Président du jury de la 19e édition du Festival international du film de Marrakech (FIFM), tenu en ce moment dans la ville ocre, le réalisateur italien Paolo Sorrentino a plaidé pour rendre aux cinéma leur rayonnement à travers une dynamique des cinéastes et des distributeurs. Après deux ans de crise sanitaire, il estime que la survie des salles obscures a plus que jamais besoin des réalisateurs. Le cinéaste italien Paolo Sorrentino a estimé, ce samedi, que la résilience du septième art à travers le monde, après la crise de la Covid-19, passera par les choix des réalisateurs à opter pour une distribution dans les cinémas plus que les plateformes de streaming. Celui qui préside le jury du Festival international du film de Marrakech (FIFM), tenu du 11 au 19 novembre, a déclaré en conférence de presse que le secteur vivait encore des temps difficiles, dus aux impacts de la pandémie. En témoignent les nombreuses fermetures des salles obscures dans beaucoup de pays, y compris en Italie. «Il y a quelques années, le défi pour moi était de faire des séries télévisées et je n'ai rien contre les plateformes de streaming, j'ai déjà travaillé avec certaines. Mais vu le contexte actuel, j'aime faire des films pour les grandes salles. Notre devoir est de sauver les cinémas», a souligné le réalisateur de la série à succès «The Young Pope». Membre du jury, la cinéaste marocaine Laïla Marrakchi a souligné que l'engouement des cinéphiles et des professionnels du secteur pour la reprise des activités culturelles était une chance à saisir, afin de réinstaurer une ritualisation du fait de fréquenter les salles de cinéma. «Cela fait chaud au cœur de revoir à nouveau des cinémas pleins, à chaque projection. Je suis très contente de voir cela à chaque fois que j'y vais et c'est très important de maintenir cette chaîne, car le septième art et son accès par les salles permet de créer des moments essentiels, nécessaires de partage, de réflexion, de débat et d'interaction entre les spectateurs, les films et leurs auteurs.» Laïla Marrakchi, réalisatrice Egalement membre du jury de cette édition, l'actrice et réalisatrice libanaise Nadine Labaki a mis en avant non seulement la préservation des cinémas, mais aussi de la nécessité de porter au grand écran de «tous les continents», toutes les réalités et tous les imaginaires, «y compris ceux issus du monde arabe et de l'Afrique». «Pour la pérennité des cinémas et pour pérenniser les publics de ces régions, nous devons montrer tous les films : les créations hollywoodiennes mais aussi montrer celles venues de partout ailleurs», a souligné l'autrice du film à succès «Capharnaüm». FIFM 2022 : Une 19e édition qui fait la part belle au cinéma et à la diversité Visibiliser les vécus d'ici et d'ailleurs Dans ce sens, Laïla Marrakchi a abordé également l'importance que les femmes prennent la caméra, écrivent des scénarios et réalisent des films cinématographiques. «En grandissant au Maroc, j'ai vu qu'il n'y avait pas beaucoup de modèles féminins pour les réalisatrices – Farida Belyazid a qui un hommage est consacré lors de ce FIFM faite partie des rares. Aujourd'hui, je vis entre la France et le Maroc. J'ai tourné deux films au Maroc et je porte la voix des femmes marocaines avec moi. Je porte ce combat partout où je vais en tant que femme marocaine et en tant que cinéaste. Je sens que j'ai intériorisé en moi ce combat et je ne le choisis pas aujourd'hui comme parti pris. Il vient intrinsèquement dans mon processus créatif», a-t-elle indiqué. Egalement membre du jury de cette édition, le réalisateur australien Justin Kurzel a pour sa part exprimé sa joie et sa fierté de revenir au FIFM, dix ans après y avoir obtenu le Prix du jury pour son premier long-métrage, «Les Crimes de Snowtown» (2011). «C'était vraiment important pour ce film, venu d'Australie, d'être exposé dans le cadre d'un tel festival, particulièrement dans cette région du monde. J'ai encore des liens d'amitié avec les personnes que j'ai rencontrées la première fois où je suis venu ici. Nous formons un collectif alors que nous venons chacun d'ailleurs et c'est très important», a-t-il souligné. Pour le cinéaste, «le meilleur cinéma fait comprendre ou dissoudre toute idée préconçue sur quelque chose, sur un lieu ou sur les deux». Cette année, le jury du FIFM est constitué de huit membres : la réalisatrice danoise Susanne Bier, l'acteur et producteur américano-guatémaltèque Oscar Isaac, l'actrice britannique Vanessa Kirby, l'actrice allemande Diane Kruger, le réalisateur australien Justin Kurzel, la réalisatrice et actrice libanaise Nadine Labaki, la réalisatrice marocaine Laïla Marrakchi et l'acteur français Tahar Rahim.