Avec 5 millions de cas de contaminations et plus de 163.000 décès, les Etats-Unis sont le pays le plus touché au monde par la pandémie du Covid-19. Avec ses conséquences sévères aux plans économique et sociale, cette crise sanitaire inédite a changé le visage de l'Amérique. Au niveau politique, elle risque de peser lourd sur l'issue de la course à la Maison Blanche en passe, avec les conventions d'investiture, d'entamer sa dernière ligne droite. Depuis la détection des premiers cas en janvier, la campagne présidentielle pour le scrutin du 3 novembre a été profondément bouleversée. A l'exception de quelques rassemblements, dont celui très critiqué à Tulsa dans l'Oklahoma, à l'initiative de Donald Trump, la campagne a largement basculé en mode virtuel. A la place des grands rassemblements dans les salles et les gyms, les réseaux sociaux ont été davantage pris d'assaut par les équipes de campagne des républicains et des démocrates. Les conventions politiques des deux parties ne sont pas en reste. Pour ce dernier acte de la campagne interne de chaque parti, qui marque le coup d'envoi de la véritable bataille pour l'élection, les partisans de Trump et de son rival présumé, Joe Biden, ont été contraints de changer de plans et s'adapter au contexte restrictif de la pandémie. Pour limiter le risque de contamination, ces deux événements majeurs auront lieu en ligne. Selon la tradition politique américaine, les conventions sont l'occasion pour les délégués d'investir officiellement les candidats présidentiels et une tribune pour présenter les programmes et les priorités et séduire le plus grand nombre d'électeurs. Depuis la première convention politique tenue en 1831 par le parti antimaçonnique dans un bar de Baltimore, leur format a certes énormément évolué au fil du temps mais jamais elles n'ont eu lieu dans pareil cadre. Du 17 au 20 août, la convention démocrate, initialement prévue à Milwaukee, dans le Wisconsin, se tiendra sous forme presque entièrement virtuelle sous le thème: Unifier l'Amérique (Uniting America). L'ancien président Barack Obama, toujours populaire au sein du parti, et l'ex-première dame Michelle Obama seront, aux côtés de Jill Biden, épouse du candidat du parti à la Maison Blanche, les principales têtes d'affiche de la Convention nationale démocrate dont le point culminant est le discours d'acceptation de l'investiture de Joe Biden à partir de son fief à Delaware. Sur la liste des orateurs figurent également l'ancienne candidate malheureuse à la présidence des Etats-Unis, Hillary Clinton et l'étoile montante de l'aile gauche du parti, Alexandria Ocasio-Cortez. Après un long suspense, l'ancien vice-président vient de faire le choix de la sénatrice noire, Kamala Harris comme colistière pour l'épauler face au tandem Trump-Pence. S'il venait à gagner le scrutin, elle sera la première femme à occuper ce poste stratégique. Mme Harris, 55 ans, est en effet la troisième femme seulement de l'histoire des Etats-Unis à être choisie comme colistière d'un candidat à la présidence. Ancienne adversaire de Joe Biden lors de la primaire du parti démocrate, qu'elle a due abandonner faute de soutien financier, elle était considérée comme la favorite à ce poste, notamment dans la foulée des manifestations anti-racisme qui émaillent le pays depuis le meurtre de George Floyd fin mai dernier. Depuis plusieurs mois, en effet, de plus en plus de voix, dont une centaine de célébrités afro-américaines, se sont élevés pour réclamer la sélection d'une femme de couleur comme colistière de Biden, un atout de taille pour s'assurer notamment l'appui de cette minorité qui a été décisive dans sa victoire lors de la primaire démocrate. Dans le camp du Grand Old Party (GOP), la convention qui doit désigner officiellement Donald Trump comme candidat à la réélection, est initialement prévue du 24 au 27 août. Pandémie oblige, Trump qui voulait tant un grand rassemblement de campagne à l'image de 2016, a dû renoncer à accepter son investiture à Charlotte, en Caroline du Nord, puis à Jacksonville en Floride. L'évènement pourrait être réduit à la seule journée du 27 août. Si quelque 336 délégués sont toujours attendus à Charlotte pour voter, y compris par procuration, au nom du reste des délégués (plus de 2.500), en faveur d'un nouveau mandat pour Trump, ce dernier pourrait prononcer par visioconférence, à partir de la Maison blanche, son discours de nomination. Ce choix a suscité l'ire de l'opposition démocrate qui y voit une tentative de politiser la résidence des présidents américains. Autre enjeu de taille dont l'ampleur est exacerbée par les risques posées par la pandémie, a trait au vote par correspondance. Si les démocrates appellent de leurs vœux pour favoriser ce mode afin de limiter les risques de contamination, le Locataire de la Maison Blanche s'y oppose fermement. Il est allé, dans des tweets, jusqu'à évoquer, avant de se rétracter, un possible report de l'élection du 3 novembre invoquant le risque d'une fraude électorale généralisée. En cette période électorale, le vote à distance suscite en effet une nouvelle bataille politique. Il est pourtant largement en vigueur dans nombre d'Etats, y compris certains qui sont décisifs pour la présidentielle (Swing States). Pour barrer la route à un second mandat de Donald Trump, les démocrates comptent sur l'élargissement de l'envoi des bulletins de vote par poste afin de garantir notamment une plus grande participation des jeunes et des minorités, qui se rendent généralement moins aux urnes et qui, dans l'actuel contexte de crise sanitaire et économique et de tensions sociales, se montrent moins favorables au président sortant.