Il fallait y penser, oser le faire et se proposer de le dire, et le directeur de Dar al Hadith al Hassani l'a fait... Dans le débat qui anime la société sur la question de l'héritage musulman, il propose une sorte de 3ème voie, appelant les deux camps à se rapprocher, en mettant en avant les points de convergence entre leurs théories, et à discuter ce qui peut l'être. Pour Khamlichi, l'héritage est une sorte de rente qu'il faut « repenser ». Ahmed Khamlichi, connu pour ses positions « avant-gardistes » sur les grands thèmes socio-religieux comme l'avortement, a donc affirmé lors d'une conférence organisée récemment par Damir que les deux camps en opposition sur le point de l'héritage en terre d'islam doivent accepter de discuter. L'un avance la position juridique et axe sur l'égalité entre les sexes, et l'autre camp brandit l'argument religieux et le principe que l'on ne peut interdire ce qui est licite et autoriser ce qui est interdit, en plus de l'interdiction d'interprétation en présence d'un texte explicite. Le directeur de Dar al Hadith al Hassani propose donc que l'un et l'autre camp se rapprochent en usant de l'usage du testament. Pour l'intellectuel, le testament est prohibé en islam à travers le principe de « pas de legs testamentaire en bénéfice d'un héritier ». Cette idée, selon Khamlichi, était née du principe que le testament est fait par celui qui lègue, qu'il peut donc être injuste et qu'il fallait l'en empêcher. Le directeur de Dar al Hadith al Hassani propose en conséquence que le testament puisse prendre appui sur le verset 180 de sourate al Baqara. Que dit ce verset ? « On vous a prescrit, quand la mort est proche de l'un de vous et s'il laisse des biens, de faire un testament en règle en faveur de ses père et mère et de ses plus proches. C'est un devoir pour les pieux ». Pour Khamlichi, il s'agirait dès lors de pouvoir établir un testament pour ses plus proches, comme les personnes à besoins spécifiques. L'orateur a expliqué que cela est déjà fait dans les organismes publics comme la CNSS ou les caisses de retraite qui font bénéficier la veuve de la moitié de la pension de leur époux défunt, en plus des enfants à besoins spécifiques. Pour le verset qui réserve aux hommes le double des parts dédiées aux femmes, Ahmed Khamlichi explique qu'il a été prescrit car à cette époque, les femmes étaient à la charge financière des hommes. Or, dit la coutume religieuse, explique le Pr Kahmlichi, il ne peut y avoir de jugement sans argumentaires. Il demande donc à ceux qui ne veulent pas changer cette règle du double pour les hommes d'apporter leurs arguments, sachant qu'aujourd'hui, il existe plus d'un million de ménages gérés par des femmes seules et dans le reste des familles actuellement au Maroc, les femmes participent le plus souvent aux dépenses. Khamlichi critique aussi les défenseurs de la thèse de l'égalité entre les sexes, récusant le fait que cette idée nous vient de la France, sans que pour autant cela soit effectivement appliqué dans ses lois sur l'héritage. En effet, dit l'orateur, l'usage du testament peut privilégier l'un(e)de ses héritiers sur les autres. Et donc, le modèle français n'est pas le meilleur non plus vu qu'il comporte beaucoup de niches d'inégalités.