitement ingérables par les micro-organismes lorsque les morceaux de plastiques sont suffisamment fragmentés», explique-t-il.