Il devient de plus en plus difficile de résister à tous les coups aux facétieux papiers que Mme Charlotte Bozonnet a pris l'habitude de publier sur les colonnes du journal « Le Monde », dès lors qu'il s'agit du Maroc. Tant il est vrai que ce dernier n'a jamais été si fréquemment traité – qu'à Dieu ne plaise ! – que depuis sa reprise en main de la rubrique Maroc dans le quotidien parisien. Et bien évidemment, elle en fait son champ de prédilection, avec cette manie ténue de le couvrir sous l'angle d'un tenace obscurantisme pour ne pas dire noircissement. L'article publié par « Le Monde » dans ses éditions du mardi 3 juillet, signé Charlotte Bozonnet, ne peut pas ne pas nous interpeller, à tous points de vue : professionnel, déontologique, éthique et humain... Car, rien ne va plus au Maroc, le soleil ne se lève pas, le pays est une prison, pire qu'une Kolyma, encadré, couvert de miradors et de barbelés, hanté jour et nuit par une police, un Ordre que la journaliste compare sans scrupules aux régimes de terreur...La haine du Maroc, excepté le Rif, est devenue son bréviaire, et jamais scrupuleux examen de conscience ne la sortira de son trouble réfractaire qui ne lui fait voir que la dérisoire partie des choses. un prisme désenchanté Tout chez elle est sujet à cette opération devenue rituelle de désinformation systématique. « L'envoyée spéciale du Monde » – qui filmerait ses interlocuteurs par les lunettes Google dissimulées quand elle s'entretient avec eux – a fait sienne cette obsession qui nous rappelle bel et bien un certain Paul Balta dans les années 80, ou encore un Jean-Pierre Tuquoi dans les années 90, le premier suppôt du pouvoir de Boumediene et le second faisant dans la triste passion des cercles parisiens hostiles exprimant leur allégeance à une vieille ganache appelée Gilles Perrault. L'antimarocanisme aidant , animés par un même ressentiment, ils ne voyaient en l'Etat marocain et en la Monarchie qu'un même système répressif et archaïque voués à la disparition... Ils durent en déchanter pourtant... Est-il possible qu'une Charlotte Bozonnet ne perçoive l'évolution du Maroc qu'à travers un prisme désenchanté, avec l'irascible postulat que tout est « noir », au mieux relevant d'un clair-obscur, au pire en effet d'une machine répressive. Jamais autant de subjectivité n'a été déversée sur les colonnes du journal fondé en 1944 par Hubert Beuve-Méry , lui qui, à défaut d'objectivité qui n'existe pas en matière de presse , exigeait toutefois de ses collaborateurs l'exercice de l'honnêteté tout simplement. Sur la dizaine de « papiers » consacrés au Maroc par Mme Bonzonnet, seule « voix » autorisée à rendre compte des événements sur ce pays, ce dernier n'y trouve nulle grâce, la partialité restant le fil conducteur et la mauvaise foi son ressort. L'Alpha et Omega du métier, notre « fichu métier » disait Beuve-Méry est ce principe sacro-saint de recoupement de l'information. Mme Bonzonnet y passe outre. Pis : elle le viole, et de la règle déontologique, cette Charte du métier qui avait hissé « Le Monde » au respectable panthéon, elle n'en a cure. Elle ne recueille et ne cite que les « sources » – les siennes – qui confortent son parti pris et ses petites « analyses » précuites à Paris, l'objectif étant arrivant sur place de les corroborer, sans la moindre précaution déontologique d'usage, quitte à nous faire prendre des vessies pour des lanternes. « Le logiciel répressif du pouvoir » Comme à son accoutumée , Charlotte Bozonnet se rend au Maroc, en « reporter » vérifier ses préjugés, un coup de fil par-ci, un autre par-là auprès des mêmes et inamovibles « sources » , elle tricote ses papiers sans prendre la température en face, auprès de celles et ceux qui sont autant autorisés à l'informer, à la « sourcer » et la « documenter » que ses propres réseaux unilatéraux. « Le verdict implacable à l'encontre du Hirak est symptomatique d'un pouvoir marocain qui s'est révélé incapable d'abandonner le logiciel répressif des dernières décennies » ! Voilà ce qu'on appelle l'incipit ou l'attaque d'un papier incitatif et conditionnel. Lancée à la cantonade, elle relève de ce qu'on appelle un jugement de valeur ni plus, ni moins qui nous donne d'ores et déjà l'avant-gout de la suite. Ce n'est pas « le » mais « UN » pouvoir marocain... écrit-elle ! S'ensuit dans la même veine cette formulation gratuite décrivant un « pouvoir dans l'incapacité d'abandonner le logiciel répressif des dernières décennies ». Elle nous pendait au nez, en effet, car non seulement elle est erronée, mais elle est tout bonnement fausse. Combien de décennies ? Deux, trois, quatre, cinq ?….Le Maroc n'a que soixante ans, prétendre que toutes ces années sont marquées par le seul « logiciel répressif », c'est preuve d'un lamentable, soutenir que la répression est inscrite sur le fronton des règnes et de l'Etat , c'est évidemment faire preuve d'une ignorance époustouflante. Elle enterre les combats démocratiques, l'évolution en profondeur des droits de l'Homme, la Moudawana, l'Instance d'Equité et de Réconciliation, la création d'un ministère des droits de l'Homme que dirigea un Rifain, hiraki intempestif en la personne de Mohamed Ziane, aujourd'hui défenseur de Zefzafi et de tous « les opprimés du monde entier », les avancées politiques, institutionnelles, économiques, sociales et diplomatiques pour ne citer que ces exemples. Et j'en passe... Cette dame, dite journaliste du « Monde » a donc décidé de regarder le Maroc par la petite lucarne du Hirak, elle parle et écrit le même langage que celui de ses membres , dont elle reproduit quasiment les mêmes stéréotypes comme celui de « quadrillage » et « d'occupation militaire » d'Al Hoceima, bien sûr cher à tous ceux qui – la cohorte des idéologues en tête – confondent présence des forces de l'ordre pour assurer la sécurité et protéger la loi avec les périphrases coloniales. « Les enfants du Rif... » Tout cela sur les colonnes du « Monde », cette ubuesque méconnaissance des règles de droit de notre pays ! Comment peut-on à ce point insulter la justice marocaine, écrire en reprenant un confrère marocain que « les récentes condamnations dans le procès du Rif apparaissent comme un triste pas ( recul) en arrière... », faire fi de la loi, de la Constitution, du code de procédure pénale, les mépriser et les piétiner parce que la complaisance – en principe abhorrée en matière de journalisme – vous aveugle ? Comment dire une chose et son contraire dans la même phrase : « Quelque 300 années de prison cumulées pour les 53 « enfants du Rif », considérés comme les meneurs du Hirak, ce vaste mouvement de contestation sociale qui a agité le Maroc en 2016-2017... ». Les « enfants du Rif », circonstance atténuante pour des jeunes qui, encore une fois les vidéos en témoignent, ont tout saccagé, tout brûlé et ont attenté à la vie des policiers, agressés, pris d'assaut et qui désespérés ont frôlé la mort avant d'en réchapper miraculeusement. Le Président du Ministère public, Mohamed Abdanabaoui, dont la rigueur intellectuelle ne fait aucun doute, a lui-même rappelé cette scène tristement hollywoodienne où les manifestants d'al-Hoceima – les « enfants du Rif » dit Mme Bozonnet – ont bloqué l'ambulance venue secourir les policiers grimpant les murs pour échapper à l'incendie, comment surtout et consciemment, ils ont chassé cette ambulance... Quant aux spectaculaires agissements de Zefzafi leur leader, elle omet d'écrire qu'il a violé un lieu sacré de l'Islam, la mosquée en pleine prière collective de vendredi...Et puis les délits divers et multiples qui ont ponctué le mois de Ramadan 2017, les harangues et les provocations délibérées, l'acharnement sur les corps sécuritaires, les accointances avec les mouvements extérieurs, le mépris ahurissant pour le drapeau national et...j'en passe encore ! Les faits reprochés aux provocateurs du Hirak répondent à des crimes répréhensibles par le Code pénal au plus haut de l'échelle de l'acte délictueux : atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat et à la stabilité nationale. Dans aucun pays, la loi transige avec ces délits criminels. Tout ce que croient nous révéler les gauchistes attardés dénote purement et simplement d'une dérive malveillante. Ne faut-il donc pas s'inquiéter de cette inclinaison morbide à vouloir travestir la vérité par des intellectuels et des journalistes en mal de sensationnalisme qui, au motif douteux de défendre le Hirak, s'acharnent aussi à violer le texte de loi voire à s'imaginer le changer pour leur simple et illusoire caprice ? Comme si l'on était dans une république bananière... « Le pouvoir marocain n'est jamais parvenu à répondre aux demandes de démocratie et de justice sociale, individuelles ou collectives, autrement que par une approche sécuritaire » ! On tombe à la renverse devant un tel soliloque, d'autant plus sommaire qu'il est la grammaire de tous les rhéteurs frustrés qui critiquent le Maroc. Cette phrase à l'emporte-pièce n'est ni une information, ni le soupçon d'analyse d'un contexte. Ali Anouzla du site Lakome, Mâati Monjib et pour un peu, elle eût pu nous citer Ali M'Rabet, trois cas, bien sûr « victimes de la répression du pouvoir », sauf que l'un, l'autre et le troisième, ayant maille à partir avec la justice, savent en leur for intérieur les motifs de leurs démêlés avec celle-ci. Ou encore à cette Catherine Graciet, folliculaire de son état, déguisée en prétendue journaliste d'investigation. Le catalogue de cas, objectifs ou subjectifs, que dresse l'envoyée très spéciale du « Monde » se nourrit de ragots, de colportages jamais vérifiés qui ne lui font nullement honneur. Ils participent de ces campagnes programmées, et l'amateurisme aidant, d'une volonté de travestir la vérité, quitte à remettre en cause cette réputation d'impartialité si chère au fondateur du « quotidien de la rue des Italiens... » qui, à coup sûr, se retournerait dans sa tombe face à ces infamies ressassées... Victime de sa propre cautèle Attachée apparemment à son bis repetita placent, Mme Bozonnet n'hésite pas à nous renvoyer encore à ses obsessions ahurissantes et ne croit pas si bien dire : « ...les années suivantes furent marquées par des reculs successifs... ». Autrement dit, toutes ces années d'efforts, marquées au sceau du progrès continu en matière économique, institutionnelle, par les multiples réalisations pour asseoir une transition démocratique, saluées par tous, y compris par l'Union européenne dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle n'est pas tendre à l'égard du Royaume, le retour de ce dernier au sein de l'Union africaine, la réforme religieuse, la solidarité élevée au rang d'une exigence éthique, l'intégration dans les normes de plus de 50.000 Subsahariens, le combat pour un nouvel ordre mondial, ...tout cet horizon est, étrangement, mystérieusement rayé d'un trait de main en une phrase inquisitoriale, réductrice, tendancieuse comme tout l'article, spécieuse, sans queue ni tête, en somme victime de la cautèle qui caractérise le style d'écriture des cercles d'amis que Mme Bozonnet consulte. Elle nous refile de plus en plus sa propre « prophylaxie » moralisante, contemptrice sous un regard qui a oublié que la vérité, c'est d'abord un exercice sur soi-même et une hygiène éthique.