Réputée pour être une agglomération verdoyante, Rabat, qui a été choisie par l'association américaine Earth Day Network, comme "ville première" pour la célébration du 40ème anniversaire de la Journée de la Terre, conforte sa vocation en valorisant ses espaces verts urbains et périurbains. Par Aqqad El Hassaniya Avec la réouverture prochaine du jardin d'essais botaniques, Rabat, qui sera déclarée première ville verte du Maroc, creuse davantage l'écart avec les autres cités du Royaume en matière de respect de l'environnement et de mise en valeur des espaces verts. Rabat qui est parsemée par pas moins de 260 ha d'espaces verts urbains et périurbains et une ceinture verte couvrant 1063 ha, apparaît ainsi bien lotie par rapport à la plupart des autres villes du royaume qui, faute de rigueur en matière de politique environnementale, subissent actuellement les contrecoups d'une urbanisation galopante.
Si le ratio des espaces verts par habitant préconisé par l'OMS est de 10m2/habitant, cette moyenne est de plus de 20 m2 par habitant à Rabat, déclare non sans fierté le secrétaire général du Conseil de la ville, M. Abdelfttah Skir. Dans le cadre de la valorisation du potentiel paysager de la cité, les services de la wilaya et le Conseil de la Ville de Rabat se sont investis dans l'embellissement et l'humanisation du milieu urbain en réaménageant et en multipliant les espaces verts. Nombre de jardins, parcs et espaces verts ont ainsi été créés et aménagés, où le promeneur, seul ou en famille, peut se reposer sur un banc et s'imprégner de verdure, se laisser bercer par le chant des fontaines, ou regarder ses enfants jouer en toute sécurité dans les aires de jeux. Les jardins El Majd (rond-point El Kamra), El Kifah (avenue El Kifah), Nouzhat Hassan (Bab El Bouiba- 7ha), Ibno Rochd (ex-Madinat Al Irfane), Hassan (près du Mausolée Mohammed V), Ibn Toumert (longeant les remparts allant de Bab Rouah à Bab El Had) et le Jardin d'essais botaniques (Agdal) en sont de beaux exemples. Mais l'effort ne s'arrête pas là. Un autre grand jardin, s'étendant sur 15 ha entre l'hôpital Avicennes et la Mosquée Lalla Soukaina, sera bientôt ouvert au public, a annoncé l'architecte-paysagiste El Bennaoui, chef des espaces verts de la wilaya de Rabat. Ce nouveau jardin aura des circuits cyclables, des parcours pour le footing et le jogging, un terrain pour les amateurs du jeu de boules, des pistes pour les randonnées, etcŒ La ceinture verte, un garde fou contre la menace du béton Toutefois, la tentation d'une urbanisation débridée menace la capitale du royaume qui risque de perdre cette richesse. Selon M. Yassine El Jilani, chercheur en Economie des territoires à l'Université Mohamed V Agdal, la ceinture verte, qui s'étale sur 1063 ha et fait partie des espaces verts périurbains de la ville, "n'est pas à l'abri d'une éventuelle urbanisation". Pour M. El Jilani, qui est l'auteur d'un étude sur la sauvegarde et la mise en valeur de la ceinture verte de Rabat-Temara, la pression urbaine sur ce territoire se fait de plus en plus forte en raison de la croissance de la population de la région et l'extension du périmètre urbain qui en découle. Le changement d'affectation de zones est la seule possibilité offerte à Rabat si on veut combler les besoins des prochaines années en termes de logements et d'équipements publics, préconise-t-il. Quant à Témara, si le taux d'accroissement annuel de 5.4 c se maintient, sa croissance se fera inévitablement aux dépens des espaces naturels, explique-t-il. Maintenir l'équilibre entre la progression du béton et l'aménagement et la protection des espaces verts est une nécessité si on veut préserver les poumons de la cité, sauvegarder la diversité biologique, lutter contre le réchauffement climatique, réduire la pollution et fournir ainsi à la population un environnement sain où il fait bon vivre. Véritables poumons verts des populations urbaines, les espaces verts constituent également un support de la diversité biologique et participent à la lutte contre le réchauffement climatique, à la réduction de la pollution atmosphérique et à la protection de l'environnement. Les schémas directeurs et plans d'aménagement: un moyen de garantir le droit à la nature (Encadré) Les documents d'urbanisme, que sont les schémas directeurs et les plans d'aménagement, garantissent aux citadins un environnement sain, notamment la création et la protection des espaces verts. Les schémas directeurs et les plans d'aménagement établis par les agences urbaines intègrent les surfaces dédiées à la création d'espaces verts et plantés, a déclaré à la MAP, M. Abderrahmane Chorfi, directeur général de l'Urbanisme et de l'Architecture et de l'Aménagement du territoire, au ministère de l'Habitat, de l'Urbanisme et de l'Aménagement de l'Espace. Les nouveaux logements sont construits conformément aux principes directeurs des documents d'urbanisme qui prévoient un certain nombre d'obligations notamment en ce qui concerne les espaces verts à intégrer dans la conception de tout projet urbain, a-t-il ajouté. A l'échelle urbaine, les plans d'aménagements établissent une norme de 450 m2 d'espaces verts pour 1.000 habitants, a-t-il indiqué, précisant que le ministère veille à ce que cette norme soit appliquée dans le cadre de l'examen des projets de lotissements. Le groupe Al Omrane s'est également impliqué dans cette démarche en se fixant pour objectif de planter dans ses opérations 50.000 arbres de 2 à 3 mètres de haut en 2010, a-t-il signalé. Par ailleurs, a-t-il dit, des réflexions sont actuellement en cours pour interdire toute dérogation sur les espaces verts ou plantés. Maintenir l'équilibre entre espaces urbains et milieux naturels Près de 500.000 habitants affluent chaque année dans les villes et les superficies nécessaires pour répondre à leurs besoins en matière de logement s'élèvent à 3.000 ha par an dans les zones urbaines, a estimé, pour sa part, M. Réda Cherkaoui, chef de la division de l'urbanisme au sein du même département. Les extensions urbaines se font avec le souci de protéger les zones agricoles et le patrimoine naturel, a-t-il dit, mettant l'accent sur le souci des services concernés de bâtir des lotissements en accord avec le développement durable et afin que les nouveaux habitants disposent d'espaces naturels. Toutefois, malgré le ton rassurant de ces déclarations, des témoignages recueillis auprès de Rbatis laissent paraître la peur de voir l'urbain grignoter encore et encore sur les zones agricoles et les campagnes avoisinantes. Et pour cause. La rareté du foncier dans la ville pousse l'espace urbain de plus en plus loin, là où il n'y a pas si longtemps, il n'y avait que fermes, vergers et bosquets.