«Stolen», film-documentaire tourné dans les camps de Tindouf, en Algérie, a été diffusé mardi soir par la chaîne de télévision américaine World Channel. Sa diffusion était initialement prévue pour le 5 février. Le report serait dû à la polémique qui entoure le documentaire depuis sa réalisation et notamment aux pressions du Polisario et de l'Algérie pour empêcher sa diffusion, selon les réalisateurs. «Stolen», un film-documentaire sorti en 2009, réalisé par la Bolivienne Violeta Ayala et l'Australien Dan Fallshaw, a été diffusé, dans la soirée du mardi 26 février, par la chaine de télévision américaine World Channel. Le film se concentre sur les conditions de vie des refugiés vivant dans les camps de Tindouf, situés à l'extrême pointe sud-ouest de l'Algérie, et affirme que certains d'entre eux sont victimes d' «un esclavage moderne». Le documentaire devait, initialement, être diffusé le 5 février par la même chaine, mais cette dernière a décidé de reporter son passage à la télévision en raison de la polémique qui l'entoure depuis sa première diffusion au Festival du film international de Toronto, en 2009, rapporte le site spécialisé Indiewire.com. «En 2006, nous nous sommes rendus dans les camps de réfugiés sahraouis en Algérie pour faire un film sur l'aspect humain de ce conflit de longue date, entre le Maroc et le Polisario concernant le Sahara […]. Nous ne savions pas ce que nous allions découvrir», racontent les réalisateurs du film. «L'Organisation des Nations Unies organise souvent des retrouvailles de familles» sur place. «Nous avons décidé de concentrer le film sur l'une d'entre elles. Nous avons rencontré Fetim, une belle femme noire sahraouie […]. Elle a été la première personne à nous parler sans évoquer la politique.» C'est elle et sa sœur, Leil, qui seront finalement les deux principales figures du documentaire. Esclavage moderne Selon les témoignages de Leil, les camps de Tindouf seraient divisés en deux camps, l'un pour les noirs de peau et l'autre pour les blancs, les «Bayden», expliquent Violeta Ayala et Dan Fallshaw. Les Noirs n'auraient pas les mêmes droits que les Blancs qui, eux, dirigeraient les camps. «Elle nous a dit que les Noirs étaient toujours des esclaves, qu'ils n'avaient pas le droit de décider avec qui ils allaient se marier, que leurs enfants pouvaient être enlevés et qu'ils n'avaient pas non plus de pouvoir sur leur destin». «Le Polisario qui gère les camps a découvert que nous avions appris pour les pratiques d'esclavage. Nous avons décidé de cacher les images qu'on avait récolté pour protéger les 'Noirs', et aussi pour faire notre film. Les autorités du Polisario nous ont alors placés sous détention. C'est à partir de ce moment là que le Polisario a lancé sa campagne pour nous discréditer», affirment-ils. «Sans savoir ce que nous avions tourné avec la caméra, ils ont dit à l'ONU que nous avions payé des gens pour qu'ils jouent des scènes d'esclavage […] Nous avons été accusés de travailler pour le gouvernement marocain, mais «Stolen» montre également que la partie contrôlée par les autorités marocaines est également concernée par ces pratiques». «Le Polisario et le gouvernement marocain voulaient nous empêcher de faire «Stolen» pour la simple raison que le film traite de l'esclavage, une violation des droits de l'Homme qu'ils préfèrent cacher», déplorent les auteurs du film. Pressions de l'Algérie ? Selon les deux réalisateurs, «il y a eu des pressions significatives sur Public Broadcasting Service (PBS) [un réseau de télévision public à but non lucratif, ndlr] de la part de lobbyistes aux Etats-Unis, payés par le gouvernement algérien qui soutient le Polisario.» Parmi ces lobbyistes, figurerait selon Indie Wire le cabinet Foley Hoag. Ce dernier aurait empoché «la plus grande part du million de dollars, dépensé chaque année par le gouvernement algérien auprès des lobbyistes américains», rapporte la même source. Les accusations des deux réalisateurs ont immédiatement été reprises et déformées par l'agence de presse marocaine MAP. A lire sa dépèche, on comprend que c'est le cabinet Foley Hoag qui reçoit, à lui seul, un million de dollars par an pour défendre les intérêts du Polisario, en réalité il s'agirait, selon les déclarations des deux réalisateurs d'un ensemble de plusieurs cabinets de lobbying. Une information réaliste bien que non prouvée. En juillet 2009, Africanintelligence avançait le chiffre de 210 000 dollars déboursés par l'Algérie auprès du cabinet Foley Hoag. Côté marocain, si aucune somme n'est connue, nul doute que le royame utilise lui aussi les armes du lobbying pour faire avancer sa cause à l'ONU. Le gouvernement algérien n'a pas encore réagi à ces accusations. Le Maroc, non plus. Extrait de documentaire Stolen