Le processus électoral de 2015 prend fin aujourd'hui, avec l'élection des 120 conseillers qui formeront la Chambre du même nom. La composition de la seconde institution législative sera donc connue aujourd'hui. N'ayant pas les mêmes attributions que la Chambre des représentants, elle dispose néanmoins du pouvoir de bloquer les lois et d'interpeller le gouvernement. Explications pour les nuls (et les intéressés). De la constitution 1996 à celle de 2011 Le parlement marocain est constitué de deux Chambres. Cela s'appelle le bicaméralisme, du latin « camera » pour chambre et « bi » pour deux. Il y a la Chambre des représentants, les députés, élus au suffrage universel direct, ils sont 395 ; et il y a aussi la Chambre des conseillers, désignée au suffrage universel indirect, c'est-à-dire par les grands électeurs, autrement dit des gens élus dans d'autres institutions La constitution de 1996 qui avait créé cette Chambre des Conseillers avait prévu 270 élus. Cette institution succédait à l'ancien tiers élu de ce qui était alors le parlement et qui permettait au ministère de l'Intérieur de « contrôler » le gouvernement en faisant basculer les majorités, sachant que ce tiers était désigné d'une manière plutôt… « orientée ». En 1996, le défunt roi Hassan II et son ministre de l'Intérieur avaient concédé l'élection de tous les Représentants au suffrage universel direct mais avaient mis en place une seconde Chambre avec le pouvoir de voter une motion de censure du gouvernement. Ce n'est plus le cas aujourd'hui avec la constitution de 2011, la Chambre des Conseillers pouvant interpeller le gouvernement, mais pas le censurer. La seconde Chambre, version 2011, peut donc « embêter » un gouvernement par l'interpellation, mais ne peut plus le faire tomber. Composition de la Chambre des conseillers La Chambre des Conseillers n'est plus composée de 270 membres – ce qui faisait beaucoup – mais seulement de 120, répartis comme suit : 72 membres élus par les grands électeurs des collectivités territoriales (communes et régions), 20 membres élus par les Chambres professionnelles, 20 membres élus par les représentants des salariés et 8 membres représentants les employeurs, avec la CGEM consacrée comme seule représentante des patrons et de l'entreprise. Les 72 futurs conseillers venant des collectivités territoriales sont répartis comme suit : 24 venant des régions et 48 des conseils communaux. Les nouveaux conseillers communaux ont été élus de la manière suivante, suivant les partis : le parti Authenticité et Modernité (PAM) est arrivé en tête du scrutin avec 6.655 sièges, suivi du Parti de l'Istiqlal avec 5.106 sièges et du Parti Justice et Développement (PJD) avec 5.021 sièges, puis le RNI avec 4.408 élus. Pour les régions, le PJD est en pole position avec 174 sièges, suivi du PAM avec 132 sièges et du Parti de l'Istiqlal avec 119 sièges. Il est donc évident que les partis d'opposition partent avec un avantage certain dans cette élection du 2 octobre, et tout porte à croire qu'ils maintiendront leur majorité actuelle, avec le PAM et l'Istiqlal qui alignent le plus grand nombre de grands électeurs (37% des élus communaux) pour le plus grand collège, celui des collectivités territoriales. Il est à parier que le RNI, toujours aussi inconstant, votera pour l'opposition bien qu'il siège au sein de la majorité gouvernementale, ce qui conforte et confirme que l'opposition aura la majorité… A propos, le président sortant de cette Chambre des conseillers est Mohamed Cheikh Biadillah, ancien SG du PAM, qui rempile pour un autre mandat ; il est possible qu'il reste président. Le PAM est aujourd'hui encore le premier parti au sein de la Chambre, avec 62 élus, l'Istiqlal et le RNI le talonnent avec respectivement 53 et 39 sièges, puis le MP avec 29 et l'USFP avec 21. Le PJD n'a pas de groupe parlementaire au sein de la Chambre des conseillers, et son objectif pour le 2 octobre est de pouvoir en constituer un. Etrangetés et bizarreries de la démocratie marocaine, où le parti qui dirige le gouvernement aspire à avoir, seulement, un groupe parlementaire dans une institution législative. La grande inconnue reste l'élection des patrons. Supposés être politiquement indépendants, puisque venant de la CGEM, une partie d'entre eux est soutenue par des partis politiques, principalement le PAM et l'Istiqlal. Les autres seront très certainement et très activement sollicités par les formations politiques.