Le Maroc en tant qu'Etat-Nation a eu le talent de forger au fil des siècles une culture nationale nourrie et enrichie par l'addition des histoires et des spiritualités de ses communautés, a affirmé M. André Azoulay, conseiller de SM le Roi. S'exprimant lors de la 2ème Journée culturelle judéo-marocaine, organisée récemment à l'université Al Akhawayn d'Ifrane à l'initiative de "Mimouna Club", M. Azoulay a souligné que c'est dans cette logique de la synthèse qu'il lit et comprend la modernité du Maroc et sa singularité dans un environnement mondial qui est celui de la frilosité, du repli et parfois de la régression. "Cet héritage, dont chacun d'entre nous est dépositaire au Maroc, est précieux et nous sommes collectivement responsables de sa pérennité et de son intégrité", a-t-il dit. Et c'est dans cette perspective, a-t-il relevé, que l'existence du Club Mimouna, né de la seule volonté et de la lucidité sereine des étudiants d'Al Akhawayn, prend tout son relief et exprime toutes ses promesses pour le Maroc de demain, un Maroc dont "j'ai vu et entendu à Ifrane qu'il refuse de raisonner par soustraction ou par omission quand il s'agit de nos racines les plus profondes, celles qui depuis plus de 2000 ans façonnent et confortent la riche pluralité de notre identité". Pour sa part, M. Anis Birrou a souligné que la culture judéo-marocaine constitue une composante indéniable du patrimoine national marocain. Mieux encore, la culture juive marocaine est une composante intégrante de la culture marocaine et qu'elle a ses racines dans les réalités marocaines les plus profondes et les plus authentiques, rappelant que la présence juive au Maroc remonte au 2ème siècle av. J.-C. Il a précisé, dans le même ordre d'idées, que les vestiges nombreux de cette coopération et de cette imbrication des hommes et des sensibilités, qui illustrent les différentes phases de l'épanouissement des juifs pendant cette longue histoire sur la terre marocaine, révèlent plus de similitudes que de différences entre les communautés juive et musulmane. Evoquant la place du patrimoine judéo-marocain dans la culture marocaine, M. Birrou a souligné que le mode de vie et de pensée des juifs, leurs langues, habitat et coutumes ont été leurs grands traits jusqu'à la colonisation, ceux du pays en général, et de la région en particulier. Et si la spécificité religieuse est la cause des particularités qui se sont affirmées au cours du processus historique, elle n'a pas abouti pour autant à une simple juxtaposition de deux cultures différentes, a-t-il estimé, précisant que le fond religieux juif était teinté de spécificité marocaine au niveau des coutumes (minhag), des ordonnances juridiques locales (taqqanot) et des accompagnements de la liturgie. Les interactions entre la communauté juive marocaine et son environnement socioculturel ont eu pour résultat global un judaïsme, que le conférencier a caractérisé de typiquement marocain, ayant sa propre personnalité même au sein du rite sépharade. Il a, en outre, fait savoir que les juifs marocains parlaient la langue de leur région: le Berbère pour les habitants du Haut Atlas, l'Espagnol pour les habitants des villes du nord et l'Arabe pour le reste. Quant à l'hébreu, il était gardé comme langue savante du culte. Il s'est également attardé sur les spécificités de ce patrimoine judéo-marocain, dont la reconstruction est loin d'être achevée. De son côté, M. Simon Lévy, directeur du Musée du patrimoine culturel judéo-marocain de Casablanca, qui participe lui aussi pour la deuxième fois à cette rencontre, s'est félicité de l'initiative du Mimouna Club, qui a pour objectif de promouvoir le rapprochement entre les peuples et de faire découvrir la richesse culturelle du Maroc, à travers ses différentes composantes dont la composante juive. Pour sa part, M. Driss Aouicha, président de l'université Al Akhawayn, a exprimé sa volonté d'encourager de telles retrouvailles sur les nobles valeurs de solidarité et de tolérance. "J'aimerai que cette initiative de Mimouna Club se perpétue pour contribuer à l'enrichissement de l'action menée au niveau du paysage universitaire marocain", a-t-il noté. Cette rencontre, tenue sous le thème "le patrimoine judéo-marocain dans la création artistique marocaine", a été marquée par l'organisation d'une exposition d'objets d'arts, provenant du musée de la Fondation du Patrimoine culturel judéo-marocain et d'une soirée musicale. Créé en 2007, Mimouna Club s'est fixé pour objectifs de faire découvrir les traditions juives dans leurs différences et leurs similarités avec les traditions musulmanes dans le contexte marocain et la place du patrimoine juif dans la culture nationale.