Pour la première fois, les agrumes marocains ont pris la route du Japon, marquant un tournant dans la stratégie d'exportation du Royaume. Derrière ce geste symbolique, une ambition claire : élargir les horizons commerciaux, gagner de nouveaux marchés et affirmer la qualité du terroir marocain à l'international. Depuis des années, le Maroc s'appuie fortement sur l'Union européenne et la Russie pour écouler ses produits agricoles, notamment ses agrumes. Mais aujourd'hui, face à une conjoncture mondiale changeante et des marchés de plus en plus compétitifs, le Royaume opère un virage important : il veut diversifier ses partenaires commerciaux et s'ouvrir à de nouveaux horizons. L'objectif est clair : atteindre, d'ici 2030, le cap symbolique d'un million de tonnes d'agrumes exportées, contre 630 000 tonnes en 2020. Ce cap a été fixé dans le contrat-programme 2021-2030 signé entre l'Etat marocain et la fédération interprofessionnelle « Maroc-Citrus », comme le rapporte le quotidien Les Inspirations Eco. Dans cette dynamique d'ouverture, le Japon s'impose comme une destination de choix. Ce pays, réputé pour ses normes sanitaires très strictes et son exigence de qualité, représente à la fois un défi et une opportunité de taille. Il attire naturellement les ambitions marocaines, en quête de nouveaux débouchés pour leurs produits frais premium. Et cette ambition s'est récemment concrétisée. Le 26 février 2025, un moment symbolique est venu marquer cette nouvelle ère : un premier conteneur d'agrumes marocains a pris la route du Japon. Une expédition test, attendue avec impatience par les exportateurs et les autorités. Bonne nouvelle : les produits ont passé haut la main tous les contrôles sanitaires imposés par les autorités japonaises. Une réussite qui ouvre officiellement la porte à ce marché prestigieux. Lire aussi : Marrakech accueillera le 1er congrès national des agrumes Pour capitaliser sur cet élan, Morocco Foodex — l'organisme public chargé de promouvoir les exportations agroalimentaires — a récemment conduit une importante mission économique à Tokyo. Accompagnée de professionnels du secteur, d'exportateurs et de représentants institutionnels, la délégation marocaine a entamé des discussions avec les principaux acteurs de l'importation japonaise. Objectif : poser les bases d'un partenariat durable. En parallèle, Morocco Foodex a lancé une campagne de communication sur mesure pour séduire les consommateurs japonais et valoriser l'image des agrumes marocains. Cette opération, pilotée par l'agence K Events pour un budget de 3,2 millions de dirhams, inclut aussi bien des rencontres professionnelles que des actions médias ciblées. Une façon de raconter, au Japon, l'histoire et le savoir-faire marocain autour de ces fruits savoureux. Mais cette ouverture ne s'est pas faite du jour au lendemain. En réalité, les démarches ont commencé dès 2022. Cette année-là, un dialogue technique a été noué avec le ministère japonais de l'Agriculture, des Forêts et de la Pêche (MAFF). Puis, en mai, une délégation d'experts phytosanitaires japonais a été reçue au Maroc. L'Office National de Sécurité Sanitaire des Produits Alimentaires (ONSSA) les a accompagnés pour auditer le système marocain, visiter les vergers dans les régions du Souss-Massa et de l'Oriental, et inspecter les stations de conditionnement et les procédures de certification. Le but : prouver que le Maroc est capable de répondre aux standards exigeants du Japon. Et il l'a fait. Derrière ce succès, c'est toute une stratégie nationale qui se dessine. Le Maroc ne veut plus se contenter des marchés traditionnels. Il regarde vers l'Asie, vers d'autres continents, et veut hisser ses produits agricoles à la hauteur des meilleurs au monde. Si les échanges avec le Japon restent encore modestes, ce premier pas pourrait ouvrir la voie à d'autres produits marocains : fruits, légumes, produits transformés... Ce que montre cette opération, c'est aussi une volonté de raconter une autre histoire de l'agriculture marocaine : plus audacieuse, plus diversifiée, plus connectée au monde. Une agriculture tournée vers l'avenir, qui veut séduire les marchés les plus exigeants, sans rien renier de son authenticité. Et dans cette aventure, les agrumes ne sont qu'un début.