Le dernier Global Banking Annual Review de McKinsey met en évidence des performances divergentes pour les banques après une année tumultueuse. Ainsi, plus de la moitié des banques à travers le monde sont aux prises avec une faible rentabilité et des perspectives de croissance modérées, et ce malgré la solidité de leur base de capital et la forte croissance de leurs marges. McKinsey vient de publier aujourd'hui son rapport annuel sur la situation du secteur. Ce rapport offre un regard et une perspective sur le secteur bancaire qui évolue actuellement au sein d'un environnement très volatile. Cette année a permis d'enregistrer de grands changements au sein du secteur bancaire mondial. Ainsi, les banques ont certes l'opportunité de connaitre des marges plus élevées et de pouvoir tirer profit de l'essor de la fintech), en revanche elles doivent faire face à la volatilité macroéconomique. Les banques doivent réussir à contrer un double défi : celui de se maintenir dans une logique de résilience à court terme, tout en parvenant à accélérer la transformation de leur modèle. Parallèlement, la divergence de performance entre les banques leaders et les autres continue de s'accentuer. Malgré des marges plus élevées dues à la hausse des taux d'intérêt et à une position en capital beaucoup plus solide, plus de la moitié des banques du monde continuent à maintenir leur rentabilité et un rendement en capitaux propres inférieur au coût du capital. Le rapport permet d'examiner en profondeur les stratégies qui ont permis à certains acteurs de se hisser au-dessus de la mêlée et de surperformer. Le rapport revient également sur l'importance de la finance durable. Aujourd'hui, les banques se trouvent à l'aube d'une « nouvelle ère » : elles sont tenues de financer non seulement les énergies propres, mais aussi un large éventail de projets transformationnels à faible émission de carbone au sein de l'ensemble des secteurs industriels. Les investissements en vue d'une transition vers la neutralité carbone pourraient à eux seuls représenter un futur potentiel de revenus pour les banques estimé à au moins 100 milliards de dollars par an d'ici 2030. Qu'est-ce que de tels changements représentent pour les banques africaines ? À l'instar des autres banques à l'international, les banques africaines ont connu une forte reprise : elles ont renoué avec la rentabilité avec des ROE moyens en hausse qui passent de 12 % en 2020 à 15 % en 2022. Cela pourrait signifier des ROE relativement stables pour les banques africaines au cours des 5 prochaines années, malgré une persistance éventuelle des chocs macroéconomiques mondiaux. Mais il existe également une variance importante sur le continent, avec notamment certaines banques au Nigeria et au Kenya, en particulier, qui font appel à des ratios price to book (cours vs. valeur comptable) bien inférieurs à 1. Au Maroc, le price to book se situe dans la fourchette haute et se négocie entre 1,3 et 1,6, tandis qu'en Afrique du Sud il se situe parmi les plus élevés du monde (il dépasse largement 2 pour la moyenne des banques). "Cette hausse de la rentabilité donne aux institutions financières africaines le souffle nécessaire pour améliorer leur résilience à court terme, mais aussi pour continuer à investir dans la technologie et de favoriser la croissance," a déclaré François Jurd de Girancourt, directeur associé du bureau de McKinsey à Casablanca, et responsable du pôle de compétence institutions financières du cabinet en Afrique. L'Afrique pourrait être l'une des régions à la croissance la plus rapide en termes de revenus bancaires à l'échelle mondiale (6-7 % en monnaie locale) en 2022, la croissance étant menée notamment par l'Egypte (20 %) et l'Afrique de l'Ouest (7 %) avec un pool de revenus bancaires de ~100 milliards de dollars. Le tableau est un peu plus sombre mais reste très positif si l'on tient compte de la dépréciation des devises. Cette croissance est soutenue par une forte pénétration des services bancaires et par la hausse des taux d'intérêt, à quoi s'ajoutent de nouvelles opportunités de paiement et l'arrivée de la banque transactionnelle. L'innovation est aidée par les investissements opérés par les banques dans le domaine de la technologie et l'explosion remarquable de l'activité fintech au niveau du continent. "Alors que la pénétration de la fintech s'accélère sur le continent africain, le Maroc est l'un des pays susceptibles de voir un rattrapage. Le Royaume dispose d'un système bancaire traditionnel mature, avec toutefois une pénétration relativement faible pour le mobile money. Le pays connait en revanche une croissance des fintechs différente de celle des autres pays Africains. Au Maroc, les fintechs recherchent de plus en plus d'opportunités au sein de domaines spécifiques, parmi lesquels les paiements, les services aux PME et les services aux entreprises en partenariat avec les banques », a ajouté Jurd de Girancourt. À l'instar du reste de l'Afrique et du monde, la finance durable au Maroc rentre également dans sa « prochaine ère » – passant d'une concentration sur la question des énergies renouvelables à un ensemble plus large en matière de transition énergétique. Les efforts de l'Afrique pour naviguer dans la transition énergétique et s'adapter au changement climatique seront probablement soutenus par la demande des investisseurs pour les « sustainibility-linked bonds », lesquels sont passés de 2 % en 2017 à ~8 % en 2022 (1,7 milliard de dollars d'obligations sustainability-linked émises). Enfin, il ne faut guère oublier que le financement des efforts pour le climat nécessitera des définitions plus claires et de meilleures mesures. Il existe un certain nombre d'opportunités dans les domaines de la banque de financement et d'investissement, de la banque des PMEs, de la banque de détail et de la gestion de patrimoine et d'actifs.