Le président iranien Hassan Rohani a accusé samedi Israël d'avoir agi comme « mercenaire » des Etats-Unis en assassinant vendredi un scientifique de haut rang dans le programme nucléaire de Téhéran. Rohani a déclaré dans un discours télévisé que l'Iran usera de représailles au moment opportun, ce que le guide suprême iranien, Ali Khamenei, a réitéré sur Twitter. Une fois de plus, les mains impitoyables de l'arrogance mondiale, avec le régime sioniste usurpateur comme mercenaire, sont souillées du sang d'un fils de cette nation, a dénoncé M. Rohani dans un communiqué publié sur son site officiel, faisant référence à l'assassinat de Mohsen Fakhrizadeh. L'Iran utilise en général l'expression arrogance mondiale pour désigner les Etats-Unis. Mohsen Fakhrizadeh, 59 ans, a succombé à ses blessures après une attaque menée contre sa voiture avec un véhicule chargé d'explosifs et des tirs d'assaillants, pris à partie par ses gardes du corps, a annoncé vendredi le ministère de la Défense. L'équipe médicale n'a malheureusement pas réussi à le ranimer, et ce dirigeant et scientifique a accédé il y a quelques minutes au statut de martyr après des années d'efforts et de lutte, a déclaré l'état-major iranien dans un communiqué confirmant la mort de Mohsen Fakhrizadeh. Le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, avait accusé dès vendredi Israël d'avoir joué un rôle dans cet acte terroriste. M. Rohani s'est engagé à ce que son décès ne perturbe pas les progrès scientifiques de son pays, et affirmé que cet assassinat était dû à la faiblesse et à l'incapacité des ennemis de Téhéran d'empêcher leur développement. Il a également offert ses condoléances à la communauté scientifique et au peuple révolutionnaire d'Iran. Dans une intervention télévisée, il a ensuite accusé l'Etat hébreu de vouloir créer le chaos mais ils devraient savoir que nous les avons démasqués et qu'ils ne réussiront pas. La nation iranienne est trop intelligente pour tomber dans le piège de la conspiration mise en place par les Sionistes, a-t-il lancé. Le ministre de la Défense Amir Hatami a relevé à la télévision que Fakhrizadeh avait eu un rôle marquant dans les innovations de défense. Il gérait la défense nucléaire et faisait un travail considérable, a-t-il ajouté, sans autre précision. Le département d'Etat américain avait indiqué en 2008 que Fakhrizadeh menait des activités et des transactions contribuant au développement du programme nucléaire de l'Iran. À deux mois de la fin de son mandat, le président Donald Trump a sondé de hauts responsables américains sur la possibilité d'agir contre un site nucléaire iranien, affirmait le 17 novembre le quotidien américain New York Times selon lequel ils l'en avaient dissuadé. Cet assassinat intervient moins de deux mois avant l'investiture du démocrate Joe Biden à la présidence des Etats-Unis. Il entend changer de posture vis-à-vis de l'Iran après les quatre années de présidence Trump, qui s'est retiré en 2018 de l'accord sur le programme nucléaire iranien signé trois ans plus tôt. Les Etats-Unis, dans le cadre de leur politique de pression maximale, ont ensuite rétabli puis durci les sanctions contre l'Iran. Chef du département recherche et innovation au ministère de la Défense, Mohsen Fakhrizadeh était un personnage clé dans la sphère militaire et industrielle iranienne. Il avait déjà été qualifié par le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, de père du programme iranien d'armement nucléaire. Mohsen Fakhrizadeh était l'unique scientifique iranien qui était personnellement nommé dans l'évaluation finale du programme nucléaire iranien que l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a remise en 2015. Le scientifique de haut niveau y était notamment décrit comme l'un des maîtres d'œuvre du plan AMAD amorcé au début des années 2000 par l'Iran pour développer en secret des armes nucléaires. Selon le gouvernement israélien, bien que le plan AMAD ait été abandonné en 2003, Mohsen Fakhrizadeh continuait de travailler sur des projets spéciaux pour le compte du ministère iranien de la Défense. Dans un discours en 2018, où il affirmait détenir une partie des archives d'un projet iranien d'acquisition d'armes nucléaires, M. Nétanyahou déclarait : Souvenez-vous de ce nom, Fakhrizadeh. En 2008, le département d'Etat américain avait notamment indiqué que M. Fakhrizadeh menait des activités et des transactions contribuant au développement du programme nucléaire de l'Iran. L'une des rares réactions internationales à l'assassinat du scientifique iranien est venue de l'ancien patron de la CIA, John Brennan, qui a parlé d'un acte criminel et extrêmement dangereux, qui risque d'entraîner des représailles létales et une nouvelle phase de conflit régional. Un tel acte de terrorisme étatique constituerait une violation flagrante du droit international et encouragerait davantage de gouvernements à mener des attaques meurtrières contre des responsables étrangers, a-t-il estimé. M. Brennan a également exhorté l'Iran à résister à l'envie d'exercer des représailles et d'attendre le retour de dirigeants américains responsables sur la scène internationale. Depuis la bande de Gaza, le mouvement Hamas a condamné cet assassinat qui intervient sur fond de menaces persistantes américaines et sionistes à l'encontre de la République islamique d'Iran. Le New York Times a indiqué qu'un responsable américain et deux responsables du renseignement israélien avaient confirmé qu'Israël était à l'origine de l'attaque, sans autre détail. Les autorités israéliennes ont refusé de commenter. Au siège new-yorkais des Nations unies, le secrétaire général Antonio Guterres a lancé un appel à la retenue et à la nécessité d'éviter toute action qui pourrait conduire à une escalade des tensions dans la région, a signalé son porte-parole. Il y a des indications sérieuses d'une responsabilité israélienne dans l'assassinat du scientifique iranien et l'Iran se réserve le droit de se défendre, a déclaré le pays dans une lettre envoyée vendredi au secrétaire général et au Conseil de sécurité des Nations unies. L'Iran attend par ailleurs d'Antonio Guterres qu'il condamne fermement cet assassinat et qu'il prenne les mesures nécessaires à l'encontre de ses auteurs, a écrit le représentant de l'Iran aux Nations unies, Majid Takht Ravanchi, dans la lettre. Les capitales étrangères sont pour la plupart restées silencieuses. Donald Trump a retweeté des informations sur l'assassinat du scientifique iranien, mais sans offrir de commentaires. Ni la Maison-Blanche, ni le Pentagone, ni le département d'Etat, ni la CIA, ni l'équipe de transition mise en place par Joe Biden n'ont davantage commenté l'affaire.