L'évolution de la ville de Fès s'est faite dans le sens d'une "périphérisation" ayant entrainé la disparition des jardins et l'occupation de terres agricoles qui la ceinturaient, ont souligné jeudi des participants à un colloque sur "l'aménagement périurbain". Selon M. M'Hamed Idrissi Janati, de la faculté des lettes d'Agdal-Rabat, quoique le fait urbain au Maroc soit ancien, le passage récent d'un "Maroc rural" à un "Maroc urbain" s'est produit à un rythme accéléré. De 8 pc il y a un siècle, le taux d'urbanisation dépasse actuellement 56 pc au Maroc, a-t-il dit, notant que l'aire urbanisée de Fès est passée de 3.878 ha en 1960 à plus de 10.000 ha aujourd'hui. Ce qui lui a fait dire que c'est surtout dans ses périphéries que Fès se construit depuis les années 60. Légalement ouvertes à l'urbanisation ou non, ces périphéries constituent aujourd'hui les fronts d'urbanisation les plus dynamiques, donnant lieu à des territoires métissés où se juxtaposent le "clandestin" et les aménagements planifiés, a-t-il relevé. Elles représentent de ce fait des territoires stratégiques du développement et de l'aménagement de la ville, a-t-il noté. Pour M. Saad Benamar de l'Ecole normale supérieure de Fès, la cité présentait à la périphérie immédiate de ses remparts "Jnane Sbil" et tout autour des jardins utilitaires ou d'agrément "Arsate", qui constituaient une large trame de verdure intermédiaire entre la ville et les terres agricoles. Ces jardins jouaient un rôle important dans l'acclimatation, la sélection et l'introduction en Europe, via l'Espagne andalouse, d'espèces et de variétés d'arbres fruitiers, dont certaines sont encore aujourd'hui exploitées exclusivement à Fès, a-t-il souligné. Pour sa part, M. Abdelkader Benbassou, inspecteur régional de l'Urbanisme, de l'Habitat et de l'aménagement a reconnu que l'espace régional de la ville de Fès a connu un développement déséquilibré engendré par l'énorme écart démographique, économique et d'équipements entre la métropole et le reste des centres périphériques. Il en a résulté de grands dysfonctionnements dont la paupérisation de la population rurale, l'exode rural vers la seule ville de Fès et le développement exponentiel de poches d'habitat insalubre et non réglementaire aussi bien à l'intérieur de la ville de Fès, qu'au niveau de ses centres périphériques, a-t-il expliqué. Ces centres périphériques, a-t-il ajouté, connaissent par ailleurs une pression sur le plan des investissements, liée à des problèmes d'organisation et de maitrise, issus du vide juridique qui s'explique par l'absence d'un document d'urbanisme organisant l'espace périphérique. Pour remédier à cette situation, a-t-il avancé, un schéma d'organisation territoriale des zones périphériques (SOS) a été réalisé dans le but d'orienter le développement de ces zones dans une vision équilibrée et une organisation cohérente de l'espace périphérique de la ville de Fès. Initié par la faculté des lettres et des sciences humaines Fès-Saïss, ce colloque international réunit une pléiade de spécialistes marocains et étrangers venant notamment de France, de Roumanie, du Sénégal, d'Algérie et de Tunisie.