Le crowdfunding (financement collaboratif) pourrait constituer un des nouveaux modes de financement de la recherche scientifique au Maroc, a affirmé, samedi, le Trésorier Général du Royaume, Noureddine Bensouda. « Il existe peut-être aujourd'hui de nouvelles pistes à explorer, de nouveaux modes de financement qu'il serait utile de mettre à contribution. Le crowdfunding en fait certainement partie. Des plateformes de crowdfunding pourraient, ainsi, être dédiées au financement de la recherche, à l'image de celles qui existent déjà dans le domaine de la recherche médicale« , a dit M. Bensouda lors d'un colloque-webinaire sur le « financement de la recherche au Maroc et la France: Quelles perspectives ?« . « La recherche est l'un des grands moteurs de développement des pays. Et par 'recherche', j'entends bien évidemment 'recherche scientifique' dans son acception la plus large, qui inclut toutes les composantes de la recherche, tous les domaines et toutes les disciplines; scientifiques, technologiques, économiques, culturelles, artistiques, philosophiques,…« , a-t-il précisé. Que ce soit aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en France ou partout ailleurs, d'innombrables projets de recherche, médicale en particulier, ont abouti en prenant appui exclusivement sur ce type de financement qui ne cesse de gagner en importance, a fait observer le Trésorier Général du Royaume. Initié par la TGR et l'Association pour la fondation internationale de finances publiques (FONDAFIP), avec le soutien de la revue française de finances publiques (RFFP), ce colloque-webinaire a été l'occasion pour M. Bensouda de rappeler l'adoption courant 2018, d'une loi sur le financement collaboratif (loi 52-18), qui pourrait servir de cadre juridique à ce type de montage financier pour les projets de recherche. « La pratique nous en montrera les insuffisances éventuelles et nous permettra de l'améliorer certainement », a estimé le Trésorier Général du Royaume. Il a, parallèlement, relevé que la crise liée au nouveau coronavirus (Covid-19) a montré que les universités, les instituts de recherche et les laboratoires au niveau mondial comptent d'éminents scientifiques marocains qui occupent des postes du plus haut niveau de connaissance et de décision. « C'est là un gisement à fort potentiel que le Maroc devrait exploiter, aussi bien en termes de sources de financement qu'en termes de transmission du savoir et des connaissances ». M. Bensouda, qui a indiqué que les dépenses intérieures de recherche et développement au Maroc, rapportées au PIB, se situent à environ 0,8% en 2020, a souligné que la mobilisation des ressources nécessaires pour le financement de la recherche dans le Royaume est un défi de taille à relever. « Certes, des initiatives dans ce sens existent bel et bien. Mais, il est nécessaire de multiplier les efforts et de faire preuve de créativité pour améliorer le volume des investissements dans la recherche qui sont, à mon sens, la clé de notre avenir », a-t-il fait valoir. A ce propos, plusieurs expériences à l'international ont démontré le rôle important que peut jouer le secteur privé pour soutenir la recherche, a noté M. Bensouda, jugeant que la relation entre le monde de l'entreprise d'un côté, et celui de la recherche de l'autre, doit être une relation de symbiose, mutuellement profitable et, par-dessus tout, bénéfique pour le développement du pays. Le secteur public est, ainsi, appelé à jouer un rôle de catalyseur, a-t-il soutenu, précisant que même si les travaux de recherche sont réalisés en grande partie par le privé, le public en supporte, généralement, une bonne part de financement, sous différentes formes (subventions, aides directes, avances récupérables, crédit d'impôt, etc). Bien entendu, dans une telle perspective, il est très important de mettre en place des mécanismes de régulation, a relevé M. Bensouda, insistant sur la gouvernance qui est doublement importante pour mettre de la cohérence dans l'effort de recherche et créer des pôles d'excellence à même de générer un effet de levier sur le développement du pays. De son côté, le professeur Michel Bouvier, président de FONDAFIP et directeur de la RFFP a indiqué que la recherche est d'autant plus importante avec le contexte actuel « pour fonder les politiques publiques que nous aurons à mener dans les années à venir ». « Il n'y a pas d'innovation sans recherche et il n'y a pas de développement économique sans innovation », a-t-il souligné, notant que ce sont des investissements d'avenir qui ne pourront plus jamais être assurés uniquement par le secteur public. M. Bouvier a, dans ce sens, mis l'accent sur la nécessité de trouver une articulation « solide » entre les secteurs public et privé, estimant que la recherche doit ainsi bénéficier d'une synergie entre les deux parties par tous les moyens possibles. Pour sa part, le professeur Mostapha Bousmina, Chancelier de l'Académie Hassan II des sciences et techniques et président de l'Université Euromed de Fès (UEMF), a souligné le besoin de continuité de politique d'enseignement supérieur-recherche-innovation, mettant en avant quelques axes prioritaires en termes de la recherche et de l'innovation durant le post-coronavirus. Il s'agit de la « santé, médecine et biomédical », du « digital, Intelligence artificielle », de l' »agriculture, énergie-eau », de l' »automobile, aéronautique, agroalimentaire, textile, électronique, logistique », de la « valorisation des ressources naturelles » et de l' »environnement, changement climatique ». M. Bousmina a insisté aussi sur la poursuite des réformes engagées en la matière qui sont, d'après lui, « sur la bonne voie », passant en revue les axes stratégiques du système de recherche-innovation à savoir, la gouvernance, les Ressources humaines, le système d'innovation, le financement et l'évaluation. Ce colloque a connu aussi l'organisation de deux panels sur "quelles sources de financement à mettre à contribution?" et "quelle gouvernance pour mieux répondre aux besoins des territoires?".