Les équipements de protection individuelle, dont les masques de protection prolifèrent notamment sur les plages d'Agadir. Une étude menée par des chercheurs marocains pointe le manque de sensibilisation et d'éducation environnementale. Au Maroc, les équipements de protection individuelle (EPI) sont devenus l'un des moyens incontournables pour se protéger contre le nouveau coronavirus. Leur utilisation croissante s'avère toutefois source importante de nuisance environnementale. En effet, si plusieurs veillent à s'en débarrasser en les jetant dans des poubelles, d'autres ne se privent pas de les abandonner dans la nature. Que ce soit dans nos rues, nos jardins publics ou même sur nos plages, ces EPI deviennent aussi visibles que les sacs en plastique. Pour alerter sur la pollution par les EPI associée au Covid-19, des chercheurs marocains ont conduit une étude sur cette problématique dans le milieu marin. Mohamed Ben Haddada, Mohamed Rida Abelouaha, Sara Hajjia et Aicha Ait Allaa de la Faculté des sciences de l'Université Ibn Zohr d'Agadir ainsi que Gabriel E. De-la-Torreb de l'Université San Ignacio de Loyola de Lima (Pérou) se sont ainsi intéressés à l'abondance, les caractéristiques et la densité des équipements de protection individuelle sur les plages d'Agadir. Ils ont également évalué l'influence des mesures de confinement (fermeture et ouverture des plages publiques), de la zone de plage (zone intertidale et supralittorale) et de l'activité (baignade, surf ou pêche). Pour ce faire, 11 plages d'Agadir ont été surveillées selon des protocoles standardisés pendant quatre mois consécutifs. L'étude a été menée sur deux périodes consécutives de 2021, y compris la période de restrictions sanitaires, lorsque les plages étaient encore fermées au public (1 à 8 semaines du 1er février au 30 mars), et après lorsque les plages ont rouvert (9 –16 semaines du 01 avril au 30 mai). Les plages d'Agadir concernées par l'étude. / DR Ainsi, le suivi des EPI a été réalisé pendant 16 semaines. Au total, 689 articles ont été trouvés. Ces EPI étaient dominés par les masques faciaux (96,8%), suivis des écrans faciaux et des gants. Les masques faciaux étaient principalement composés de masques chirurgicaux à usage unique (98,4%) et le reste était en tissu. L'étude signale «une augmentation notoire des EPI observée pendant la période allant de la 9e à la 16e semaine d'échantillonnage», soit la période correspondant à l'après confinement. «En effet, 95,5% de tous les EPI identifiés ont été retrouvés après le confinement», assure-t-on. Les citoyens et les autorités locales pointés du doigt Si elle reconnaît que la fréquentation élevée des amateurs de plages fait que celle-ci reste plus polluée comparée aux sites où le surf et la pêche sont les activités dominantes, l'étude souligne, plus loin, que la distinction entre les zones côtières lors de l'échantillonnage a permis de découvrir que le nombre d'EPI dans la zone supralittorale est «significativement plus élevé» que le nombre échantillonné dans la zone intertidale. «Cela suggère que la majorité des articles ont été apportés et laissés par des baigneurs qui s'assoient la plupart du temps dans la zone supralittorale pour rester à distance de la ligne de marée haute» Un comportement qui reste «probablement dû à une mauvaise éducation environnementale et à un manque de sensibilisation», estiment ses chercheurs. Un échantillon des masques collectés des plages d'Agadir. / DR Ceux-ci rappellent que ces déchets peuvent présenter un danger pour l'environnement et la faune et pourraient même «être un vecteur de transmissions zoonotiques». «Le fait que la pollution plastique ait été exacerbée avec l'introduction d'EPI met en perspective la mauvaise gestion des déchets, le manque et la limitation des idées innovantes, et le faible degré de conscience des baigneurs», fustigent-ils. «Compte tenu des mauvaises conditions de gestion des déchets solides et du manque de sensibilisation à l'environnement, l'élimination incorrecte de ces articles à usage unique dans l'environnement est devenue incontrôlable (…) La situation nécessite donc une surveillance immédiate des déchets marins et une sanction en cas d'élimination incorrecte des EPI.» Extrait de l'étude Pour les chercheurs, la situation actuelle «nécessite également une extension des opérations de nettoyage dans le temps et dans l'espace pour une meilleure gestion des déchets sur les plages d'Agadir». Ils plaident aussi pour «des mesures à long terme» qui doivent aborder ce problème par le biais de campagnes d'éducation, «compte tenu du manque de sensibilisation environnementale de la population à la pollution plastique». L'étude recommande aussi des alternatives supplémentaires pour atténuer la durée de vie et réduire les risques, en suggérant d'inclure des matériaux biodégradables et respectueux de l'environnement dans la fabrication des EPI ou encore d'encourager l'utilisation de masques réutilisables.